Prosopopée : nouveaux rôles

Rapports de partie, questions et discussions diverses à propos de mes jeux dont Prosopopée et d’autres de mes productions

Prosopopée : nouveaux rôles

Message par Frédéric » 06 Mai 2010, 20:05

Un truc qui me gène depuis longtemps dans Prosopopée, mais que je ne savais pas trop comment changer : 2 à 6 médiums qui se baladent pour résoudre les pb, ça ne colle pas du tout avec mes fictions-références, ni avec l'idée que je me fais du jeu.

Je réfléchis donc à des rôles à donner aux joueurs.

Actuellement, sans vouloir faire dans l'exhaustif, voilà une petite classification des rôles qui me semblent intéressants dans les films et séries d'animation de référence pour Prosop' :

Mode Mushishi :
Médium(s) : Ginko et autres mushishis
Victime(s) : garçon avec des cornes, fille aveugle et son copain qui se fait contaminer, village entier,..
Fautif(s) : mushis, villageois, victimes parfois, mushishis parfois...

Mode Mononoke (Ayakashi) :
Médium(s) : l'apothicaire, femme enceinte (résout le problème en donnant au mononoke ce qu'il veut)
Victime(s) : femme enceinte, équipage du bateau, fantôme de la femme suicidée
Fautif(s) : femme suicidée, moine amoureux de sa sœur, gérante de l'hôtel, témoins du crime...

Mode Chihiro :
Médium(s) : non
Victime(s) : Chihiro, employés des bains
Fautif(s) : Chihiro, parents de Chihiro, humains (esprit de la rivière/esprit putride), sans-visage
Allié(s) : Haku, Lin, le vieux Kamaji, Zéniba, le sans-visage
Maître des lieux tyrannique : Yubaba, employés des bains

Mode Christoph :
Joueur Solutionneur (médium)
Joueur Complicateur
Joueur Bâtisseur

Mais !!!
En réalité, je pense que je n'ai pas besoin de les nommer, car ce que je pense, c'est que le vide fertile opère :
Le Cercle des Couleurs avec les dés de Problème génèrera des Fautifs, et des victimes et des complicateurs. L'aide créera des alliés

Ce que je vais tenter dans un premier lieu, c'est commencer par créer des personnages en lien avec le paradigme (et le déséquilibre (= l'épicentre des problèmes), mais ils ne le savent pas encore).
Par exemple : le fermier, le jeune pêcheur et la tisserande.
Chaque joueur en choisit un.

Idées & Questionnements :
Pour le médium, j'hésite entre deux choses :
  • Soit le médium change de joueur à chaque tentative de résolution des problèmes, soit il change via un autre facteur (par exemple, celui qui a le plus de dés... ou un ou des jetons symbolisant l'attracteur étrange). Le médium est-il toujours le même personnage ou change-t-il d'identité en même temps que de joueur ? Dans un cas, les joueurs créent tous un personnage et l'un devient médium au cours de la partie. Dans l'autre, un médium est créé dès le départ et les joueurs se le passent.
  • Le médium est le seul à avoir des médiations, les autres personnages doivent toujours effectuer un sacrifice pour résoudre un problème (sacrifier quoi ?). Le médium ne pourrait pas faire de sacrifice.
  • Les résolutions commenceraient par déterminer la cause du problème, puis lancer de dés, puis résolution en cochant une médiation (donc invalidation temporaire) pour le médium et sacrifice pour les autres personnages.
  • Quand le cercle des couleurs est vidé de ses problèmes, le médium change de main (enfin, définir la modalité) et les personnages secondaires sont remplacés.
  • Les dés de problème ne peuvent pas être attachés au médium, ni en tant que victime, ni en tant que fautif. En revanche, c'est tout indiqué pour les autres personnages (à voir si le nb de pb par perso n'est pas excessif).

Voilà mes idées pour le futur playtest.
N'hésitez pas à me donner vos avis et à me faire des suggestions. ;)
Frédéric
 
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Re: Prosopopée : nouveaux rôles

Message par ShamZam » 18 Mai 2010, 18:12

Quelques questions en vrac :
- Est-ce que des rôles génériques ne pourraient pas être dégagés en respectant le thème de la peinture ?
- Est-ce que les rôles ne devraient pas tourner au fil de la partie ?
- Est-ce que Prosopopée doit nécessairement suivre la trame des œuvres qui sont à son origine ?
- Est-ce que nécessairement chaque joueur doit avoir un rôle ?
- Est-ce que chaque partie ne pourrait pas présenter plusieurs personnages dans lesquels chaque Esprit (et non plus médiums) pourraient s'incarner ? Chaque esprit aurait alors une sensibilité différente (couleurs et autres) et donc son incarnation influencerait son hôte.
Alex
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Re: Prosopopée : nouveaux rôles

Message par Frédéric » 18 Mai 2010, 20:24

Hello Alex !
- Est-ce que des rôles génériques ne pourraient pas être dégagés en respectant le thème de la peinture ?

Tel quel, les seuls rôles "nommés" qui m'intéressent sont : le (ou les) médium(s) et "ceux qui ne sont pas médiums". Car je pense que le cercle des couleurs, les dés de problèmes et les règles sur l'aide vont amener ces rôles à se dessiner librement et naturellement en victime, fautif etc. Pour le moment je ne pense pas qu'il soit utile de donner ces rôles aux joueurs, puisque dans les parties précédentes, ils se les donnaient déjà. Donc, mon objectif est de diminuer le nombre de médiums, mais de donner aussi des personnages secondaires aux autres joueurs.
Et pour information, le médium, en peinture, est une sorte de liant/diluant utilisé principalement pour la peinture àl'huile (et acrylique) : http://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9dium_%28peinture%29
- Est-ce que les rôles ne devraient pas tourner au fil de la partie ?

Je pense qu'ils changeront à la fin d'une résolution, sinon, si je crée une dynamique permettant au médium de changer avant chaque résolution, ce sera plus fréquent.
- Est-ce que Prosopopée doit nécessairement suivre la trame des œuvres qui sont à son origine ?

Question pertinente. Au départ, Prosopopée était une idée vague assez Miyazaki-esque avec un MJ qui dévoilait un monde extraordinaire aux joueurs. Puis j'ai eu envie de donner de fortes responsabilités narratives aux joueurs, ce qui a modifié considérablement le jeu par rapport à l'idée de base, mais m'a amené à considérer l'intérêt d'un influence telle que Mushishi. Mais je remarquais un certain nombre de choses très difficiles à mettre en œuvre avec mes notions de JDR : la dimension poétique et contemplative d'une part et l'anesthésie de la dramaturgie d'autre part (transférée en fait sur des personnages secondaires). Mushishi a donc été un guide formidable. Mais aujourd'hui, je prends en considération d'autres films et séries d'animation japonais qui m'offrent d'autres visions de ce je recherche. Mushishi n'est donc plus la principale référence, mais il y a un certain nombre de choses indispensables, qui font aujourd'hui l'identité de Mushishi, notamment le désintéressement des médiums, l'importance des "couleurs" etc. Mais je ne suis pas complètement fermé aux nuances (cf. les différentes références dans mon premier post).
Aujourd'hui, la dimension poétique et contemplative me satisfait, je trouve que le jeu incite de manière efficace à cette dynamique créative.
Mais je ne suis pas satisfait au sujet de la dramaturgie : je pense l'avoir efficacement anesthésiée pour les joueurs, mais je trouve les problèmes assez fades en comparaison avec les fictions de référence : dans Mushishi, il y a notamment une jeune fille qui a perdu la vue et que sa famille adoptive enferme dans un pavillon sans fenêtres dans le jardin pour ne pas qu'elle contamine les autres. Le fils de la famille va jouer avec elle dans le noir et finit par perdre la vue à son tour (à cause d'un parasite invisible).
Ça claque, non ?
J'ai envie d'histoires comme ça dans Prosopopée, c'est pour ça que je développe ce jeu. Donc, je crois qu'en donnant aux joueurs la possibilité de jouer les personnages secondaires, ceux qui sont affectés par les problèmes ou qui les ont déclenchés, on obtiendra quelque chose de bien meilleur.
- Est-ce que nécessairement chaque joueur doit avoir un rôle ?

Que veux-tu dire ? Que certains ne devraient pas posséder un personnage ? Ils s'occuperaient du décor alors ? Ils ont intérêt à faire preuve d'abnégation si ce rôle est attribué à l'avance.
- Est-ce que chaque partie ne pourrait pas présenter plusieurs personnages dans lesquels chaque Esprit (et non plus médiums) pourraient s'incarner ? Chaque esprit aurait alors une sensibilité différente (couleurs et autres) et donc son incarnation influencerait son hôte.

C'est exactement la question que je me posais là :
Le médium est-il toujours le même personnage ou change-t-il d'identité en même temps que de joueur ? Dans un cas, les joueurs créent tous un personnage et l'un devient médium au cours de la partie. Dans l'autre, un médium est créé dès le départ et les joueurs se le passent.

Le seul truc que je veux éviter, c'est que devenir médium devienne un enjeu pour les joueurs. Donc si les joueurs peuvent endosser ce rôle en alternance, il vaut mieux que ce ne soit pas "gagné", mais plutôt "offert".

Un truc qui me plairait, c'est que l'on puisse commencer sans médium et que les joueurs soient confrontés à des problèmes à surmonter à la façon du voyage de Chihiro, par exemple (donc par des valeurs, de l'abnégation, des sacrifices) mais quand un joueur devient médium, il peut résoudre ces problèmes à la façon de Mushishi ou Mononoke (Ayakashi, pas princesse), c'est à dire avec sagesse, en essayant de rééquilibrer les choses, avec un minimum de dommages collatéraux.
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Re: Prosopopée : nouveaux rôles

Message par ShamZam » 18 Mai 2010, 21:20

J'ai manqué ta phrase, ou plutôt je ne l'avais pas bien comprise.
Donc ce que finalement au gré de mes questions je crois que je me suis mis à suggérer, c'est qu'en effet la règle 1 joueur = 1 personnage ne me semble pas indiquée. quand j'avais joué ma 2ème partie, j'avais d'ailleurs bien vu que certains joueurs trouvaient qu'il y avaient trop de personnages, qu'ils préféraient peindre le monde que de faire un auto-portrait.

Personnellement, je pencherais plus pour que chaque joueur interprète une sorte d'esprit, de mushi ou mononoke indéterminé ne pouvant agir sur le monde que via l'interface d'un personnage qu'il incarnerait sans que celui s'en rende tout à fait compte ou l'inverse qu'il le ressente tellement que des attributs étranges apparaîtraient sur son corps ou autour de lui. Ses attributs seraient la marque de cette possession. Il faut par contre alors spécifier si ces possessions librement acceptées ou pas.

Tu parles de mériter la capacité de posséder un corps mais je ne vois guère l'intérêt. En effet, dans Prosopopée, la parole n'est pas gagnée, elle est librement donnée à celui qui la désire.
Oups j'ai encore lu de travers ton message : je suis bien d'accord l'interprétation du médium doit être offerte et non gagnée. 200% en faveur !
Pour moi le contrôle du corps de l'hôte commun ou d'un hôte quelconque ne serait que la matérialisation dans la fiction de la prise de parole. Les esprits des joueurs iraient et partiraient des hôtes comme ils le sentent, au gré de leurs envies et des nécessités pour réharmoniser le monde. En en parlant je pense aux kodamas... ces petits êtres qui semblent ne servir à rien mais qui veillent.

J'ai un nouveau développement qui me trotte sévère en tête : avec un hôte commun, je verrais bien un personnage de chamane avec ses esprits totems incarnés par les joueurs ou un truc dans ce goût là.
Bon moi je suis très porté chamanisme d fait de bestYoles en même temps !


Pour médium, est-ce tu joues sur le sens en peinture du mot dans ton texte ? De mémoire non mais peut-être a-t-il changé ? Si ce n'est pas le cas, je trouve ça dommage.

Sinon oui ça claque comme histoire... mais c'est un drame ! Or pour moi si le but de prosop c'est de réharmoniser le monde, ça me semble aller à l'encontre. A moins peut-être d'amener la notion de sacrifice dans la mécanique mais alors ça privilègierait les histoires tragiques. Peut-être une option de jeu à proposer ? Pour un genre d'histoire gothique, pourquoi pas.
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Re: Prosopopée : nouveaux rôles

Message par Frédéric » 18 Mai 2010, 22:46

Je crois à la création de personnages "secondaires" avant le démarrage de la partie.
Pour Psychodrame, le gros du travail a porté là-dessus et ça a donné une richesse extra aux parties quand j'ai trouvé les bons éléments à développer.

Oui, ça fait longtemps que je trouve que c'est nase d'avoir un groupe de Médiums qui vont résoudre les problèmes. Comme si D&D avait imprégné Prosopopée malgré moi. :D Mais je n'avais pas de bonnes pistes pour régler ce problème là.

Les joueurs changeront de personnages, mais je pense que l'expérience de jeu sera plus forte si chaque joueur endosse un rôle pour un épisode au moins. Néanmoins, je pense que j'essaierai tout de même de donner une totale liberté aux joueurs de jouer le personnage de leur choix parmi ceux préparés.

Que ça devienne un drame ne me pose aucun problème. Théoriquement, si les joueurs appréhende le drame comme un moyen de juger les personnages, on sera en mode narrativiste.

Ben c'est pas moins cool qu'un autre, non ?

En revanche, rien que pour l'intérêt d'avoir un jeu soutenant une démarche simulationniste avec une logique narrative (et non narrativiste) je pense que je garderai en téléchargement une version moins dramatique de ce jeu, s'il s'avérait que la démarche créative change avec ces modifications, car j'ai quelques idées pour que les drames soient appréhendés par leur caractère esthétique.

P.S. : ça fait plusieurs fois qu'il y a une méprise de la part de plusieurs personnes au sujet de mes utilisations du terme "drame", je vais préciser ce que j'entends par là :
Plus ça va et plus j'ai foi en le fait que le narrativisme de Ron Edwards n'est en fait que la transposition au JDR du drame aristotélicien.
Aristote définit le "mode dramatique" comme un mode de présentation des histoires descendant du théâtre (Oedipe roi de Sophocle etc.), dans lequel le narrateur s'efface pour mettre en scène des personnages dont les actes amènent les spectateurs à porter un jugement de valeur sur les-dits actes. On parle aussi de littérature objective dans le cas de romans. Bien sûr, en JDR, le principe est un peu différent du fait que les joueurs sont à la fois émetteur et récepteur (mais j'ai ma petite idée de la façon dont l'adaptation se fait, mais j'en parle pas ici car sinon ce post va devenir bien trop long).

Il oppose le mode dramatique au mode du récit, découlant des premiers romans (L'Iliade par exemple) dans lesquels le narrateur expose un point de vue. Les premiers récits sont les épopées dans lesquelles le protagoniste est une icône porteuse des valeurs d'une nation (aujourd'hui, Matrix ou Le seigneur des anneaux fonctionnent de cette manière également). Le narrateur empêche le spectateur de remettre en question les buts et actions du héros (car il fait une sorte de propagande pour ces valeurs), alors que le mode dramatique l'incite au contraire.

Ce qu'Aristote met à jour dans La Poétique, c'est qu'il y a deux types de relations entre émetteur (créateur de la fiction) et récepteur (le spectateur). Ensuite, il a subdivisé le drame en deux genres : comédie et tragédie, mais depuis lors, les genres se sont multipliés et la tragédie n'existe plus.
Dans les œuvres linéaires, il est possible d'alterner les modes Drame et Récit moyennant un peu de virtuosité pour que le spectateur s'adapte facilement à la transition (ou s'en servir pour le remuer un peu).
Mais le JDR étant une activité de groupe où les joueurs doivent prendre des décisions, ce type de transition est casse-gueule, car tout le monde doit s'harmoniser sur ces modifications de logique créative et de réception de la création.

Enfin, le genre dramatique n'est pas le mode dramatique.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Drame_%28cin%C3%A9ma%29
Il y a quelques similitudes, mais en tant que créateur, je ne m'intéresse pas aux genres : ce ne sont que des étiquettes commerciales pour cibler les goûts d'un public. Les genres se multiplient pour la simple et bonne raison que leurs définitions sont perméables, ils se focalisent sur des différences plutôt superficielles si l'on s'intéresse à l'esthétique.
Donc le genre dramatique = histoire triste.
Ça pourrait se retrouver en lien avec le mode dramatique, mais Aristote considère que la comédie (qu'il définit comme une forme de drame (le mode) dans lequel les humains sont dépeints pires qu'ils sont en réalité. La tragédie dépeignant les humains meilleurs qu'ils sont en réalité) fait partie du mode dramatique (elle ne fait pourtant pas du tout partie du genre dramatique).

Donc, on peut générer des histoires tristes en JDR sans faire du narrativisme. (mais il y a mille façons de le faire, ce serait le sujet d'un autre thread).

Désolé pour la quantité de parenthèses.

Edit : modification de certaines phrases pour éviter des ambigüités.
Frédéric
 
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