[Les Sels de Millevaux] Le Placard aux Cafards

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[Les Sels de Millevaux] Le Placard aux Cafards

Message par Thomas Munier » 05 Oct 2016, 09:35

LE PLACARD AUX CAFARDS

Les horlas sont-ils des êtres sensibles ? Les monstres humains sont-ils capables de rémission ? Les âmes les plus pures n'ont-elle aucune souillure ?

Jeu : Les Sels de Millevaux par Yoann Calamai, alchimistes dans l'enfer forestier de Millevaux

Suite de la campagne de Prague.
Épisode précédent : Selon Lazare
Joué le 05/04/2016 sur google hangout
Personnages : Matilda, Petr, Anselmo

Partie enregistrée sur ma chaîne youtube

Image
illustration : Balthazar Schwan, domaine public


L'histoire :

Réunion de convent.
Un débat éclate pour savoir s'il faut fuir Prague, avec toutes les complications inhérentes à l'alchimie en nomade, ou rester, au risque de se retrouver à demeure dans la crypte, sous une ville en proie à la guerre, à la peste et aux foudres de Szolt. Le débat s'oriente sur le fait que Prague serait plus respirable sans la menace de Szolt. On émet l'idée de le tuer. Matilda propose plutôt de le transformer. Elle pense pouvoir le convaincre de procéder à l'œuvre au blanc sur le corps même de Szolt. Si ce dernier peut croire que cela lui pavera le chemin vers la suprématie, en réalité il deviendrait doux comme un agneau.

Dans un futur possible.
Anselmo est dans une pièce de la crypte aménagée de façon domestique, quelques meubles, des napperons, des jouets. Il donne le bain à Anabella. Elle est toujours dans son état de nouvelle-née, elle ne sait dire que le son A. Il ne s'est pas encore résolu à lui donner une éducation, car alors elle réaccedéra à sa conscience passée, réalisera sa condition de morte-vivante et voudra mourir. Kelst s'est proposé de lui donner une éducation dépassionnée, mais alors elle serait tout juste bonne à servir de matériau pour l'œuvre au noir d'Isadora, car même en restant pure, elle serait toujours suicidaire. Angelo joue dans un coin. Suspendu à un crochet dans un pilier, maintenu dans ses langes, il y a Asmodée, le fils d'Anselmo et de Sœur Judith. C'est un bébé à la peau noire et translucide, il parle à Anselmo d'une voix aigrelette, avec des mots d'adulte. Anselmo l'accuse d'être contre-nature, Asmodée prétend au contraire incarner la nature. Il lui intime de prendre en considération l'aide qu'il peut lui apporter.

Dans un souvenir.
Matilda, encore enfant, est entrée dans l'atelier de sa mère. Elle revisite ce souvenir où elle découvre l'atelier. Mais cette fois-ci, son attention se porte sur une étagère où se trouvent des étuis en métal contenant des bobines de fils. L'un des étuis porte le prénom de Maître Szolt. Elle l'ouvre et découvre une bobine d'un fil englué d'un fluide noir, dégueulasse, vivant, attiré par la chaleur corporelle de Matilda. Elle referme l'étui, mais sa mère vient d'entrer, elle la sermonne pour son indiscrétion. Matilda lui demande des explications, sa mère lui répond qu'elle voulait que Matilda naisse complètement innocente, alors pour la concevoir, elle s'est assurée que son père soit entièrement purgé de son emprise noire. Elle voulait que Matilda soit pure pour qu'elle puisse accomplir une grande œuvre. L'atelier commence à brûler, la mère hurle à Matilda de fuir tant qu'il est encore temps. Matilda a emporté l'étui, qu'elle a encore sur elle aujourd'hui.

Au présent.
Anselmo envoie le sarcophage de Petra dans le labyrinthe. Avec les explosifs volés par Kinski, ils créent une réaction en chaîne qui vient en alimenter en énergie le générateur resté dans la cathédrale, et Sœur Judith peut alors ressusciter Petra selon les rites lazaréens. La réalité du labyrinthe ne tient pas le choc, des pans entiers de la cathédrale s'écroulent autour d'elles.

Le sarcophage de Petra réapparaît dans le cercle d'incantation. Ils en sortent une Petra à l'état de nouvelle-née, qui elle aussi ne peut plus s'exprimer que par le cri A. Sœur Judith apparaît dans le cercle d'incantation, mais comme un hologramme clignotant : en l'état, elle ne peut quitter le labyrinthe. On voit des gravas tomber à ses côtés.

Pour sortir Sœur Judith du labyrinthe, il faudrait une grande source d'énergie. Kelst s'apprête à jeter dans le creuset les lingots de métaux que Matilda a durement acquis, pour créer une surchauffe qui permettrait à Sœur Judith de s'échapper. Anselmo lui dit de ne rien en faire : Sœur Judith n'est qu'un horla, un monstre, ces métaux sont plus précieux qu'elle. Sœur Judith se défend d'être un monstre, elle prétend être capable d'amour. Matilda et Petr balancent les lingots dans le creuset, sauvant Sœur Judith au détriment du précieux métal.

L'intégration de Kinski au sein du convent ne se fait pas sans heurts. Il reproche sa naïveté à Matilda et sa félonie à Anselmo. Isadora s'emporte et rappelle à tous la nécessité d'être soudés face à l'adversité qui s'annonce.

Petr et Matilda partent en fiacre vers la ruelle d'or. Matilda fait un arrêt en chemin devant l'échoppe de Méphisto, revendeur de dettes et réparateur de réputations. Elle entre, faisant tinter les clochettes à la porte. A l'intérieur, quantité de bibelots chargés d'égrégore, montres, journeaux intimes, un cœur dans un bocal de formol. Méphisto a l'air très heureux de la revoir. Elle lui demande d'établir un contrat entre elle et Szolt. Il accepte en échange d'une parcelle de son innocence, la seule qu'il puisse lui prendre avant qu'elle soit trop impure pour réaliser l'œuvre au blanc, elle accepte "au nom de leur amitié". Méphisto enfile sa langue dans l'oreille de Matilda et aspire une petite parcelle de son innocence, il se délecte de son goût, sucré mais pas trop. Puis il monte avec elle dans le fiacre.

Matilda et Mephisto entrent dans l'atelier de Szolt. Petr reste en faction à l'extérieur, Isadora le rejoint en volant. Un enfant des rues vient voir Petr, il s'agit d'Adler Noeud-Pap et Petr le connaît bien car Adler fait dans le trafic des livres occultes (Petr s'est intéressé à la faible fraction d'entre eux qui soient vrais). Adler lui dit qu'une dame de sa connaissance veut le rencontrer dans la hospoda en face.
Petr s'y rend. Il y trouve Jacinthe, l'ambassadrice d'Autriche, revêtue d'une capuche.

Elle entraîne Petr sur les toits pour discuter en toute tranquillité. Au-dessus de la Nouvelle Ville, les nuages sont noirs et de mauvais augure. Jacinthe est revenue à Prague incognito et demande la collaboration de Petr pour préparer la guerre. Elle pense que tuer Szolt est la priorité, puis révéler l'envoûtement de Soleymane pour le disgrâcier. Petr gagne du temps en lui demandant 24 h pour régler le problème Szolt lui-même.

Petr laisse là Jacinthe et retrouve Isadora dans la ruelle d'or. Isadora pense qu'il faut tuer Jacinthe, sinon elle va le prendre en filature et localiser la crypte. Petr préfère éviter de retourner à la crypte jusqu'à ce qu'il ait résolu le problème Szolt et puisse alors compter sur la loyauté de Jacinthe.

Matilda rencontre Szolt dans son atelier. Il commence par lui reprocher son départ cavalier, et dit manquer de confiance en elle désormais, malgré la promesse qu'elle a laissée sur un billet. Il arrive à lui faire avouer que c'est Kinski qui les a fait évader de son atelier. Méphisto coupe court aux questions de Szolt et le place sous son emprise hypnotique. Il dit qu'il faut procéder à l'œuvre au blanc sans plus attendre, et Szolt obéit.

Matilda retrouve Petr et Isadora dans la ruelle. Faut-il créer le labyrinthe et le golem dans l'atelier de Szolt ou dans la crypte ? On opte pour l'atelier de Szolt. Elle y retourne, cette fois accompagnée de Petr. Szolt découvre alors que Petr fait partie du convent, ce qu'il semblait jusqu'alors ignorer. Tous ces alchimistes s'allongent dans le cercle d'incantation doré à l'or fin sis dans les ateliers de Szolt. Méphisto se délecte du spectacle. Pour créer son labyrinthe, Matilda évoque son pire souvenir.

Le décor prend l'aspect du souvenir de Matilda.
Elle est toute petite. Elle trouve une plaque photographiques représentant deux petites filles, des sœurs, et la fait choir par maladresse. La plaque se brise au sol en dizaines de morceaux. Entre sa mère, qui s'emporte devant la catastrophe, visiblement cette photo était la dernière trace d'une réunion qui ne se reproduira jamais, et elle s'abat sur Matilda. Entre sa tante qui s'interpose et l'enferme dans le buffet pour la soustraire à la colère de sa mère. Elles crient toutes les deux, des mots que Matilda ne comprend pas, sans doute du vieux yiddish. Szolt, Petr et Mephisto, qui assistent au souvenir, sont avec elle, très serrés dans le placard. Des cafards montent sur la peau de Matilda et elle n'ose pas sortir du placard. Mephisto découvre un passage dans le fond du placard, qui communique avec un tunnel de bois très étroit, grouillant de cafards, dans lequel on ne peut s'avancer qu'en rampant. Il y a trois autres passages comme celui-là. Le labyrinthe de Matilda vient d'être créé.

Au présent.
A la demande de Matilda, Szolt a fait venir sa fille Lenka. Matilda explique qu'elle en a besoin comme golem. Szolt trouve ça horrible mais logique : Lenka est (presque) aussi pure que Matilda, et pour cause, elle fut conçue de la même façon. Elle est le golem parfait pour l'œuvre au blanc. Catastrophé, il convainc Lenka de se sacrifier pour lui permettre d'accéder à la suprématie, ce qu'elle accepte car elle été élevée dans la dévotion pour son père. Il demande un temps pour lui dire adieu, et la prend dans ses bras.
Matilda procède sur Lenka, qui sourit bravement quand la brodeuse sort ses aiguilles. Elle lui découd les paupières. Lenka ne sourit plus. Et Matilda remplace ses paupières par des boutons de bottine. Désormais, Lenka n'est plus qu'un corps et une âme, Lenka lui a enlevé l'esprit. Elle souffre du syndrome d'enfermement ; elle est prisonnière de son propre corps. Tous les muscles de Lenka se détendent d'un seul coup, comme si elle était une poupée de chiffon. Matilda la rattrape à temps et l'allonge sur le cercle d'incantation, puis l'envoie dans le labyrinthe.

Anselmo est dans un rêve de daemon.
Il est dans la campagne praguoise, près du village de Petra. Il pique-nique sur le haut d'une falaise, avec Anabella, Petra (mélange de la Petra de 15 ans et de la Petra de 35 ans), et Angelo. Il donne la becquée à Anabella. Petra a l'air heureuse de vivre aux côtés d'Anselmo, pour toujours, dans sa tête. Mais comme il est trop occupé à prendre soin d'Anabella, Anselmo relâche sa surveillance sur Angelo. Quand il reprend à nouveau conscience de lui, Angelo a disparu. Il court au bord de la falaise, il y voit une créature noire et tentaculaire, Asmodée devenu grand ou Angelo corrompu ? Elle le met en garde : s'il se consacre à Anabella, il perdra l'affection d'Angelo. Et justement, dans son dos, Angelo, adulte, l’apostrophe. C’est devenu un homme bien bâti qui ressemble à Petr, mais avec dans le regard une énergie que Petr n'a jamais eu. Il déteste Anselmo et le pousse de la falaise. Anselmo chute.

Au présent, ailleurs.
La synagogue du quartier juif de Prague. Le rabbin est fiévreux quand il fait ses ablutions, pourtant il doit assurer ses offices. Il récite la Torah à ses fidèles. Sa barbe scintille de sueur. Au lieu de voir les lettres, il voit les chiffres à laquelle chaque lettre de l'alphabet hébreu correspond. Au lieu de lire les mots, il lit les lettres à haute voix, il ne peut plus qu'épeler. De plus en plus fiévreux, il s'écrie : "Le Cypher !", puis s'écroule, déchirant le rouleau sacré. Les fidèles se pressent sur lui et écartent sa tunique pour lui donner de l'air. À son cou, on voit des bubons noirs. La peste est arrivée dans le quartier juif.


Commentaires :

Durée :
2h1/2

Règles utilisées :
Comme la partie précédente : c'est-à-dire règles de base des Sels de Millevaux, à l'exception du labyrinthe et du golem de Matilda, où nous avons omis de répondre au questionnaire sur la création de labyrinthe et de golem.

Défis :
+ Je voulais jouer l’œuvre au noir, et quelques autres scènes. Mais j'ai disposé d'un créneau réduit et les agendas des joueur.se.s et mes autres idées de scène ont pris le pas.
+ Je voulais aussi appliquer les questionnaires sur la création de labyrinthe et de golem, c'est un point de règle important pour Yoann.
+ J'avais enfin prévu de mettre en jeu davantage d'éléments de l'encyclopédie sur l'alchimie incluse dans le livre de base.

Mise en jeu :
+ J'ai fait une erreur d'appréciation en donnant à Sœur Judith une volonté de sortir du labyrinthe. Anselmo lui a pris son cerveau avant de l'envoyer dans le labyrinthe. Avait-elle encore une capacité de raisonnement ? Je suis en train de cogiter sur une idée qui restaurerait la cohérence : Sœur Judith n'est en effet plus entière, elle n'est plus qu'un corps et une âme. Elle va demander à Anselmo de lui rendre son cerveau / esprit. (J'ai oublié ce qu'il en a fait).
+ Quand on a créé le labyrinthe de Matilda, j'ai voulu proposer le questionnaire du labyrinthe à la joueuse, mais il nous restait peu de temps de jeu et elle préférait éviter de bâcler, alors elle m'a proposé de faire ça à tête reposée en interpartie.


Debriefing :
+ Avec les joueur.se.s, nous avons convenu que notre plaisir de jeu venait essentiellement de jouer drama, de jouer les intrigues des alchimistes. L'alchimie et la magie ne sont qu'un prétexte, un outil pour nous amener là, pour créer ou magnifier des dilemmes moraux. Aussi j'ai fait le deuil de vouloir à tout prix caser mes éléments de l'encyclopédie alchimique : mieux vaut quelques éléments amenés avec parcimonie (le sacrifice des métaux pour alimenter le creuset) qui créent vraiment du jeu qu'un excès d'informations esthétiques qui nuirait à notre objectif principal, qui est de jouer moral. Cela correspond aussi à mon style de jeu qui consiste à exploiter l'univers sur un ensemble très large de séances, et donc à l'intérieur d'une seule séance je me concentre seulement sur quelques aspects, je suis loin de ressentir le besoin de caser un maximum d'éléments de l'encyclopédie d'univers comme pourrait le ressentir une personne qui joue moins souvent que moi.
+ Avec les joueur.se.s, nous avons aussi convenu que notre plaisir de jeu venait essentiellement du fait de joueur la vie quotidienne des alchimistes, et les labyrinthes / golems ne sont qu'une des fins pour y parvenir, pour l'enrichir. Je pense qu'on a divergé d'une des priorités du jeu tel que Yoann l'a conçu en amenant les informations au fur et mesure, entrelardées de drama, plutôt que de faire une session zéro avec création des alchimistes, des labyrinthes et des golems. Ce biais qu'on a pris nous a rendu l'utilisation des questionnaires de labyrinthes et de golem contre-intuitive : en fait nous avons déjà une bonne idée de ce que à quoi vont ressembler les labyrinthes et les golems, et pour ce qui est de l'objectif du golem, il est joué au moment de l'entrée (les sacrifices volontaires de Sœur Judith et de Lenka) et de la sortie (Sœur Judith implorant pour qu'on la sauve), sinon pendant l'exploration du labyrinthe, le golem est joué comme une seconde peau, une armure mecha. Cela nous empêche de tester pleinement les mécaniques imaginées par Yoann mais cette pratique émergente nous permet de jouer de façon organique et d'avoir une meilleure expérience. On a essayé de jouer by the book sur ce point, mais on a dû renoncer. Je crois que toute table est obligée de trahir l'auteur de jeu pour fonctionner, et c'est ce que nous avons fait à notre façon. J'espère que Yoann pourra tirer quelques apprentissages de cette trahison et qu'il aura l'occasion de re-tester dans un autre contexte (avec une session zéro exhaustive, par exemple, chose qui quelque part eut été impossible avec notre groupe).

A expérimenter lors du prochain playtest :
On a planifié quatre séances max pour finir, sachant qu'elles peuvent être annulées. Il va s'agir de jouer rapide si l'on souhaite connaître l'aboutissement de cette campagne. Suspense !
Énergie créative. Univers artisanaux.
http://outsider.rolepod.net/
Thomas Munier
 
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