[Arbre] Balade pour trois zonards

Rapports de parties, news et ressources

[Arbre] Balade pour trois zonards

Message par Thomas Munier » 10 Jan 2015, 12:19

BALADE POUR TROIS ZONARDS

Du Mad Max, du Tarentino, des scènes poisseuses, des scènes gourmandes, des scènes chaudes pour ce nouveau playtest du bac à sable Balade pour un Pick-Up !

Une séance d'Arbre, le jeu des clochards magnifiques dans les forêts hantées de Millevaux

Joué le 31/10/2014 aux Utopiales à Nantes avec Matthieu (Roger Cageot), Requyem (Gueule d'Acier) et Marie-Lucie (Enya).

Effectif réduit pour ma démo d'Arbre aux Utopiales mais effectif de luxe ! Je remercie vraiment mes trois joueurs de cette soirée pour leur bonne humeur et leur motivation. La partie s'en est ressentie, qui fut intense et bariolée.

Image

Crédits image : crashmaster 007, licence cc-by-nc + greenpeace, licence cc


Le contexte :

Roger Cageot, Gueule d'Acier et Enya sont trois zonards qui bricolent dans les bidonvilles en bordure de Marly-Gomont. Ils sont potes. Roger Cageot est alcoolique, Gueule d'Acier a la tronche toute rafistolée avec du métal de contrebande, Enya est une séductrice, on le découvrira plus tard.

Leur vie bascule quand, partis braconner à quelques kilomètres de Marly, ils découvrent un pick-up abandonné planqué dans la forêt au bord de la Voie Déchue.


L'histoire :

A l'intérieur, trois cadavres d'humains, un cadavre de chien. Roger Cageot reconnaît Julio, un gars toujours fourré dans des combines foireuses, et Enrique, son fidèle berger allemand, aussi bon comme chien de garde que Julio serait bon pour garder ton larfeuil.

De là, on comprend vite que Julio avait volé le pick-up à quelqu’un, mais ça lui a visiblement attiré des ennuis. Sur la plateforme, il y a une malle, les gars font sauter le cadenas et découvrent un missile avec d’indéchiffrables inscriptions en cyrillique. Ils se disent que ça vaudrait le coup de garder le pick-up et commencent à dégager les cadavres du véhicule.

Ils entendent alors une rumeur de véhicules en approches depuis la Saxe. Ils traversent vite fait la Voie Déchue pour se planquer dans la forêt de l’autre côté, derrière le mur végétal, c’est-à-dire suffisamment à distance de la lisière pour que la masse de végétation les dissimule totalement, tant au niveau visuel que sonore.

Ils voient passer une série de quads, le fameux gang des quads qui écume la Voie Déchue (tout près d’ici, il y a une caravane abandonnée qui a sûrement été leur proie il y a quelques temps) et tue et pille tous ceux qui bivouaquent trop en vue du bord de la route. Les gars se planquent à fond, car ils ont entendu dire que le gang des quads avaient une Sentinelle avec eux, un gars à demi-animal aux sens surdéveloppés.

Les quads arrivent en quatre volées, sans capter ni les zonards ni le pick-up. Sauf que le moteur du dernier quad explose juste à leur niveau ! La pilote du quad, Mama Mecano, une grosse bonne femme qui jure comme quinze charretiers, envoie ses deux acolytes, un gars et une fille, inspecter la zone pendant qu’elle ouvre le capot et fouraille dedans avec une putain de grosse clef anglaise. Les acolytes se dirigent vers la planque des zonards, et ces derniers prennent l’initiative de les buter.

Quand Mama Mecano prend conscience de ce qui se passe, elle file se réfugier dans la caravane abandonnée et gueule que ses copains vont venir la chercher et vont les étriper. Les zonards prennent la poudre d’escampette à travers la forêt. Tant pis pour le pick-up, on ira le chercher plus tard.

Ils croisent un chevreugne. Gueule Cassée, grand chasseur devant l’éternel, force le groupe à le poster jusqu’à enfin le rattraper et le mettre à mort au niveau d’une zone encaissée et marécageuse. Le sol est une boue noire qui aspire les bottes. Enya se sent mentalement agressée par la boue : Shub-Niggurath affleure particulièrement dans cette zone et essaye de faire mal à son âme.

Les zonards reviennent dans une zone sèche dès qu’ils le peuvent et marchent encore dans la forêt pendant quelques heures, vers la Saxe, pour être de sûr de semer le gang des quads qui est peut-être à leurs trousses à l’heure qu’il est.

Ils regagnent les abords de la Voie Déchue pour faire escale à l’Auberge Campagnile, une auberge qu’ils connaissent un peu et qui a une excellente réputation.

Dans l’Auberge, il y a deux convives : Desireless, chef des fanatiques expiatistes, seule rescapée de l’attaque suicide menée contre Marly Gomont il y a deux jours. Les zonards en ont entendu parler, mais ils n’identifient pas Desireless, car l’accessoire qui la trahirait – une longue faux bien aiguisée - est rangée dans la remise des aubergistes. Desireless a pas l’air jouasse et les zonards l’évitent soigneusement, sauf Roger Cageot, qui la provoque.

L’autre convive, c’est Monsieur Clément, un candide vendeur d’almanach. Dès qu’elle le voit, Enya lui met le grappin dessus : cette nuit, elle compte faire bien mieux que dormir, et le naïf Monsieur Clément va avoir un rôle à jouer dans ces projets.

Les aubergistes, Croûtelle et Briochon, accueillent les zonards. Croûtelle (qui est une mince rousse et non une plantureuse brune comme dans le premier playtest) flashe sur Roger Cageot, et Briochon, le visage mangé par une large moustache, flashe sur Enya, mais en crève de jalousie car il a bien compris qu’Enya a jeté son dévolu sur Monsieur Clément et compte le déniaiser dans la nuit. En bons gastromanciens, Croûtelle et Briochon préparent à chacun un plat personnalisé : quelque chose de bien sec pour Desireless, un vol-au-vent fourré avec des insectes vivants pour Monsieur Clément,

Les zonards ont payé leur gîte et leur couvert avec le cadavre du chevreugne. Gueule Cassée a le privilège de manger la tête de l’animal. Le crâne est décalotté et la cervelle a été préparé en friture avec le crâne en guise de bol. En garniture, les couilles de l’animal, encore chaudes.
Roger Cageot, alcoolique, et d’un appétit insatiable, reçoit une pile de tranches de cuisse de chevreugne, saignantes, et un grand pichet de vin noir.
Enya reçoit une nourriture anti-aphrodisiaque qui lui coupe ses ardeurs pour la nuit.

Croûtelle conduit les convives jusqu’à leurs chambres, à l’étage. Elle a prévu une chambre pour chaque, mais Enya insiste pour que Monsieur Clément dorme avec elle. Elle se dénude, Monsieur Clément reste en grenouillère, et ils dorment l’un contre l’autre, en chien de fusil, Monsieur Clément derrière Enya, dos au mur. La pauvre Enya, douchée par la nourriture magique de Briochon, n’aura pas l’ardeur d’aller plus loin.

Roger Cageot, ivre mort, redescend au rez-de-chaussée. Il croise Desireless. Cette dernière ne supporte pas l’attitude désinvolte de Cageot et lui fait savoir d’un regard noir. Cageot l’ignore et va retrouver Croûtelle dans l’écurie. Ils entament une sarabande sexuelle endiablée. A un moment, Cageot repense à Desireless et ça lui coupe toutes ses ardeurs. Mais Croûtelle, presque aussi soûle que lui, insiste pour poursuivre le match. Pour réveiller ses pulsions, elle l’entraîne dans un endroit délicieusement plus risqué : la cuisine, juste attenante à la salle à manger et à la chambre conjugale des aubergistes.

Ils y reprennent leur besogne dépravée, nus comme des vers, Croûtelle appuyée sur la table, Cageot devenu un vrai démon, quand Desireless fait irruption dans la cuisine !

Outrée par ce blasphème, elle oublie qu’elle est en cavale, elle oublie toute retenue, et reprend toutes ses fonctions d’expiatistes, elle se rue sur le comptoir et récupère sa faux !

Pendant ce temps-là, Enya s’est endormie, mais pas Monsieur Clément. Il lui picore la nuque de petits baisers, puis finit par ouvrir grand sa gueule et planter ses crocs dans la gorge de la belle zonarde ! Monsieur Clément, infecté par un ver vorace, s’il est un naïf gentilhomme le jour, est une bête affamée la nuit !

Enya se réveille et se lève juste à temps. Monsieur Clément lui a arraché un grand lambeau de peau de sa gorge, mais au moins elle est vivante. Il se rue sur elle, mais Gueule Cassée, réveillé par le raffut, fait irruption dans la chambre et crève Monsieur Clément au couteau.

Tout en criant au blasphème, Desireless décapite Croûtelle d’un grand coup de faux bien net ! Briochon fait irruption dans la cuisine, pour découvrir sa femme vomissant du sang par le trou de son cou, avec Cageot encore tout stupéfait, fourré en elle !

C’en est trop pour le pauvre aubergiste. Il se rue sur le comptoir pour récupérer son fusil et brûle la cervelle de Desireless.

A ce moment, Gueule Cassée et Enya (qui n’a pas pris le temps de s’habiller) entrent aussi dans la remise. Ils ont à peine le temps de se plaquer au sol que Briochon, ivre de désespoir, planqué derrière le comptoir, flingue à tout va dans la pièce. Gueule Cassée contourne le comptoir et lui fait sa fête.

Les choses s’arrêtent à peu près là : Enya trouve dans la cuisine de quoi se soigner, ainsi que Roger qui s’est pris une balle. Puis Enya et Gueule Cassée remontent dormir. Roger se fait descendre un matelas dans la salle à manger, il entreprend de monter la garde car après tout, les gars en quad pourraient venir assiéger l’auberge pendant la nuit. Il passe le restant de sa nuit sur le matelas à cuver et à psychoter, serrant le fusil de Briochon, à voir le fantôme de Julio assis sur le rocking chair en face de lui.

On finit sur le petit matin et le départ des zonards de l’auberge.


Etat des règles :

J'avais déjà testé les codes de sécurité à deux reprises, mais lors du playtest précédent, Grégoire m'avait fait la remarque que les codes de sécurité plaçaient trop le joueur en mode auteur. Il a soulevé un problème parce que je cherche à ce que les joueurs soient le plus souvent possible dans le personnage quand on joue à Arbre, ou du moins que les joueurs qui préfèrent cette posture y trouvent leur compte.

J'ai donc beaucoup travaillé sur l'immersion et la distribution du temps de parole dans cette nouvelle mouture des règles. Les codes de sécurité sont reformulés en "non / non car / non mais / oui mais / oui" avec le détail rédigé en mode personnage et non en mode auteur. On peut reformuler ses codes à la volée : ça fonctionne tant que le MJ comprend ce qu'on veut dire. Par exemple : au lieu de dire : "non, mon ennemi ne me plante pas sa dague dans le ventre, mais il perce ma gourde", on peut dire "j'esquive son coup de couteau et il perce ma gourde".

Le MJ ne formalise plus l’appel aux codes de sécurité. (avant, il disait quelque chose comme : « tu vas avoir un accident, qu’est-ce que c’est ? »). Il annonce tout type de danger (lié à un figurant, un animal, un objet, un phénomène) comme s’il s’agissait d’une personne qui s’apprête à faire mal au personnage : « le barbare va abattre sa hache sur ton crâne », « la boue s’apprête à t’aspirer un souvenir », « la tempête va te pousser et te faire tomber dans le fossé », etc. Si le joueur ne réagit pas, le truc arrive, mais il peut aussi employer un code de sécurité pour nuancer.

Pour interrompre le MJ, on peut toujours dire "je parle", mais dans l'absolu, dès qu'un joueur ouvre la bouche, le MJ doit se taire. Les joueurs les plus timides peuvent même interrompre le MJ en faisant un geste ou en lui touchant le bras.
Le MJ, quant à lui, n'interrompt plus sa narration pour demander aux joueurs ce qu'ils font : il fonctionne comme une interface de jeu vidéo : il agit ou réagit, il ne donne pas d'initiative aux joueurs.

Je crée aussi un rôle de joueur particulier : le leader. Autant chaque joueur peut interrompre le MJ à tout moment pour parler de son personnage, autant le leader peut interrompre le MJ pour demander aux autres joueurs ce que font leurs personnages. Comme on joue des marginaux rétifs à l'autorité, le rôle de leader peut bien sûr être renégocié tout au long de la partie, voire ignoré.

Dernière innovation et non des moindres : les codes de couleur. Au début de chaque scène, le MJ demande "couleur ? », chaque joueur répond "rouge" s'il y a trop d'action ou de violence, "orange" si c'est juste bien, "vert" s'il faut augmenter l'action et la violence. Issu directement du sadomasochisme, les codes de couleur sont là pour s'assurer que tout le monde reste à l'aise, sans pour autant que la partie se passe en pantoufles.


Commentaires sur la forêt :

Ce soir, on a joué Balade pour un pick-up, la forêt que j'ai fait jouer en campagne précédemment. Comme elle doit être dans le livre de base (elle est déjà dans la version playtesteur librement téléchargeable), j'essaye de la tester davantage.


Commentaires sur la séance :

Une super ambiance sur cette partie, des joueurs au taquet, des moments de tension, des moments de fun, des moments de débauche, et des moments tarentinesques en diable ! Le temps de parole, nickel, les codes de sécurité, nickel, les codes couleur, nickel aussi (ils étaient tout le temps en orange… en fait, c’était moi qui aurait voulu ralentir la cadence à certains moments ! Lors des prochains playtests, je vais autoriser le MJ à jouer moins speed que ne le demandent les joueurs, s’il fatigue, s’il veut installer une ambiance, mettre en place des attaches plutôt que de tout détruire en quatrième vitesse, jouer plus sur le long terme…). En tout cas, j’aurais clairement eu envie de poursuivre la chose. La perspective de remettre en scène la terrible Mama Mecano m’inspirait.

Ceci dit, je ne dois pas oublier qu’avec seulement trois joueurs, les choses sont plus faciles ! C’est indispensable de retester mes nouveaux codes de sécurité avec des groupes plus conséquents et moins « pro ». Je dois aussi voir si ça passe avec des niveaux d’agression plus élevés car j’ai relativement épargné ces trois zonards, si attachants qu’ils étaient.
Énergie créative. Univers artisanaux.
http://outsider.rolepod.net/
Thomas Munier
 
Message(s) : 2003
Inscription : 30 Nov 2012, 12:04

Retour vers Jeux made in Outsider

LES JEUX DES ATELIERS IMAGINAIRES

cron