Bien sûr
Mathieu tu peux me citer et lier vers les feuilles que j'ai produite : elles sont là pour cela. Et les feuilles sont en CC-by-sa, il est donc fort probable que tu puisses directement les inclure.
Je partage le ressenti de Thomas sur l'anti-stéréotype pour les personnes souffrant de handicap. Je dirais même que c'est un stéréotype de fiction, un stéréotype de 2e génération, celui sur lequel tous les gens voulant retourner le stéréotype buttent. Entre autre parce que cela revient de nouveau à définir la personne handicapée par son handicap : "et si je faisais le contraire du handicap ?" - c'est se baser sur le handicap. Alors que si tu veux lutter contre la discrimination, c'est justement ne pas faire de différence de traitement, juste créer ce personnage comme n'importe quel autre, mutatis mutandis pour le handicap. Et cette dernière étape est importante, sinon au lieu d'antidiscriminer, tu nies.
Une illustration en vidéo. Mais le handicap est quelque chose de très difficile à traiter, car contrairement aux discrimination de genre, d'identité ou d'orientation sexuelle, d'origine ethnique, sociale ou communautaire, il y a quelque chose de fonctionnellement différent.
Il y a aussi toute la question des handicaps cachés, pas reconnus, ou cachés par les personnes qui en souffrent, parfois même à elles-mêmes, parce qu'être handicapé est honteux. Une partie de la démarche peut donc aller dans le sens contraire : se rendre compte que d'une certaine manière nous avons tous nos handicaps. Léger ou graves. Et que beaucoup de handicaps, qu'ils soient physique, mentaux, psychologiques (ou éducationnels ?), sont cachés, invisibles, non reconnus. Daltonisme, insuffisance cardiaque ou respiratoire, surdité, problème de vision, douleurs dans les mouvements, phobies (claustrophobie, agoraphobie, ...), prosopagnosie.
Et donc ce ressenti du stéréotype anti-stéréotype je l'ai avec tout ton outil, pour toute les discriminations. Qui plus est, tu retournes le stéréotype de la personne, mais cela n'aborde pas la question du reste du monde, de ceux et celles qui discriminent. Tu évacues le fond de la question et retourne la faute sur les victimes. Il y a peu de femmes ou de personnes de couleurs "importantes" dans notre monde non pas parce que ces personnes sont faibles, peu éduquées, paresseuse, mahonnête, mais à cause du poids des discriminations et des injustices. Proposer une femme ou une personne de couleur forte, érudite, travailleuse ou honnête comme contre-exemple, c'est faire le jeu de la discrimination : elle est importante dans la fiction car elle a des qualités que les autres n'ont pas.
Personnellement je vois plusieurs orientations potentiellement fructueuses, dont les deux plus classiques sont :
* l'exemple d'une fiction égalitaire, potentiellement libératrice pour les joueuses qui souffrent de ces discrimination (avec une condition nécessaire : qu'elles ne les retrouvent pas malgré tout autour de la table... "ton personnage tape comme une femme / un pédé" ou attendre que ce soit une des femmes à la table qui fasse et serve le café ou ramasse le coca renversé, les joueurs hommes trouvant dégradant d'interpréter un rôle sensible ou féminin, faisant une fixation sur les attributs des femmes en jeu, la question du viol, de la maternité (plutôt que de la parentalité)...), et là il faut traiter tous les personnages exactement de la même manière quel que soient leurs attributs
* un jeu où ces questions de discrimination sont justement abordée : les personnages sont représentatifs et ils sont traités aussi mal que dans notre monde, justement pour montrer ou traiter la question de la discrimination
L'idée du générateur d'empathie m'intrigue.
Valentin, je pense malheureusement qu'il est presqu'impossible de ne pas catégoriser. D'une part parce que c'est la base de notre pensée et de notre communication. Nous réduisons les complexités inabordables du monde à des abstractions que nous pouvons manipuler. Et nous construisons des cases dans lesquelles nous mettons les personnes (ou les choses) que nous pensons semblables : une joueuse, une rôliste, il est petit, c'est le roux, un chat, elle est capricorne, le musicien, ... D'autre part le langage ne résout pas le problème à lui tout seul. Dis "une personne de 70 ans", d'abord c'est long, un peu lourd, cela a beaucoup moins de saveur narrative que "un vieillard", cela a aussi un style qui va impacter la perception de la fiction (froid et technique plutôt qu'émotionnel), la façon dont on va jouer. Dis "une personne de 70 ans", combien de joueur vont penser ou dire "ouais, un vieux quoi !". Même chose avec "une personne à la peau très sombre", qui a en plus le défaut de communiquer beaucoup moins d'informations, car "noir" c'est bien plus qu'une couleur de peau : c'est une physionomie, une attitude, une psychologie, un milieu socio-culturel qui sont transmis en un seul mot. Finalement, les joueuses (à supposer qu'elle te suivent dans leurs paroles) vont extrêmement rapidement ré-étiqueter leurs cases pour les faire correspondre au nouveau vocable. Je pense cependant que changer le vocabulaire peut-être important : quand des associations négatives sont faites au niveau du mot en lui-même ou quand les personnes visées trouvent le mot blessant.