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[Inflorenza] L'Archipel d'Eireann

09 Jan 2016, 12:43

L'ARCHIPEL D'EIREANN

Test du théâtre irlandais écrit par Kantelder, retour à Inflorenza classique, et réflexions sur le jeu intimiste et épique.

Jeu : Inflorenza, héros, salauds et martyrs dans l'enfer forestier de Millevaux

Joué le 14/08/15 chez moi

Personnages : Ewen de Kernan, Gwena

Image

crédits : 'J', andy patterson, dawn_perry, licence cc-by-nc, galerie sur flickr.com


Le Théâtre :

L'Archipel d'Eireann est un théâtre de Kantelder, qui a lieu en Irlande.


L'Histoire :

Ewen de Kernan

+ Je veux retrouver mon père, disparu il y a quelques années dans la Brume.
L'île de Belfast. Industrieuse et vaporeuse. Quais et docks crasseux et enfumés. Dockers humains et ogres à la peine. Le Mur de la Honte sépare la ville en deux. Jadis les catholiques étaient d'un côté et les protestants de l'autre, mais aujourd'hui il y a trop de passages entre les deux. Il y a encore des Faes à Belfast, mais ils sont tous réduits en esclavage, ils travaillent sur le port, où font partie de rouages, de machines ou de chaudières.
Moi, j'erre de pub en pub, le plus souvent soûl comme une barrique. Depuis des années, je cherche des informations sur l'endroit où a pu disparaître mon père, et j'ai longtemps cru que les tavernes de Belfast était le meilleur endroit pour en glaner. J'y ai fait la connaissance d'Aubouin, un être difforme et encapuchonné, bonhomme rabougri, hideux, qui me donne quelques informations sybillines en échange d'une pinte de bière de temps en temps.

Gwena

+ Je veux retrouver cette île inaccessible qui hante mes songes.
Depuis que je suis toute petite, je rêve de cette Île. On la prétend inaccessible, pourtant j'ai voué ma vie à la retrouver, persuadée qu'il y a un moyen. Aujourd'hui, j'ai grandi, je vis de la vente du poisson à Belfast avec ma famille, mais je n'ai jamais perdu espoir, je n'ai jamais cessé de mener l'enquête.

Ewen de Kernan

+ Je souhaite mettre la main sur une Carte des Brumes écrite par les druides.
C'est la Nuit de Saint-Patrick. C'est jour de fête et de beuverie pour tout le monde, mais c'est aussi jour d'amnistie pour les Faes, qui peuvent ce jour seulement quitter leurs cages, leurs cachots ou leurs chaudières, et se déplacer librement dans la ville. Saint-Patrick ce jour-là fait la paix avec le Serpent. (Dans l'Irlande chrétienne, les Faes sont assimilés au Serpent et par extension aux Horlas, et c'est bien pratique pour les réduire en esclavage).
Je me rends à la Taverne du Bout du Monde, c'est là où les plus grosses festivités auront lieu, l'occasion rêvée pour progresser dans mes recherches. La Taverne est située sur une jetée au-dessus de la mer de brume. Elle est ronde et en son centre, il y a un immense gouvernail couché. La grande table au milieu sert de piste de danse et les tabourets sont placés à la circonférence du gouvernail. Les barres du gouvernail sont suspendues au dessus de la mer, on voit l'eau entre les barres. Le gouvernail est toujours en rotation, et lorsque les danses les plus rythmées surviennent, les fêtards font tourner le gouvernail de plus en plus vite.
Le hideux Aubouin m'y a donné rendez-vous. Nous sommes tous deux attablés au gouvernail, et je l'arrose de Guinness pour avoir de nouvelles informations. Il m'explique que mon père est rendu sur une île réputée inaccessible. Enfin pas si inaccessible que ça : pour s'y rendre, il faut utiliser la carte des brumes. Bien sûr, il s'agit d'un artefact unique, les druides sauraient où le trouver.

Gwena

+ Mes passages successifs dans les tavernes m'ont convaincue que ce n'était pas dans la mémoire des hommes que je trouverai mes réponses.

J'ai passé beaucoup de temps dans les tavernes à poser des questions, mais les humains sont idiots et ignorants. Je pense maintenant que seule le peuple Fae connaît la réponse. Alors, je me dis que le Soir de la Saint-Patrick est la meilleure opportunité que j'aie. Je me rends à la Taverne du Bout du Monde, où je sais en trouver en masse. Je me fais passer pour une serveuse pour épier les conversations. Et là, je décroche le gros lot. J'entends un homme et un Fae rabougri parler de l'Île Inaccessible. Je leur sers une tournée, je leur dis que je recherche l'Île comme eux, et je me joins à la conversation.

Aubouin nous dit que la Nuit de la Saint-Patrick est le moment ou jamais pour trouver la carte des brumes : il nous donne trois pistes, qui seront caduques dès le lendemain : aller voir le Vaisseau des Druides, en partance pour des îles païennes, ou aller voir le Vaisseau de la Morrigane, une tristement célèbre chasseuse de Faes, ou aller voir un Leprechaun qui a installé un bar éphémère au sommet du Mur et vend un alcool terrible, qui, s'il ne ne vous enlève pas la raison, vous donne toutes les réponses.
La fête bat son plein. Des personnes éméchées font tourner le gouvernail alors que les couples de danseurs investissent la table centrale.
S'approchent de nous trois personnes vêtues de noir et encapuchonnées : deux larrons, avec à leur tête une femme avec le haut du visage peint en rouge. Ils sortent leurs épées : visiblement ils veulent nous tuer tous les trois !

Ewen de Kernan

+ Je ne suis pas un soldat des seigneurs féodaux, mais les longues heures passées dans les tavernes m'ont appris à me battre salement, à coups de tabourets et de croc-en-jambes.

Avec Gwena et Aubouin, nous montons sur la table centrale pour nous mêler aux danseurs. Mais Visage Rouge et ses trois hommes nous y rejoignent. Toutes épées dehors, ils ne prennent même pas la peine de cacher leurs intentions et bousculent ou blessent tous ceux qui se dressent sur leurs passages.
Moi, je me bats comme le fauve enivré que je suis, et j'éclate un tabouret sur le crâne d'un des larrons.

+ J'ai vu une incantation mystique gravée dans la peau d'un cultiste. (Pouvoir)

Alors que je me battais contre un des larrons, je lui arraché sa veste, et j'ai vu sur son dos le tatouage d'une formule magique en ancien celte, que j'ai aussitôt mémorisée. J'ignore ce qu'elle signifie, mais je suppose qu'elle recèle un terrible pouvoir.

Gwena

+ Je suis très alerte et réagis rapidement, mais ma stratégie est défensive, je sauverai ma peau avant celle des autres.

Quand alors la Secte de la Carte nous donne l'assaut. Je monte sur la table et me joins aux danseurs, passant de cavalier en cavalier, comptant sur la rotation de la table pour désorienter Visage Rouge, la plus tenace. Aubouin tente de me suivre, mais il est si laid que chaque cavalier le repousse, il avance plus en se faisant bousculer que de son propre chef. Obnubilée par ma propre survie, je ne parviens pas à le protéger, et il se fait poignarder sous mes yeux avant que je prenne la fuite avec Ewen.

Ewen de Kernan

+ Il ne me reste plus de souvenirs de mon père, seul l'argent issu de la vente de ses biens.

Avec Gwena, nous allons au port et tentons d'appareiller sur le vaisseau des druides. Mais ce dernier est littéralement pris d'assaut par les personnes qui veulent quitter Belfast pour les îles païennes, notamment les Faes aministiés d'un soir. Un druide à la barbe blanche (rien ne nous dit qu'il est si vieux qu'il n'y paraît, la magie use prématurément les druides) fait le tri sur le pont. Après une queue interminable, nous arrivons en face de lui, je sors une bourse pleine d'or, tout ce qui me reste de l'héritage de mon père.

Gwena

+ Je compense la maigreur de ma bourse, remplie par la vente de poissons, par la beauté et la jeunesse de mes traits.

Quand nous voulons monter sur le vaisseau des druides avec Ewen, il nous faut trouver une monnaie d'échange pour être acceptés en tant que passagers, puisque l'équipage est déjà au complet.
Mais le Druide n'a plus que deux places, et les Faes éplorés viennent d'aporter un gisant sur lequel ils ont déposé le corps d'Aubouin. Dans la mort, Aubouin a retrouvé sa beauté légendaire, et tout le monde l'a enfin reconnu : il s'agissait d'Obéron, le Roi des Faes, qui avait perdu sa beauté, corrompu par l'atmosphère industrieuse de Belfast. Les Faes veulent qu'il appareille, pour que les Druides l'emportent vers les îles païennes et lui rendent les hommages funéraires dûs à son rang. Le Druide n'a plus que deux places : il a le choix entre Gwena et moi, ou le gisant d'Obéron. Je me sais belle et jeune, d'aucuns disent à couper le souffle, j'espère que le chef des druides y sera sensible. Mais il me regarde et dit d'un air désolé : "J'aurais vraiment aimé naviguer en votre compagnie, mais je ne peux refuser au Peuple Fae d'emporter la dépouille de leur Roi, malgré tous les ennuis que cela pourrait me rapporter."

Ewen de Kernan

+ Beaucoup des Faes de Belfast ne me portent pas dans leur cœur.

En redescendant sur le quai, je vois les Faes, minuscules fées aux ailes de dentelle, leprechauns noircis par la fumée, ogres fourbus, qui me regardent. Ils savent que je n'ai pas protégé Obéron durant le combat de taverne, et que j'ai fui.

Gwena

+ Mon moral est miné en prenant conscience d'à quel point mon visage est marqué par les nuits d'insomnie et m'enlaidit.

Pour moi, le refus du druide n'est pas lié au choix qu'il devait faire entre nous et Obéron. Je réalise que mon visage est prématurément fané. Ma quête de l'île Inaccessible me consume à petit feu. Je commence à perdre espoir.
Une femme nous offre une porte de sortie : elle se présente à nous, vêtue d'une capeline de noir. Son visage, très pâle, est d'une grande beauté. Ses dents sont taillées en pointe comme celles d'un piranha, ses cheveux sont d'un noir de corbeau et ses yeux sont verts et fendus comme ceux d'un serpent. C'est Morrigane, la chasseuse de Faes. Elle dit savoir que nous cherchons la carte des brumes, elle prétend être la seule à pouvoir rattrapper le vaisseau des druides avec son propre vaisseau, et elle dit avoir besoin de nous, à cause de notre volonté de trouver la carte des brumes, pas à cause de nos éventuelles compétences de marins. La mort dans l'âme, nous nous résignons à rejoindre son équipage. Alors je m'enhardis dans ma quête, il ne me reste plus que ça finalement.

Ewen de Kernan

(barré) Beaucoup des Faes de Belfast ne me portent pas dans leur cœur.
Au moins, Belfast sera derrière nous, et avec lui les Faes qui voulaient se venger de moi.

Le vaisseau de la Morriganne, perdu dans les brumes crasseuses du port, a une sinistre coque goudronnée, et des voiles en écailles de serpent. A bord, nous rencontrons un insolite équipage de gueules cassées et de brigands de grand chemin. Parmi eux, il y a Medb, une Fae à taille humaine. Ses ailes sont déchirées, ses poignets portent encore les anneaux de chaînes, son corps tatoué est meurtri par la torture. Elle a sans doute appareillé pour fuir Belfast. Il y a aussi un vieil homme, qui cherche aussi l'Île Inaccessible. Il nous explique que sur l'Île Inaccessible, chacun trouve exactement ce qu'il y recherche. C'est pour cela que j'y retrouverai mon père, c'est pour cela qu'il recherche l'Île, espérant y retrouver sa femme morte il y a cinquante ans. Il a quelques doute sur le fonctionnement exact de l'Île. Il pense que seul le premier à y accoster verra son vœu exaucé. Par conséquent, s'ils peuvent coopérer un temps, ils seront au final en compétition.
Nous croisons aussi... les trois personnes qui ont voulu nous tuer à la Taverne du Bout du Monde ! Le vieil homme nous explique qu'elles sont membres de la Secte de la Carte, une société qui veut empêcher quiconque d'atteindre l'Île Inaccessible, pensant que celui qui le fera demandera forcément le pouvoir suprême, ce qui bouleverserait l'équilibre du monde et provoquerait sûrement la fin de ce monde. Par voie de conséquence, ils veulent aussi détruire la carte des brumes puisque c'est le seul moyen d'accès vers l'Île Inaccessible. Or, la carte des brumes n'est rien d'autre que le cerveau d'Obéron ! Nous arrivons à transiger avec ces trois-là : nous savons que le vaisseau fait cap vers l'Île des Morts, où les druides se rendent également pour célébrer l'hommage funéraire d'Obéron. La Secte de la Carte veut autant s'y rendre que nous, puisqu'ils veulent détruire le cerveau d'Obéron. Or, la Morrigane a besoin de nos volontés à tous pour atteindre l'Île des Morts : nous sommes donc tous obligés de collaborer jusqu'à être arrivés. La Secte de la Carte conclut donc une trêve avec nous le temps de la traversée.

Le vieil homme m'explique enfin que la Morrigane convoite le corps d'Obéron, qui est à lui seul un puissant artefact, mais qu'elle convoite surtout le cerveau d'Obéron, alias la carte des brumes. En effet, Morriganne est une des dernières Déesses survivantes (Obéron était un Dieu). Elle veut la carte des brumes pour atteindre l'Île Inaccessible et demander le pouvoir suprême, alors elle sera la dernière Déesse et hommes et Faes vivront sous sa domination.

La Morriganne nous réunit dans sa cabine, où se trouve un gouvernail des brumes. C'est un gouvernail posé à l'horizontal. En son centre, une carte de l'archipel, sous verre, envahie par un brouillard artificiel. Il nous faut tous empoigner une barre du gouvernail et penser à la destination, alors le vaisseau atteindra l'Île des Morts à temps. Nous envisageons un temps de conseiller plutôt un abordage sur le vaisseau des druides à travers la brume, mais nous renonçons à cette option, trop risquée.

Gwena

+ J'acquiers une connaissance très pointue du fonctionnement de la "brume" (Pouvoir)

Alors que nous utilisons le gouvernail des brumes et que celui-ci utilise notre volonté pour atteindre l'Île des Morts, j'accède en retour au savoir contenu dans le gouvernail. Je comprends vraiment ce qu'est la brume : une trame d'égrégore, un objet de nos fantasmes, je comprends à quel point elle réagit à la volonté humaine, et qu'elle peut emmener une personne exactement où elle le désire, si cette personne atteint un haut degré de maîtrise de l'égrégore. Alors que j'acquiers ce pouvoir, je réalise aussi que la Morrigane vise également une maîtrise parangonique des brumes, que c'est la forme de pouvoir suprême qu'elle recherche sur l'Île Inaccessible, et que cela lui permettrait de faire d'énormes ravages, comme par exemple rayer l'île de Belfast de la carte.

Le voyage à travers les brumes est plein de tensions, nous craignons à chaque instant que la Secte de la Carte rompe la trêve et nous poignarde, nous luttons aussi contre la tentation de penser à autre chose que l'Île des Morts, mais finalement nous tenons bon.

La brume s'écarte un temps devant la proue du navire, révélant l'Île des Morts, île blanche couverte de résineux noirs, surmontée de corbeaux croassants. L'accès principal est une baie surmontée d'un grande arche de pierre blanche, on y aperçoit des barques noirs et le vaisseau des druides. Le vaisseau de la Morrigane accoste de l'autre côté, discrètement. La Secte de la Carte renonce à nous attaquer, au lieu de ça, ils endossent des tenues de camouflage et partent sur une barque : lors de la traversée, j'ai utilisé le pouvoir du gouvernail des brumes pour deviner leur plan. La processions funèbre va partir de la baie, monter au sommet de l'île, puis redescendre de l'autre côté, et déposer le gisant d'Obéron dans une barque, qu'on laissera partir à la dérive. C'est alors que la Secte de la Carte interviendra et détruira le crâne d'Obéron, à l'abri des regards.
Avec Medb et le vieil homme, nous désertons discrètement le vaisseau et rejoignons le vaisseau des druides : nous les mettons au courant des projets de la secte de la Carte et de la Morrigane. Les Druides nous expliquent qu'une fois le gisant d'Obéron mis à l'eau, il partira dans une autre dimension, à travers la brume. Le plan de la Secte de la Carte est donc voué à l'échec : ils ne pourront jamais aborder la barque d'Obéron, car ils ne seront tout simplement pas dans le même monde. En revanche, les Druides pensent que la Morrigane va attaquer pendant le cortège funèbre, et c'est ce qu'ils craignent par dessus tout : la Morrigane est une Déesse, et la plus terrible d'entre elles. Il faudra tenir jusqu'à la côte opposée, en respectant le rythme de marche funéraire, sans quoi le rituel de la renaissance d'Obéron n'aura pas fonctionné. Medb se joint au cortège funéraire. Elle révèle qu'elle est la dernière Déesse, avec la Morrigane, et qu'elle s'oppose à ses plans de domination.
Avec le vieil homme, nous échafaudons le plan suivant : nous nous joignons au cortège funéraire, pour participer à la défense du corps d'Obéron contre les assauts de la Morrigane. Et quand le cortège jettera la barque d'Obéron à la mer, nous sauterons dans la barque avant qu'elle disparaisse dans les brumes. Alors nous pourrons trouver la carte des brumes. Bien sûr, cela laisse en suspens la question de la compétition pour atteindre l'Île Inaccessible en premier. On verra au dernier moment.

Le cortège funéraire monte la colline, sur un pas désespérément lent et solennel. Les druides vêtus de blanc portent le gisant d'Obéron, recouvert d'un linceul blanc, de fleurs et de cadavres de minuscules Faes mortes au même moment d'Obéron, dans l'arc d'égrégore de son agonie. Un ogre au pelage brun, armé d'une masse, ouvre la marche, et Medb, armée d'un couteau gravé de motifs celtes, ferme la marche
Tous nous portons des couronnes de gui, et nous montons la colline alors que la brume s'épaissit de plus en plus, bientôt nous n'avons plus aucune visibilité. Pourtant nous atteignons le sommet de la colline. Un gigantesque dolmen y est érigé, nous le franchissons comme un passage vers l'autre monde. Obéron ouvre alors les yeux !

Une fois que nous sommes passés sur l'autre versant, une silhouette géante apparaît devant nous ! Morrigane dans sa forme de Déesse. Elle mesure quatre mètres de haut, ces cheveux sont des serpents noirs, elle a de gigantesques ailes de corbeau. Elle tient une masse de métal noir terminée d'un maillet effilé d'une corne : l'arme idéale pour ouvrir le crâne d'Obéron, et pour massacrer tous ceux qui se dresseraient sur son passage.

Le cortège poursuit son avancée à pas solennel, tous font remparts de leurs corps pour protéger Obéron. L'ogre se rue vers la Morrigane avec son gourdin en hurlant. La Morrigane le crève en deux d'un seul coup de masse !

Ewen de Kernan

Le combat qui suit est d'une grande violence et d'une grande confusion. J'utilise les terribles mots de pouvoir appris sur la carte tatouée dans le dos des larrons, pour échapper plusieurs fois au coups de la Morrigane. J'apprends aussi durant le cortège un peu des secrets de la brume, je deviens vif comme elle, presque intangible. Mais beaucoup de druides et de Faes du cortège n'auront pas cette chance et tomberont sous les coups de la Déesse. Au final, Medb affronte la Morrigane en combat singulier, et tombe à son tour. Morrigane est maintenant, de fait, la dernière Déesse au monde.

Gwena

+ Inflexible dans ma volonté de protéger Obéron, je n'ai pas hésité à m'interposer jusqu'au bout malgré les druides qui tombaient au combat.

Quand est venu l'heure de protéger le cortège funèbre de la Morriganne, alors que je me pensais lâche et égoïste, je n'ai pas hésité à prendre part au combat. J'ai découvert que sous la pression du danger, ma maîtrise de la brume avait atteint un point culminant : je pouvais me téléporter dans la brume ! C'est en changeant de position à chaque seconde que j'ai distrait la Morriganne suffisamment pour que le cortège amène Obéron jusqu'à la jetée.

Ewen de Kernan

+ Je peux devenir la Brume, intangible et vif, au risque de me disperser d'une bourrasque.

Morriganne a tué la plupart des membres du cortège, mais elle n'a pas atteint son but. Les derniers druides poussent le gisant d'Obéron sur la barque. Avec Gwena, nous poussons la barque et nous apprêtons à sauter dedans.
Mais derrière nous, le vieil homme grimace : "J'ai passé cinquante ans à préparer ce moment, ne croyez pas que vous allez me doubler !". Il sort de sa manche deux disques d'argent : ce sont les boucles d'oreilles de sa défunte femme, tout ce qui lui reste d'elle. Il a passé cinquante ans à les aiguiser, leur bord est coupant comme du diamant, et elles sont gorgées d'égrégore. Il lance les deux boucles comme des shurikens, une vers moi, une vers Gwena. Vif comme la brume, je me jette sur le côté, tellement vif que je manque de perdre ma cohésion interne et de me disperser, puis je m'arque à nouveau et saute dans la barque.

(barré) Il ne me reste plus de souvenirs de mon père, seul l'argent issu de la vente de ses biens.

Le shuriken qui m'était destiné ne me touche pas un cheveu, mais il tranche les cordons de ma bourse, qui tombe sur la jetée dans un tintement de pièces : je laisserai donc derrière moi tout ce qu'il me restait de mon père.

Gwena

Le vieux nous jette deux shurikens parfaitement mortels mais ma volonté de gagner l'Île est plus forte que lui : à nouveau je me téléporte dans la brume, j'échappe au projectile, et je me retrouve dans la barque d'Obéron avec Ewen.

Le vieux hurle sa détresse : il ne nous a pas touchés, et nous avons sauté dans la barque avant lui. Il a perdu.

Ewen de Kernan

Aussitôt que la barque glisse sur l'eau, les brumes nous enferment. Nous apercevons un instant la silhouette de la barque de la Secte de la Carte, qui se dissipe aussitôt. Nous comprenons que nous sommes passés dans un autre monde. Obéron ouvre la bouche et avale une grande goulée d'air, comme s'il revenait à la surface après une longue apnée. Il est revenu à la vie ! Je sens qu'il attend que nous lui posions des questions. Mais je n'ose rien dire.

Gwena

Alors qu'Ewen se redresse, ressuscité, il est temps de l'interroger. Il en sait beaucoup plus qu'il n'en a bien voulu dire à Belfast : c'était là facéties de Fae et faiblesse de la corruption. Ewen n'ose rien dire, alors je me lance : "Comment atteint-on l'Île Inaccessible ?".

Obéron nous regarde.

Et sourit.


Playlist :

Bande originale du film Braveheart (musique classique aux accents celtiques)
Tempradura : A la rue (musique pan-celtique festive)
Ulver : Kveldssanger (dark folk)


Feuilles de personnage :

Ewen de Kernan

+ Je veux retrouver mon père, disparu il y a quelques années dans la Brume.
+ Je souhaite mettre la main sur une Carte des Brumes écrite par les druides.
+ Je ne suis pas un soldat des seigneurs féodaux, mais les longues heures passées dans les tavernes m'ont appris à me battre salement, à coups de tabourets et de croc-en-jambes.
+ J'ai vu une incantation mystique gravée dans la peau d'un cultiste. (Pouvoir)
+ (barré) Il ne me reste plus de souvenirs de mon père, seul l'argent issu de la vente de ses biens.
+(barré) Beaucoup des Faes de Belfast ne me portent pas dans leur cœur.
+ Je peux devenir la Brume, intangible et vif, au risque de me disperser d'une bourrasque.

Gwena
+ Je veux retrouver cette île inaccessible qui hante mes songes.
+ Mes passages successifs dans les tavernes m'ont convaincue que ce n'était pas dans la mémoire des hommes que je trouverai mes réponses.
+ Je suis très alerte et réagis rapidement, mais ma stratégie est défensive, je sauverai ma peau avant celle des autres.
+ Je compense la maigreur de ma bourse, remplie par la vente de poissons, par la beauté et la jeunesse de mes traits.
+ Mon moral est miné en prenant conscience d'à quel point mon visage est marqué par les nuits d'insomnie et m'enlaidit.
+ J'acquiers une connaissance très pointue du fonctionnement de la "brume" (Pouvoir)
+ Inflexible dans ma volonté de protéger Obéron, je n'ai pas hésité à m'interposer jusqu'au bout malgré les druides qui tombaient au combat.


Règles utilisées :

Carte Blanche sans instance, jeu avec phrases, dés (d12), tableau des symboles, pouvoir.

Le joueur d'Ewen est un des joueurs de la campagne Les Épines de la Rose qui a inspiré Inflorenza (et notamment le théâtre Tre Città per Morire). C'est aussi la première personne qui m'ait parlé de narration partagée (il était MJ à Boule de Neige) alors même qu'à l'époque je trouvais l'idée saugrenue. Je lui avais beaucoup vanté Inflorenza, et il l'avait lu par ailleurs. Alors, quand nous avons eu l'occasion de rejouer à nouveau, je ne pouvais pas faire l'impasse de refaire une partie sous Inflorenza classique, c'est-à-dire les règles de la première édition, avec 12d12, le tableau des inflorescences, les pouvoirs... J'ai proposé Carte Blanche ou Carte Rouge, mais comme la joueuse de Gwena avait peu d'expérience en jeu de rôle, elle a préféré que nous jouions en Carte Blanche. Néanmoins, le joueur d'Ewen, qui voulait participer largement à la narration, a pu le faire sans problème, dans la mesure où l'écriture des phrases en offre une belle opportunité, et dans la mesure où en Carte Blanche, un joueur peut dire ce qu'il veut sur le décor et les figurants, tant que le Confident ne le contredit pas.
Nous avons créé les personnages (une phrase) avant de commencer à jouer.
Je me suis permis une innovation par rapport aux règles de la première édition : nous avons fait une minute de silence entre la création de personnage et la partie.


Retour des joueurs :

Joueuse de Gwena :
+ Au départ, l'aspect très narratif du jeu me faisait peur car je suis timide, mais finalement c'était facile.
+ L'univers était plus facile d'accès que celui de la Légende des 5 Anneaux [Note de Thomas : à mon avis, c'est dû au fait que l'univers d'Inflorenza est émergent et incohérent (on peut se permettre toutes sortes de fantaisies et d'anachronismes), alors que l'univers de L5A est fixé et codifié.]

Joueur d'Ewen :
+ Le tableau des symboles était très important pour moi, car ces contraintes créatives m'ont forcé à sortir de ma zone de confort.
+ J'avais l'occasion de satisfaire ma passion pour le jeu masochiste, mais je ne l'ai pas exploitée à fond (j'aurais pu barrer des phrases plus cruciales). [note de Thomas : les joueurs ont eu aussi pas mal de chance aux dés, ont évité certains sacrifices en prenant des pouvoirs, et comme nous jouions sans instance, j'ai été généraux avec le don de phrases sans conflit : à deux reprises, je leur ai demandé d'écrire une nouvelle phrase juste avant de lancer un conflit. Par exemple : avant le combat contre la Secte de la Carte, je leur ai demandé d'écrire une phrase sur leur style de combat.]
+ J'étais plus en terrain connu que la joueuse de Gwena [Note de Thomas : ce joueur a une bonne expérience de rôliste, et a beaucoup joué à Millevaux avec moi.] J'ai beaucoup apprécié l'expérience de jeu, je n'ai pas été déçu par rappport à ce que j'attendais d'Inflorenza.
+ J'ai beaucoup aimé créer des choses dans la fiction (comme la mort d'Obéron, que j'ai décrite à l'occasion d'un conflit perdu.) et que le Confident leur confère un impact large par la suite. [puisqu'en effet j'ai largement exploité la mort d'Obéron.]
+ La partie était trop épique, je m'étais préparé à des situations dont l'enjeu ne concernait que mon propre personnage, mais là, il était largement dépassé. [note de Thomas : je n'avais pas cerné l'attente des joueurs de jouer intimiste, et je n'ai pas mobilisé certains outils existant dans la base (il existe un handicap sur les tonalités de jeu). J'ai bien demandé les attentes des joueurs au début du jeu, mais la question du genre narratif n'a pas été abordée. Or, en Carte Blanche, le Confident a largement la main sur le genre narratif, et bien que les joueurs aient en effet joué des personnages plutôt street level, j'ai succombé aux sirènes du jeu épique, et monté les enjeux de plus en plus au cours de la partie, jusqu'à mettre le sort de toute l'Irlande entre les mains des personnages. A l'avenir, si je voulais éviter ce genre d'écueil, j'emploierai des gestes du pouce (pouce vers le haut : plus de ça, pouce vers le bas : moins de ça), la grille de genre narratif présente dans le livre de base.]


Retour personnel :

+ L'Irlande (avec l'Islande) est un pays dont l'identité m'échappe, à tel point que j'ai été jusqu'à présent incapable d'en rédiger une description pour l'Irlande, préférant éluder l'existence du pays. Le théâtre de Kantelder me donnait quelques billes, mais si peu. Il m'a néanmoins forcé à faire quelques recherches sur Wikipedia, notamment sur Obéron, et de fil en aiguille sur Morrigane. Et en jeu, la magie a opéré. Pour squelettique qu'il était, le théâtre de Kantelder nous a amplement suffi pour créer une séance mémorable. Il est vrai qu'on a déjà fait avec dix fois moins, comme lors des parties La forêt qui poussait sous la mer, L'inconnu ou Tes paroles ne m'atteignent pas. Je suppose que les irlandophiles et les celtophiles ne manqueront de relever un tas d'âneries, mais dans le cadre de Millevaux (où je me permets par ailleurs un tas d'invraisemblances), je trouve que ça passait bien, et ça m'a donné des billes pour le jour où je m'attelerai enfin à cette description de l'Irlande pour l'Atlas.

+ La séance a été l'occasion de quelques combats hauts en couleur. A Inflorenza, je joue le combat comme un film, mais je réalise qu'Inflorenza classique n'est pas forcément le meilleur outil pour cela. Déjà, j'ai laissé les joueurs utiliser toutes leurs phrases d'un coup (par exemple, le joueur d'Ewen jouait trois phrases d'un coup, puis la joueuse de Gwena utilisait trois phrases d'un coup) alors que l'alternance entre joueur impulse plus de rythme au combat, plus la sensation d'une progression chronologique. L'autre chose que je ferais différemment, c'est que j'intercalerais une action ou un inventaire du Confident entre chaque utilisation de phrase, pour illustrer une vraie passe d'armes entre les personnages et les figurants. L'autre inconvénient est qu'on jouait avec des phrases : et les joueurs ont plus tendance à écrire des motivations (surtout ces joueurs-là, qui voulaient finalement jouer intimiste et non épique) que des techniques de combat, et ça se ressent quand ils utilisent leurs phrases : ils rappellent les motivations de leurs personnages plutôt que de décrire leurs passes d'armes : on se retrouve presque avec du combat shonen, très dialogué, qu'avec du combat cape et d'épée, très chorégraphié.

A tout prendre, la meilleure version pour du jeu épique avec des combats détaillés et vivants, reste le jeu avec dé mais sans phrases (il faut décrire une action ou un inventaire à chaque dé, et le Confident peut intercaler des interventions entre chaque pose de dés). Voir pour cela le compte-rendu Mortal Karthage, exemplaire de ce point de vue là (on y jouait avec du 6 en banque : il faut bien penser à décrire des pertes ou des blessures à chaque sacrifice de dé, parce qu'il n'y a ni puissance ni souffrance).
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