[Inflorenza Minima] Aux grands maux les grands remèdes

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[Inflorenza Minima] Aux grands maux les grands remèdes

Message par Thomas Munier » 17 Mai 2016, 08:55

AUX GRANDS MAUX LES GRANDS REMÈDES

Émotion au rendez-vous pour ce nouveau tutoriel d'Inflorenza minima, cette fois-ci enregistré, avec Valentin en meneur !

Jeu : Inflorenza minima, le jeu de rôle des contes cruels dans les forêts de Millevaux

Partie enregistrée sur ma chaîne Youtube

Joué le 20/04/2016 sur google hangout
Personnages : Brute, Darren

Image
Crédits : devastar, fouquier, georgie sharp, Shawn Clawson, licence cc-by-nc, galerie sur flickr.com


Théâtre :

Aucune préparation préalable, tout est parti de la création de personnage et de leurs objectifs.


Feuilles de personnages :

Darren
Objectif : guérir de sa maladie de fourrure et d'écailles
Symboles : Volonté, Science

Brute
Objectif : amener Darren à accepter son nouvel état
Symboles : Acceptation, Animaux


L'histoire :

Darren a contracté une maladie en s'aventurant dans la forêt. Sa jambe a commencé à se couvrir de fourrures et d'écailles. Darren est un homme de science, il refuse de devenir un monstre et d'être rejeté. Il veut trouver un remède avant que la maladie ne couvre tout son corps.

Il s'en est ouvert à Brute. Brute est un homme massif, une barbe noire, des sourcils noirs, des mains énormes, d'où son nom. Mais en réalité, il est tout en douceur. Il passe son temps à ramasser les animaux éclopés et à les soigner de son mieux. Brute s'en est rapproché pour apprendre l'anatomie et comprendre son mal. Il a fini par s'ouvrir à lui de sa maladie.

Brute lui propose qu'ils refassent ensemble le chemin qu'il avait pris, pour comprendre ce qui a pu le mordre ou le piquer au passage. Connaissant l'origine de la maladie, ils devraient comprendre comment la soigner. Mais Darren a peur de retourner en forêt, il préfère rester en sécurité au village.

Brute est loin de désirer la guérison de Darren, au contraire il voudrait qu'il accepte sa nouvelle nature, car Brute voit les hommes, les bêtes et les monstres comme des personnes qu'il faut aimer de la même façon. En fait, il a le projet de perdre Brute en forêt pour qu'il ne retrouve pas l'origine de son mal et abandonne l'idée de chercher un remède.

Il insiste encore et Darren se laisse convaincre de refaire le chemin. Il faut partir de suite car dans un jour ou deux de violentes tempêtes vont éclater, avec leur lot d'inondations et de boues qui rendront la forêt dangereuse et effaceront le chemin. Mais Brute a deux animaux en convalescence qui nécessitent des soins constants : une renarde et un chat sauvage qui tous deux se sont pris une patte dans un piège de chasseur. La renarde est intransportable. Sans ses soins, elle ne passera pas la nuit. La mort dans l'âme, Brute la fixe dans ses grands yeux et lui fait ses adieux. Il charge le chat sauvage dans un panier qu'il fixe sur le dos de Darren ; Darren s'est engagé à le soigner en échange de l'aide de Brute.

Brute entraîne Darren au hasard dans la forêt. Darren commence à se douter de quelque chose. Brute propose qu'on bivouaque le temps de reprendre ses esprits. Il s'entête à le perdre, et Darren s'entête à retrouver le vrai chemin. Ils finissent par le retrouver mais cela prend du temps. Le ciel se couvre de nuages noirs, le retour au village ne se fera pas sans encombre.

Darren reconnaît enfin le chemin où il s'est promené le jour avant de se découvrir la maladie. Ils rencontrent un enfant qui a la même maladie, mais à un stade beaucoup plus avancé. Tout son corps est couvert de fourrures et d'écailles, et il a une tête de chien ! Darren est révulsé. Il est plus que jamais déterminé à s'éviter un tel sort. L'enfant et Brute lui demandent pourquoi il a si peur de devenir un homme-bête. Darren dit que sa femme l'a rejeté quand elle a découvert sa maladie. Il craint aussi le rejet du reste de la société.

L'enfant est capable de leur parler, il est disposé à leur donner des indices. Il les conduit dans une grotte où vit un vieillard qui a le même aspect bestial. Il vit entouré de livres. Il explique à Darren que c'est la connaissance qui a fait de lui ce qu'il est.

Darren se rappelle ce fameux jour où il se promenait dans la forêt. Il étudiait un livre, comme il faisait tous les jours. C'était un livre spécial, un livre sur la pharmacopée qui expliquait comment guérir les animaux de tous les maux. Brute l'accompagnait et il a insisté pour qu'il lise le livre, même si le livre risquait de le corrompre. Ensuite, pour tester l'efficacité de ses nouvelles connaissances, il lui a apporté un petit chaton sauvage qui ne se remettait pas d'une grippe, qui perdait ses poils. Darren a échoué à le guérir cette fois-là, le chat est resté malade. C'est le chat sauvage qui est dans le panier sur son dos aujourd'hui.

Le vieillard fabrique une décoction. Il dit que c'est le remède contre la maladie. Mais si Darren en boit, il perdra tous ses souvenirs, le souvenir de sa femme, tous ses savoirs. Il a jusqu'à demain matin pour se décider. Après, la maladie aura trop progressé, la potion pourra toujours le faire redevenir humain mais sera toxique pour lui, il lui restera moins d'un an à vivre.

Arrivent dans la caverne une femme, un enfant et une vieillarde. Ils ont l'air insouciants et heureux. Ils racontent les petits détails de leur journée, la vieillarde dit comment elle a ramassé telle baie. Mais ils n'ont aucun autre souvenir. Ils ont bu la potion pour redevenir humains et dès lors, ils ne se rappellent que de leurs dernières heures. Le vieillard et l'enfant-bête ont l'air maussades : impossibles d'avoir une vraie conversation avec ces miraculés incapables de se projeter dans le passé comme dans le futur.

Brute sait que le temps est compté. Il demande à Darren de soigner le chat sauvage tant qu'il en est encore capable. Darren lui avoue alors pourquoi il a échoué de le guérir la première fois. Il a simplement refusé d'en payer le prix. Ce chat a la maladie des os de verre, et la seule façon de l'en guérir, c'est de transférer à la maladie a un autre. Brute dit alors que le chat a trop souffert. Il demande à Darren de lui transférer la maladie. Darren essaye de le convaincre : il sera très difficile à Brute de continuer à soigner d'autres animaux s'il est cloué au même endroit, incapable de se déplacer ! Brute que le sacrifice d'une personne lui coûte encore plus que le sacrifice d'un ensemble. Alors Darren fabrique de quoi faire un échange sanguin avec les matériaux de fortune trouvés chez le vieillard, et il transfuse à Brute la maladie du chat. Brute sombre dans l'inconscience. Darren passe la nuit dans les cauchemars et la sueur.

Il se rappelle le soir où sa femme a découvert sa maladie. Il avait fait ce qu'il avait pu pour la cacher, il bandait sa jambe. Il trouvait sa femme si belle, il avait consacré tant d'efforts, de temps et de cadeau à la séduire, lui qui se trouvait laid. Et quand il lui a enfin montré sa jambe, à sa femme enceinte de lui, elle lui a dit de quitter leur foyer ! Elle ressentait peur et dégoût.

Il se rappelle le jour où il a confié le secret de sa maladie à Brute. Brute lui a demandé si l'enfant avait été conçu avant ou après cette promenade en forêt. C'était après. Mais heureusement, l'enfant est sauf. Avant de quitter sa maison, Darren a demandé aux meilleurs médecins de la communauté de prendre soin de sa femme et de l'enfant à naître, car lui n'aurait plus le droit de les approcher.

Au petit matin, Darren est à l'entrée de la caverne, le bol de potion entre ses doigts. La fourrure et les écailles couvrent déjà tout son buste. Brute est allongé à côté de lui, il a mal partout, il regrette un instant son geste. Il veut rendre sa liberté au chat sauvage qui se porte maintenant comme un charme, mais le chat insiste pour rester à leurs côtés. Brute essaye un temps de convaincre Darren de boire la potion : il deviendrait insouciant, mais il pourrait lui apporter des animaux malades chaque jour. Puis il se rétracte. Il avoue à Darren les motivations qui l'ont poussé et lui dit de suivre son cœur.

Darren met le contenu du bol dans une gourde. Il ne boira pas cette fois. Peut-être un autre jour, mais alors la potion lui rendra son apparence humaine mais tuera sa mémoire et le tuera ensuite à petit feu. En attendant, Darren veut vivre son humanité, quelle que soit son apparence.

Brute lui demande s'il veut revoir son enfant une dernière fois avant de se cacher définitivement dans la forêt. Darren le veut. Alors Brute empoigne des béquilles. Ils vont retourner ensemble vers le village, mais Darren restera caché à l'orée de la forêt. Brute fera venir la femme et l'enfant de Darren au bord de l'orée pour leur raconter l'histoire de Darren, et ainsi Darren pourra les voir en cachette.

Il y a un risque qu'alors sa femme le repère quand même et qu'elle ait une mauvaise réaction. Brute refuse que Darren connaisse encore une infortune supplémentaire. Il décide de prendre l'infortune sur lui. Sur le chemin du retour, à cause des torrents et de la boue, Brute se casse une jambe. Quand il arrive au village, on le soigne et on lui confie un fauteuil roulant, mais Brute sait bien qu'il ne remarchera pas. Il fait venir la femme et l'enfant de Darren à l'orée du bois. Mais un homme les accompagne. La femme dit qu'il s'agit du père de l'enfant. Brute dit : "Je suis sans haine pour vous, monsieur, mais je sais que Darren est le vrai père. Je comprends les raisons qui vous poussent à dire que vous êtes le père, et je ne ferai rien pour détromper les gens. Mais vous devez tous savoir qui était Darren en vérité.". Et il raconte toute l'histoire, il ment juste en disant que Darren s'est enfui dans la forêt et qu'il est impossible de le retrouver.

Brute jette un minuscule coup d'oeil vers Darren caché dans les fourrés. Il lui promet en silence de parler souvent à cet enfant de son vrai père.

Et Darren part sans se retourner.


Commentaires :

Durée :
1h3/4

Règles utilisées :
[img=Inflorenza Minima]http://t.co/v4M55rnefu[/img]

Profils des joueurs :
Valentin et le joueur de Darren avaient tous les deux lu les règles et tenté de mener Inflorenza Minima, sans être complètement satisfaits.

Brainstorm initial :
J'ai demandé s'ils avaient des priorités de test. Ils étaient plutôt curieux de découvrir mon tutoriel, mais Valentin a insisté sur le fait que dans ses tests, il lui était plus facile de gérer des personnages en opposition que des personnages en collaboration. Donc avec le joueur de Darren on est parti sur une équipe collaborative, pour tester "en conditions de stress".

Défis :
+ Accompagner Valentin dans la gestion d'une équipe de personnages en collaboration
+ Dérouler les étapes de mon tutoriel pour produire une partie enregistrée qui puisse être utile à d'autres (et pourquoi pas, il est permis de rêver, fournir un outil audio qui se substitue au livre de base).

Mise en jeu :
Comme pour Lourdes, j'ai plusieurs fois demandé à Valentin d'appliquer certains conseils de maîtrises d'Inflorenza minima comme des contraintes, des étapes à franchir : prix à payer, charger son coeur, connaître pour faire mal, donner pour reprendre, D.E.U.S. Ex. Machina. Dans une partie normale, on applique ces conseils au feeling, dans le désordre. Les appliquer dans un ordre précis relevait de la démarche de tutoriel, du conseil le plus important au conseil le plus superflu. En cours de jeu, j'ai réalisé que j'avais omis de mentionner les codes de sécurité, alors pour les tester, quand Darren a déclaré qu'il avait conçu l'enfant après avoir contracté la maladie, on a simulé un bras en croix, qui sert à signaler un malaise à désamorcer. Valentin a pris la balle au bond en disant que l'enfant était tout à fait humain malgré tout.

Debriefing :

Joueur de Darren :

+ Sur le didactique, c'est super intéressant.

+ Quand Valentin a mentionné le fait que la femme de Darren avait refait sa vie, j'ai découvert que la cruauté dépassait largement le cadre des prix à payer. [réponse de Thomas : oui, les prix à payer sont le squelette du jeu, la cruauté c'est le gras, c'est bien que le Confident souligne que l'univers est injuste, tant qu'il reste des choses auxquelles s'accrocher par ailleurs.]

Valentin, le Confident :

+ Il y avait un méta-prix à payer sur toute l'aventure, qui était de savoir si Darren prendrait le remède ou non.

+ Cela m'était difficile de me positionner, j'ignorais quel contrôle je pouvais prendre ou pas. [Réponse de Thomas : tu as le dernier mot sur les décors et les figurants, mais tu les manipules au service du destin des personnages, c'est vraiment l'objectif des personnages qui conduit l'aventure. Tu peux dire des choses au sujet des personnages, mais les joueurs ont le dernier mot, et je te conseille d'éviter de prendre trop souvent le contrôle de leurs personnages ou des émotions de leurs personnages, notamment dans les moments d'introspection, parce que tu prives les joueurs d'incarner pendant ces scènes d'introspection, alors que c'est une clé pour s'impliquer. Quand tu as dit que Brute tombait inconscient ou que Darren adorait sa femme, c'eut été mieux de laisser les manettes aux joueurs, quitte à aller là où tu veux en posant des questions : "Brute, après une telle opération, est-ce que tu tiens le choc ?" ou en évoquant pour laisser le joueur se créer et vivre sa propre émotion : "Darren, ton épouse, c'est la plus belle femme que tu aies jamais connue. Et la plus intelligente aussi."
Pour aller plus loin : Combativité et absorption, par Frédéric Sintes

+ C'était agréable d'avoir des conseils.

+ Dans le manuel, au conseil "Destin", je lisais qu'il fallait relier les figurants existants aux personnages, mais en jeu quand tu m'as expliqué le conseil, j'ai compris qu'il fallait créer de nouveaux figurants, c'est ainsi que j'ai créé les insouciants. [réponse de Thomas : en fait les deux sont bien. C'est juste que le texte de règle est laconique : "Relier décors, figurants, intrigue à leurs quêtes par coïncidences et correspondances. Donner une quête à chaque figurant.". Un texte de règle est comme un bourgeon. Il contient la fleur en lui, mais il faut que le lecteur sache la faire éclore.

+ C'est un jeu difficile à mener. Il faut prévenir les joueurs de la règle du prix à payer, sinon ils partent en système zéro, ils jouent tactique, essayent d'éviter les prix à payer. [Réponse de Thomas : c'est vrai que je joue souvent sans prévenir, et je gère le jeu tactique en le retournant contre le joueur, mais c'est tout à fait valable de prévenir à l'avance, c'est une excellente chose que peut faire un Confident débutant pour se faciliter la vie, et c'est vrai que le jeu prend beaucoup de saveur avec des joueurs qui acceptent la proposition et même l'accompagnent, comme ici le joueur de Darren et moi l'avons fait.]

+ La cruauté, c'est le conseil le plus important du jeu. Mais Connaître pour faire mal et Donner pour reprendre viennent juste derrière : ils construisent le jeu.

+ La promesse de jouer sans matériel et sans préparation est vraiment tenue. Je peux joueur dans le train, au débotté, par exemple.

+ J'ignore encore quel est le potentiel de ce jeu, sa durée de vie.


Mon retour personnel :

+ Lors de notre échange, il est apparu que le jeu est si riche que vingt pages de livre de base sont insuffisantes à en faire comprendre chaque nuance. Inflorenza minima, c'est ma théorisation du jeu moral, et chaque ligne de texte pourrait donner lieu à une discussion. A l'heure actuelle, je conçois qu'il soit difficile de mener avec le seul livre de base, malgré les exemples. La lecture des comptes-rendus de partie et l'écoute de ce tutoriel (le fichier audio est bien plus instructif que ce compte-rendu de partie) me semblent une excellente façon d'approfondir.


Retour de Valentin, à froid :

+ C'était une expérience assez déstabilisante d'avoir le rôle de meneur sans avoir le rôle d'animateur ni le rôle de garant des règles. Parfois, je ne savais pas très bien quand intervenir par rapport à Thomas.

+ J'avais du mal à savoir comment réguler mes interventions et quelle autorité sur les décors et les personnages je devais adopter par rapport aux autres joueurs. J'ai décidé pour cette partie de me placer dans une structure de jeu de rôle classique par défaut, pour avoir une référence et me faire recadrer par Thomas si besoin (ce qui a été le cas, ce qui est bien).

+ Le fait de devoir appliquer les conseils dans l'ordre était difficile, puisque les éléments du système étaient utilisés sans attendre le moment propice.

+ Inflorenza Minima me semble très efficace comme jeu en ligne (pas de matériel).

+ J'ai beaucoup d'autres retours sur Inflorenza Minima en général par rapport à cette partie en particulier. J'ai beaucoup été confident depuis, j'ai été joueur, j'ai enseigné le jeu plusieurs fois à la façon de cette partie, j'ai eu pas mal de retours de joueurs ayant testé de leur côté, j'ai joué dans un théâtre Warhammer 40.000, un théâtre Lycéennes Japonaises, j'ai produit une grosse variante, j'ai joué dans des situations insolites (train, plusieurs fois au cours d'un discussion, à l’insu même du joueur, etc...)
Mais pour le coup ça va attendre, car ça va me prendre vraiment beaucoup de temps.
Énergie créative. Univers artisanaux.
http://outsider.rolepod.net/
Thomas Munier
 
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