[Théorie] Player Agency

Les autres jeux indés, ceux du commerce, le jeu de rôle en général

Re: [Théorie] Player Agency

Message par brand » 23 Déc 2014, 22:23

-- double post, désolé --
Dernière édition par brand le 23 Déc 2014, 22:25, édité 1 fois.
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Re: [Théorie] Player Agency

Message par brand » 23 Déc 2014, 22:23

Pour l'équilibre de Pareto, c'est ma formation initiale qui ressort. Faut pas s'inquiéter. Désolé sur le manque d'explication :/

Par contre, même si ces trois volontés sont le plus souvent vues comme antagonistes, voire s'opposant dans un jeu à force nulle (si j'accorde plus de place à l'un, c'est que l'autre en cède autant), je suis persuadé qu'il existe des moyens de créer des façons d'augmenter à la fois la place d'untel et d'untel. Je m'excuse de parler de mes propres projets, mais pour avoir essayé de le faire dans certains d'entre eux, je crois que que les créations de groupe (je n'ai pas de meilleur terme, mais je te renvoie à celles de Tenga ou du premier supplément de Wastburg) sont un moyen de tendre vers ce genre de choses. J'ai le même sentiment avec d'autres mécaniques prévues pour d'autres jeux à paraître, mais je suis sûr que cela se trouve aussi à plein d'autres endroits pour peu qu'on fasse l'effort.
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Re: [Théorie] Player Agency

Message par kiraen » 24 Déc 2014, 00:07

Je pense aussi que cette synergie peut se retrouver dans des tas de jeux. Si tu prends un jeu comme Spark de Jason Pitre (que je n'ai pas encore lu, ni testé) tel qu'il le présente dans un podcast récent (, en anglais), la création du monde précède le lancement d'une partie. Du coup la distinction joueur/créateur se brouille puisque le rôle est partagé. Et je me dit que ça doit effectivement avoir l'effet recherché. Je n'ai pas lu non plus Tenga mais cette création collaborative m'intéresse aussi. C'est d'ailleurs le mode que j'ai choisi il y a quelques mois quand je me suis lancé dans la création de mon projet de jdr (enfin création collaborative de l'univers de jeu puis des personnages).

Est-ce que cette participation à la création de l'espace de jeu (au niveau du personnage, du groupe ou de l'univers) va réellement avoir un effet sur l'agentivité ? C'est certainement une question que je poserai à Globo pendant notre podcast !
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Message par Benoît » 06 Jan 2015, 16:45

Changer l'agentivité, ça serait donc faire bouger le curseur entre les critères créateur/joueur/animateur ? Quand le joueur prend en main une part de la création, quand il prend en main une part de l'animation de la partie...?
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Re: [Théorie] Player Agency

Message par Globo » 07 Jan 2015, 12:12

Je ne suis pas sur que l'agentivite ait un impacte sur cette trinité. L'agentivite c'est prendre conscience que pour avoir des joueurs épanouis il faut leur proposer des choix intéressant. Ce peut être des choix narratifs ou ludistes. C'est comprendre que multiplier les choix ne suffit pas s'ils ne sont pas significatifs et comprendre que pour que les joueurs aient réellement des choix il faut qu'ils aient suffisamment d'informations.

Le concept d'agentivite permet par exemple de comprendre pourquoi les scénario "enquête" sont si souvent décevant.
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Re: [Théorie] Player Agency

Message par Frédéric » 07 Jan 2015, 13:03

Globo : ça me semble être un bon résumé.
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Re: [Théorie] Player Agency

Message par kiraen » 08 Jan 2015, 15:02

Mais du coup avec ce résumé tu englobes le concept d'Empowerment non ?
De ce que j'en avais compris l'empowerment consistait à donner au joueur la possibilité (perçue ou réelle) d'influencer le récit, l'issue des situations etc.
Je me plante peut-être mais j'aurai distingué les deux en disant que l'agentivité c'est de pouvoir faire des choix, et que l'empowerment c'est de permettre à ces choix d'avoir des conséquences importantes sur le monde du jeu.

Je ne sais pas si une distinction des deux est vraiment nécessaire ou sensée, mais je l'ai vu faite à plusieurs reprises...
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Re: [Théorie] Player Agency

Message par Globo » 08 Jan 2015, 15:30

L'agentivite ce n'est pas seulement la possibilité de faire des choix. C'est bien deux choses 1) avoir des choix possibles et 2) qu'ils aient un impact significatifs. Les choix inconsistants nuisent au contraire à l'agentivite que ce soit parce que ce sont de faux choix ( cas de l'illusionniste ) ou que ce soit parce que tous les choix se valent ...

Maintenant ce peut être deux choix prévu par le MJ. Auxquelles cas l'empowerment se limite a : pilule bleu ou pilule rouge ...

Il faut noter qu'en l'absence d'autres informations que leurs couleurs, le choix des deux pilules n'en est pas un ... Par manque d'information !
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Re: [Théorie] Player Agency

Message par Frédéric » 08 Jan 2015, 15:37

Sincèrement, l'idée que l'on peut faire croire aux joueurs qu'il sont libre me paraît absurde en JdR, comme en jeu vidéo.
Je n'ai jamais vu de joueurs dupes. S'ils leurs actes n'ont pas d'impact, ils joueront le jeu de suivre le scénar (avec plus ou moins de plaisir) ou se rebelleront. Ils prendront leur plaisir en marge ou dans les interstices, mais ils verront très bien que l'histoire n'est pas de leur fait.
On peut ne pas savoir la différence entre ce que le MJ improvise et ce qu'il a préparé. Mais si le MJ improvise, c'est que les choix des joueurs ont de l'importance.
La seule exception que j'envisage, c'est le cas de joueurs qui n'auraient jamais connu de parties plus libre.
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Re: [Théorie] Player Agency

Message par Thomas Munier » 08 Jan 2015, 16:02

Frédéric, tu dis que si le MJ improvise, les choix des joueurs ont de l'importance ? Peux-tu m'expliquer en quoi cette relation est systématique ? Est-il vraiment impossible que les choix des joueurs soient sans importance quand le MJ improvise ?
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Re: [Théorie] Player Agency

Message par Frédéric » 08 Jan 2015, 16:24

Je pars du principe de parties où le MJ a écrit un scénario (ou utilise un scénario écrit par quelqu'un d'autre) et qu'il improvise des éléments importants de la situation. Bien sûr, s'il improvise une description qui ne répond pas à une impulsion d'un joueur, ça n'entre pas en ligne de compte. Mais dans une grande proportion de cas, quand le MJ possède un scénario et qu'il est amené à improviser, c'est parce que les joueurs l'ont conduit dans une nouvelle situation non prévue. Ce n'est pas systématique, ce n'est sans doute pas une règle, mais c'est de cela que je veux parler.
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Re: [Théorie] Player Agency

Message par Thomas Munier » 08 Jan 2015, 17:02

Dans ses réponses à l'interview de Coralie David (il faut lui demander par mail pour en avoir connaissance, contre promesse de lui faire un retour), Brand distingue trois niveaux d'action en jeu de rôle : celui d'auteur de jeu, celui de meneur de jeu, celui de personnage. Je me demande si ça ne cesserait pas intéressant d'analyser l'agentivité selon ces trois niveaux.

Dans Monostatos, l'agentivité au niveau auteur de jeu est faible : le jeu nous dit de jouer des rebelles qui se fritent contre les serviteurs de Monostatos, c'est mécaniquement impossible de jouer autre chose. L'agentivité au niveau meneur de jeu est forte : j'entends cela dans le sens où chaque joueur peut faire des propositions sur le décor ou les figurants, soit en les décrivant lui-même, soit en en faisant admettre l'existence au meneur de jeu principal. L'agentivité personnage est également élevée, les choix que font les personnages (et/ou les joueurs pour les personnages) ont un grand impact sur ce qu'il advient. (dans la limite du fait que la décision de maintenir ou abandonner la lutte est déterminée de façon mécanique)

Dans L'Appel de Cthulhu, l'agentivité au niveau auteur de jeu est forte : la façon dont on répartit les points de création de personnage et l'équipement va directement dire si on joue pulp ou gritty, et cette pratique a été amplifiée dans la V6 qui propose de varier le nombre de points de création en fonction de l'ambiance recherchée. L'agentivité au niveau meneur de jeu est modérée : on peut influer sur le décor et les figurants uniquement en posant des questions. (la rédaction d'un background n'est même pas une technique by the book, ce n'est donc pas un moyen licite d'influer sur le décor et les figurants !). L'agentivité au niveau personnage est élevée. Par exemple, le jeu n'interdit pas de fuir les lieux (et ça m'a donné bien des fois du fil à retordre quand j'étais MJ !), ça dépend en fait directement de l'ambiance que les joueurs recherchent. Dans un cas comme L'Appel de Cthulhu, la plupart des scénarios modifient en profondeur l'agentivité, que ce soit par l'imposition de prétirés, de lieux, de trames et de chronologies, par des règles spécifiques, etc...

Je dis peut-être (sûrement) du grand n'importe quoi, mais y réfléchir comme ça, ça me fait avancer. J'aurais tendance à dire que mes jeux de rôles préférés, actuellement, ont, une grande agentivité dans ces trois domaines, ou dans au moins deux domaines, et qu'à devoir en sacrifier certains, je conserverais au moins une grande agentivité dans le domaine du personnage.
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Re: [Théorie] Player Agency

Message par Frédéric » 08 Jan 2015, 23:46

Si je comprends bien, Thomas, tu envisages de scinder les éléments d'un game design qui concourent à l'agentivité ?

L'agentivité me semble être surtout un concept désignant ce qu'il se passe quand on joue, mais il est clair que toute la conception d'un jeu, l'écriture des scénarios et les techniques de MJ jouent un rôle fondamental à ce niveau là.

Toujours si je comprends bien, le niveau auteur désigne de quelle façon les participants (MJ compris ?) peuvent s'approprier le jeu ? Pas sûr que ça entre dans l'agentivité.

En revanche, les techniques de MJ, les scénarios ou préparations qu'il utilise, les mécaniques et les espaces de créativité dévolues aux joueurs jouent très certainement un rôle.
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Re: [Théorie] Player Agency

Message par Thomas Munier » 09 Jan 2015, 08:54

Oui, tu cernes très bien le fond de ma pensée.

Je ne sais pas si le pouvoir d'action des joueurs (MJ y compris) sur les intentions du jeu doit s'appeler agentivité ou non, en revanche je pense que c'est un critère à prendre en compte sur le game design, sans doute aujourd'hui occulté par le triomphe de la philosophie "system does matter" (je renvoie ici pour éclairer le fond de ma pensée)
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Re: [Théorie] Player Agency

Message par brand » 16 Jan 2015, 13:55

Je copie/colle le passage en question. Pour moi, intuitivement, il s'agit plus de volontés que de niveau d'action. Je fais peut être un raccourci en parlant d'agentivités parce qu'elles doivent être actualisées, à voir selon sur quoi on se base, mais je pense qu'on peut se le permettre sans faire de mal à personne. Dans tous les cas, comme je ne suis pas bien sûr de ce que Thomas entend pas niveau d'action, j'imagine qu'en mettant le texte original, on fera l'économie d'un malentendu sur les termes s'il ne s'agit que ça :)

Par contre, pour le niveau des exemples, en ce qui me concerne, c'est quasiment l'inverse.

La dimension collaborative et la loi des trois auteurs

Il s'agit là sans doute d'une autre spécificité de la fiction rôliste. Elle est au confluent d'au moins trois agentivités, ou volontés auctoriales distinctes : celle de l'auteur (au sens large : celle de l'équipe qui a produit le jeu et/ou le matériau joué), celle du meneur de jeu (qui interprète à la fois le matériau joué et les signaux envoyés par les joueurs... dans le cas des jeux sans meneur, ce rôle peut être réparti au niveau des joueurs eux-mêmes, du jeu ou de l'auteur initial, selon les cas) et celle des joueurs. C'est ce qu'on appelle la loi des trois auteurs.

Les relations qu'entretiennent ces trois agentivités sont relativement complexes. Même si plusieurs de ces trois auteurs peuvent être regroupés en une seule et même personne, ces trois agentivités ne peuvent que difficilement exister les unes sans les autres. Et ceci est encore complexifié par le fait que les joueurs ont généralement presque tous des volontés auctoriales assez différentes, qu'il y a donc bien plus de trois auteurs, et, qu'une fois en partie, ces volontés ne peuvent que difficilement s'affirmer davantage sans que cela ne revienne à brimer quelqu'un d'autre. En économie, on parlerait volontiers d'équilibre de Pareto.

Aussi toute narration est immédiatement dépendante de l'approbation des autres personnes présentes, mais est également limitée et mise à mal par l'agentivité des autres intervenants. Ainsi, pour qu'un élément soit réellement validé dans la fiction, il doit être réincorporé et réutilisé par les autres personnes présentes, ou au moins ces dernières ne doivent pas s'opposer à ce que vous vous en resserviez. La création est donc à la fois coopérative et compétitive. De ce fait, à part le cas très particulier de joueurs très passifs, la seule volonté auctoriale qui peut être bafouée de façon relativement indolore une fois autour de la table de jeu est celle de l'auteur du matériau joué, mais cela pose d'autres soucis. En effet, celle-ci est souvent le postulat de base sur lequel la plupart des joueurs se mettent d'accord pour établir une fiction commune et partagée. Le jeu porte généralement les germes de son propre genre et, sans autre accord (le plus souvent explicite) préalable stipulant le contraire, en participant à la partie, tout le monde accepte de respecter cette base commune. D'un point de vue fictionnel, il s'agit, en quelques sortes du ciment de la future partie.

Cependant, dans un jeu de rôle, la fiction ne peut réellement commencer que lorsqu'on l'active et met en branle la situation qu'aide à générer le matériau de base. Le plus souvent par l'ajout des personnages et d'une situation initiale propulsant la suite des événements. Dit autrement, on ne peut jouer dans le cadre défini que si on le modifie et que, du fait du besoin de respecter la cohérence, on rajoute de nouvelles contraintes. Et, donc, de nouvelles règles. On revient alors sur le slogan anglo-saxon « Playing the game is hacking it. »
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