Le jeu de rôle, art méta-fictionnel par excellence

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Le jeu de rôle, art méta-fictionnel par excellence

Message par Mangelune » 17 Août 2015, 10:37

J'ai rebondi sur ma lecture d'Inflorenza et mes réflexions précédentes sur le rire méta pour élargir un chouia mes réflexions au jdr dans son ensemble :

http://mangelune.wordpress-hebergement.fr/2015/08/17/le-jeu-de-role-art-meta-fictionnel-par-excellence/

J'espère que cela vous plaira ! J'entends bien en écrire un autre sur l'horreur méta en jdr.
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Re: Le jeu de rôle, art méta-fictionnel par excellence

Message par Thomas Munier » 17 Août 2015, 15:56

Un article qui m'a beaucoup interpellé (notamment parce que j'ai écrit pour le game chef un jeu où le meta, n'est certes pas proscrit, mais limité à une communication par gestes ou par papiers, ou à l'oral pendant les pauses.)

J'ai une question :

Quand tu dis :
Je terminerai cet article sur la mise en garde de rigueur : pour qu’il y ait méta-fiction, il faut qu’il y ait fiction. Les excès décrits plus haut sur les meneurs de jeu voulant à tout prix supprimer la moindre réflexion hors-jeu ont leur pendant dans les tables où la plus petite unité de fiction se voit instantanément étouffée par plusieurs dizaines de minutes de discussion hors-jeu. C’est notamment ce phénomène qui domine dans les scénarios dits « d’enquête » où les joueurs passent plus de temps à réfléchir à l’énigme qu’à incarner un personnage ou vivre quoi que ce soit.
, dans ton exemple de l'enquête, considère-tu le temps passé à réfléchir à l'énigme comme hors de la fiction ? Considères-tu que c'est le joueur et non pas le personnage qui émet ses spéculations et accusations ?
Dans les livres ou les films d'Hercule Poirot, on entend le héros émettre des spéculations et des accusations pendant une bonne partie du temps d'antenne. Si on reproduit en roleplay ces moments-là, est-on dans la fiction ou en méta ? Quid par ailleurs des soirées enquête ou 3/4 du temps de jeu consiste justement à émettre en roleplay des spéculations et des accusations ?

J'ajouterai que la théorie du maelstrom de Romaric Briand semble bien recouper ce que tu soutiens, dans la mesure où le maelstrom imbrique jeu fictionnel et réflexion méta dans le même processus.
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Re: Le jeu de rôle, art méta-fictionnel par excellence

Message par Mangelune » 17 Août 2015, 16:16

Cool Thomas !

Thomas Munier a écrit :dans ton exemple de l'enquête, considère-tu le temps passé à réfléchir à l'énigme comme hors de la fiction ? Considères-tu que c'est le joueur et non pas le personnage qui émet ses spéculations et accusations ?
Dans les livres ou les films d'Hercule Poirot, on entend le héros émettre des spéculations et des accusations pendant une bonne partie du temps d'antenne. Si on reproduit en roleplay ces moments-là, est-on dans la fiction ou en méta ? Quid par ailleurs des soirées enquête ou 3/4 du temps de jeu consiste justement à émettre en roleplay des spéculations et des accusations ?


A mon sens on est dans un cas-limite, même si je pense que les réflexions sur l'enquête penchent plus du côté du méta. Il suffit de voir à quel point les personnages sont vite oubliés dans ces situations : chaque joueur participe à auteur de ses capacités déductives sans se préoccuper du fait qu'ils incarnent un barbare, un enfant de 8 ans ou un robot.

Il me semble évident en revanche que si tout le monde le fait en roleplay, on est dans la fiction.

Pour les soirées enquête, mon expérience est la même qu'en jdr (et c'est le trèèèèèèèèèèès gros reproche que je leurs ferais) : je me retrouve à chaque fois pris en mon rôle et le jeu, et je choisis comme tout le monde de mener l'enquête au détriment complet de mon personnage. Cela dit, contrairement à une partie de jdr, je me sens encore plus mal à l'aise quand je le fais parce que je sens que ce loisir n'est pas fait pour discuter hors de son personnage.

J'ajouterai que la théorie du maestrom de Romaric Briand semble bien recouper ce que tu soutiens, dans la mesure où le maelstrom imbrique jeu fictionnel et réflexion méta dans le même processus.


Oui je n'en parle pas ici (ce qui est sans doute une faute) mais c'est parce que le précédent article sur le rire disait ouvertement que cette réflexion avait ses bases dans la lecture du Maelstrom.
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Re: Le jeu de rôle, art méta-fictionnel par excellence

Message par Eugénie » 18 Août 2015, 21:34

Sans vouloir inventer l'eau tiède, je pense que si, historiquement, les joueurs ont essayé de bannir l'intervention meta au nom de l'immersion ou l'immersion au nom de l'efficacité meta, c'est que jouer les deux ensemble c'est compliqué. Indispensable, nourrissant, génial, ébouriffant... mais compliqué.

Je suis complètement d'accord avec ton article, Mangelune, mais du coup ça fait germer des questions dans ma tête dont je n'ai pas les réponses. Alors si tu en as, ça m'intéresse.

Une fois posé le fait que meta-fiction et fiction sont indispensables l'une à l'autre dans une partie de jdr, comment fait-on pour jouer avec les deux niveaux sans qu'ils ne se phagocytent ? Comment on dose et quels genres d'outils permettent ou permettraient de maintenir un équilibre ?

Est-ce que la limite est claire pour toi entre la méta-fiction et la fiction ?
Pour moi c'est pas toujours très clair : si je parle de l'intériorité de mon perso sans qu'il prenne objectivement la parole (pj = "silence" ; moi ="Machine est désemparée, elle ne sait pas quoi te répondre") par exemple, je fais du méta ou je joue dans la fiction ? J'appelle ça vulgairement du sous-titre, mais je ne sais pas où le placer sur le spectre...

Est-ce qu'il est intéressant d'établir une limite entre les deux ?
Est-ce qu'il est plus nourrissant pour le jeu que les deux niveaux se mélangent ou au contraire que les joueurs essaient de maintenir une différenciation claire entre ces deux plans ?

Je pense à des possibilités de séparation type :
- des moments dédiés aux échanges méta puis des moments en roleplay uniquement : on bosse le plan entre joueurs et puis on endosse nos pj pour la mise en œuvre ;
- un mode de communication propre au méta et un autre à la fiction : cf Dragonfly motel, où on communique de joueurs à joueurs en silence (mais on communique énormément quand même) et on ne parle que dans la fiction, souvent en monologue intérieur ;
- des mécaniques dédiées (je n'ai pas d'exemple en tête mais tu en cites déjà dans l'article)

Est-ce que mêler les deux niveaux ne serait pas un style de jeu propre à l'enquête par exemple ? et les différencier un style propre au drama ? ou rien à voir ? Et est-ce que ces deux alternatives (mais il y en a peut-être d'autres) ne coïncident pas avec deux façons différentes de concevoir son pj (comme une extension de soi et comme une projection de soi) ?

… est-ce que je pose trop de questions ?

(et sinon l'horreur méta c'est facile, c'est quand c'est ton tour de parler et que tout le monde se tourne vers toi et que tu sais pas quoi dire... ce silence-là, il s'appelle l'horreur méta. définitivement. ^^)
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Re: Le jeu de rôle, art méta-fictionnel par excellence

Message par Mangelune » 19 Août 2015, 18:05

- établir des mécaniques qui nécessitent de justifier ses choix : tous les jeux avec des traits (Spirit of the Century, Inflorenza, Les Errants d'Ukiyo) demandent au joueur d'expliquer les motivations du personnage pour pouvoir bénéficier de ses capacités


A ce propos, j'ai une anecdote sur une partie d'Inflorenza jouée la semaine dernière (le CR ne sera pas diffusé avant un moment, mais si vous voulez creuser, vous pouvez le consulter ici) :
On joue une partie en Carte Blanche (je suis le Confident, j'ai le dernier mot sur le décor et les figurants ; les joueurs ont le dernier mot sur leur personnage), et j'avais très envie de faire quelque chose dans le genre cape et d'épées et dans le genre épique, si bien que pendant la partie, j'ai multiplié les bastons, et si je suis resté focus sur l'objectif des personnages inventé par les joueurs (atteindre une île inaccessible), j'ai fait monter les enjeux progressivement jusqu'à faire intervenir des dieux et sous-entendre que le destin du monde se jouait dans les actes des personnages (notamment parce que leurs antagonistes voulaient aussi atteindre l'île mais à des desseins apocalyptiques).
Et bien, tout au long de la partie, en rappelant leurs traits, les joueurs m'ont envoyé des signaux comme quoi leurs personnages n'avaient pas demandé à être mêlé à tout ça, et qu'ils étaient dépassés par les enjeux. Quand on a debriefé, l'un des joueurs m'a dit plus clairement : "C'était trop épique. J'étais parti sur quelque chose de plus intimiste." L'objectif de son personnage était : "je veux retrouver mon père perdu de vue il y a quelques années" (j'avais ensuite décrété que son père était dans l'île.

Concrètement, il y avait eu un problème d'écoute entre eux et moi. Ce que j'en retire, c'est que pour arriver à un accord de groupe, notamment sur le genre fictionnel (d'autant plus difficile qu'en jeu de rôle, comme le soutient Jérôme Larré dans sa réponse à Coralie David), la table n'émule pas un genre narratif tel que ceux présents dans les fictions linéaires, mais crée son propre genre narratif, une sorte de mélange des genres unique à la table, un méta-genre transgressif tel qu'on peut en retrouver dans les fan-fictions, et, en y allant de mon interprétation personnelle, un méta-genre qui ne peut se produire qu'à l'intérieur d'un maelstrom, qu'on ne peut pas retrouver à l'intérieur d'un fiction linéaire <qui n'est que l'aplatissement du contenu fictionnel malléable, lui-même produit du maelstrom).

Où je veux en venir ? Ma conclusion est que pour que la table puisse s'harmoniser, notamment sur la question du genre narratif, un seul élément de dialogue méta ne suffit pas (en l'occurence dans mon exemple, l'explicitation des motivations des personnages n'a pas suffi), il faut donc les multiplier (si par exemple, au début de la partie, j'avais explicité ma volonté de faire du cape et d'épée et de l'épique, les joueurs auraient pu me signaler qu'ils préféraient quelque chose de plus intimiste, et on aurait cherché un compromis).
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Re: Le jeu de rôle, art méta-fictionnel par excellence

Message par Eugénie » 20 Août 2015, 15:59

Je crois que j'ai compris ce qui me perturbe dans ton article, à lumière de ton exemple d'Inflorenza. Tu superposes meta-jeu et meta-fiction (je ne sais pas si les termes sont corrects, peut-être qu'ils sont déjà attribués à autre chose en jdr) comme si c'était un seul et même « meta ». Je crois que je ne suis pas d'accord, mais comme je ne suis pas du tout sur mon terrain, je n'exclus pas l'hypothèse de me planter royalement.

Pour moi, la meta-fiction c'est, comme tu le dis dans l'article, parler des ressorts narratifs, des motivations du perso, du rythme, des possibles conséquences des événements, apporter ou demander détails etc. Et si j'ai eu du mal à la distinguer de la fiction dans un premier temps (cf les questions en vrille, désolée, je me suis fait une surchauffe), c'est parce que j'ai l'impression que ça fait complètement partie de la narration en jdr. Je ne vois pas comment on peut s'en passer au cours d'une partie, sous une forme ou une autre. Et c'est aussi ce que tu soutiens dans l'article, n'est-ce pas ?

Mais discuter la fiction ne donne pas forcément les infos nécessaires sur les envies, les intentions, les frustrations des joueurs qui sont derrière. (C'est là que j'y vais à tâtons et que je ne suis pas sure de moi : ) Je crois qu'il y a un problème de sujet : si on prend la fiction comme sujet, on ne parle pas de nous joueurs, ou de notre façon de jouer, ou de nos envies de jeu. En tout cas, on ne met pas ça au centre. Du coup, quand on discute de nos attentes ou nos frustrations de joueurs, même s'il y aura forcément des répercutions sur la fiction au final, est-ce que c'est encore de la meta-fiction ? Est-ce que ce n'est pas encore un niveau différent, qui serait le meta-jeu ?

Décaler la focale de la fiction au joueur, c'est un truc qui ne va pas de soi, j'ai l'impression. Est-ce que ça ne serait pas à cause de cette distinction (pertinente ou non) que les joueurs pensent qu'ils peuvent se passer du meta-jeu en jeu, ou du moins le gérer "à part" (entre les parties par exemple), ou qu'ils ne sont même pas au courant que des éléments de meta-jeu peuvent être discutés ?

Du coup, est-ce que je dis des bêtises en reformulant ta conclusion précédente en « pour que la table puisse s'harmoniser, notamment sur la question du genre narratif, les éléments de meta-fiction ne suffisent pas, il faut aussi des éléments de meta-jeu. »

Ou est-ce que ça n'était pas ton propos du tout ?
(auquel cas, j'arrête de polluer et je garde ça pour de la conversation privée, si tu as la patience. le sujet m'a mis la tête en ébullition, mais je vois bien qu'il me manque des clefs)
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Re: Le jeu de rôle, art méta-fictionnel par excellence

Message par Mangelune » 20 Août 2015, 19:22

A ce propos, j'ai une anecdote sur une partie d'Inflorenza jouée la semaine dernière (le CR ne sera pas diffusé avant un moment, mais si vous voulez creuser, vous pouvez le consulter ici) :
On joue une partie en Carte Blanche (je suis le Confident, j'ai le dernier mot sur le décor et les figurants ; les joueurs ont le dernier mot sur leur personnage), et j'avais très envie de faire quelque chose dans le genre cape et d'épées et dans le genre épique, si bien que pendant la partie, j'ai multiplié les bastons, et si je suis resté focus sur l'objectif des personnages inventé par les joueurs (atteindre une île inaccessible), j'ai fait monter les enjeux progressivement jusqu'à faire intervenir des dieux et sous-entendre que le destin du monde se jouait dans les actes des personnages (notamment parce que leurs antagonistes voulaient aussi atteindre l'île mais à des desseins apocalyptiques).
Et bien, tout au long de la partie, en rappelant leurs traits, les joueurs m'ont envoyé des signaux comme quoi leurs personnages n'avaient pas demandé à être mêlé à tout ça, et qu'ils étaient dépassés par les enjeux. Quand on a debriefé, l'un des joueurs m'a dit plus clairement : "C'était trop épique. J'étais parti sur quelque chose de plus intimiste." L'objectif de son personnage était : "je veux retrouver mon père perdu de vue il y a quelques années" (j'avais ensuite décrété que son père était dans l'île.

Concrètement, il y avait eu un problème d'écoute entre eux et moi. Ce que j'en retire, c'est que pour arriver à un accord de groupe, notamment sur le genre fictionnel (d'autant plus difficile qu'en jeu de rôle, comme le soutient Jérôme Larré dans sa réponse à Coralie David), la table n'émule pas un genre narratif tel que ceux présents dans les fictions linéaires, mais crée son propre genre narratif, une sorte de mélange des genres unique à la table, un méta-genre transgressif tel qu'on peut en retrouver dans les fan-fictions, et, en y allant de mon interprétation personnelle, un méta-genre qui ne peut se produire qu'à l'intérieur d'un maelstrom, qu'on ne peut pas retrouver à l'intérieur d'un fiction linéaire <qui n'est que l'aplatissement du contenu fictionnel malléable, lui-même produit du maelstrom).

Où je veux en venir ? Ma conclusion est que pour que la table puisse s'harmoniser, notamment sur la question du genre narratif, un seul élément de dialogue méta ne suffit pas (en l'occurence dans mon exemple, l'explicitation des motivations des personnages n'a pas suffi), il faut donc les multiplier (si par exemple, au début de la partie, j'avais explicité ma volonté de faire du cape et d'épée et de l'épique, les joueurs auraient pu me signaler qu'ils préféraient quelque chose de plus intimiste, et on aurait cherché un compromis).


Etrange, ma réponse à Eugénie semble avoir été remplacée par quelqu'un qui n'est pas moi et parle avec ma voix :/ Je dirais Thomas Munier au hasard, qui aurait édité mon post sans s'en rendre compte ?
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Re: Le jeu de rôle, art méta-fictionnel par excellence

Message par Thomas Munier » 20 Août 2015, 20:04

Aie, oui, c'est moi, j'ai fait une belle fausse manip ! Je m'en excuse bien platement Vivien, j'espère que tu vas parvenir à reconstituer ta réponse...
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Re: Le jeu de rôle, art méta-fictionnel par excellence

Message par Eugénie » 20 Août 2015, 20:41

MAIS ? Dites, vous savez combien de temps j'ai passé avec l'article d'un côté et la réponse de l'autre en essayant de piger un truc au schmilblick ? Je vous préviens, hein, je vais aller dire à Fabien que je me fais encore bizuter sur les Ateliers imaginaires...
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Re: Le jeu de rôle, art méta-fictionnel par excellence

Message par Mangelune » 21 Août 2015, 08:39

Eugénie a écrit :MAIS ? Dites, vous savez combien de temps j'ai passé avec l'article d'un côté et la réponse de l'autre en essayant de piger un truc au schmilblick ? Je vous préviens, hein, je vais aller dire à Fabien que je me fais encore bizuter sur les Ateliers imaginaires...


Ça m'a fait un drôle d'effet tu sais, de m'assurer que ces mots-là n'étaient pas les miens et que j'étais pas devenu fou !

Par contre je sais plus ce que j'avais écrit :/

Effectivement il doit exister de la méta-fiction et du méta-jeu, dans un cas on discute de la suite des événements, on juge ce qui s'est déroulé, on explique les raisons fictionnelles derrière des choix... dans l'autre cas on parle du jdr lui-même, des motivations humaines derrière les choix, de la raison d'être des règles. Après, bien évidemment, les catégories ne sont pas souvent bien séparées (ne serait-ce que parce que chaque mot prononcé reflète les goûts et envies de celui qui les prononce), mais pour l'analyse on a pas d'autre choix que de faire comme si.

Qui de l'exemple de Thomas du coup ? J'aurais tendance à dire que c'est méta-fictionnel, cette volonté des joueurs de ramener la fiction vers quelque chose de plus intime en utilisant les traits des personnages (les traits constituant un outils généralement efficace). La discussion de fin de partie, la critique, c'est plus du méta-jeu, on traite de la façon de mener de Thomas, des règles d'Inflorenza, des envies brimées des joueurs...
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Re: Le jeu de rôle, art méta-fictionnel par excellence

Message par Steve J » 21 Août 2015, 09:46

Mangelune a écrit :Ça m'a fait un drôle d'effet tu sais, de m'assurer que ces mots-là n'étaient pas les miens et que j'étais pas devenu fou !

Par contre je sais plus ce que j'avais écrit :/

De mémoire tu avais écris les propos polémiques suivants
Mangelune a écrit :Ph'nglui mglw'nafh Cthulhu R'lyeh wgah'nagl fhtagn ! Ph'nglui mglw'nafh Cthulhu R'lyeh wgah'nagl fhtagn !
Ph'nglui mglw'nafh Cthulhu R'lyeh wgah'nagl fhtagn !
Ph'nglui mglw'nafh Cthulhu R'lyeh wgah'nagl fhtagn !
Ph'nglui mglw'nafh Cthulhu R'lyeh wgah'nagl fhtagn !!!!!
Ph'nglui mglw'nafh Cthulhu R'lyeh wgah'nagl fhtagn ?


J'avais interprété ça comme une façon de lister et de classifier les méthodes permettant de mélanger le méta et le non méta en partie.
Tu avais mentionné Burning Wheel et sa façon de reléguer hors partie les discussions sur le monde. Les Errants d'Ukiyo mais je ne sais plus pourquoi (pour faire ta pub hein, avoue !).
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Re: Le jeu de rôle, art méta-fictionnel par excellence

Message par Mangelune » 21 Août 2015, 11:49

Steve J a écrit :Tu avais mentionné Burning Wheel et sa façon de reléguer hors partie les discussions sur le monde. Les Errants d'Ukiyo mais je ne sais plus pourquoi (pour faire ta pub hein, avoue !).


Alors oui, mais j'avais été plus discret que ça (et j'avais aussi parlé de Perdus sous la pluie, mais toujours entre deux jeux d'autres personnes, l'air de rien toussa).

Effectivement j'avais fait une liste brève et non-euclidienne des méthodes me venant à l'esprit :

Concentrer le méta sur des moments-clés avec règles et modification de la feuille de perso : Burning Wheel, Inflorenza et tous les jeux qui traitent de la fiction directement sur la feuille de perso, d'abord en amont de la partie, mais aussi pendant. Quand je rédige un trait/un belief qui dit "Le roi, mon frère, est un traître, j'aurai sa peau !", on voit bien qu'il s'agit là d'une prise de position claire quant à la fiction. Ce qui entraîne souvent une petite discussion, de l'approbation, une demande de correction légère, ce genre de choses.

Les Errants d'Ukiyo (et Herowars/Heroquest dont il s'inspire), qui utilise un système de traits comme Inflorenza a priori, me paraît finalement moins méta-fictionnel. Les traits sont surtout des compétences libres. Ils influencent les conflits, leurs donnent de la couleur et peuvent bien sûr avoir une influence sur la fiction qui en découle, mais pas tellement plus qu'une compétence dans n'importe quel jdr.

C'est sans doute aussi le cas dans Sens où les traits n'ont qu'une influence modeste sur la mécanique de jeu, et sont si nombreux que le meneur n'a pas le temps vraiment de les prendre en compte (sans parler du fait que le scénario est assez scripté). D'un autre côté, le côté "jeu à secrets" encourage les discussions sur la fiction, même en dehors de la partie, et le dispositif de Sens Néant permet des discussions méta-fictionnelles à l'intérieur de la fiction !

Faire taire le méta : certains jeux, il me semble, règlent le problème des discussions méta-fictionnelles en plaçant un MJ avec tous les pouvoirs. D'autres, comme Monostatos et Perdus sous la pluie, règlent le problème en cadrant de façon très stricte qui peut dire quoi pour gagner quoi.

Mécaniques d'encouragement discrètes (car potentiellement non-verbales) : dans Prosopopée, quand la fiction va dans un sens qui me plaît, j'apporte mon aide en donnant un dé ; ce qui est subtil et potentiellement risqué, c'est que le fait de donner un dé n'a aucune influence sur ce qui a été dit qui est validé dès énonciation. Dans d'autres jeux comme Zombie Cinéma ou Inflorenza, on vient en aide dans un conflit, en indiquant quel sens on voudrait que la fiction prenne.
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Re: Le jeu de rôle, art méta-fictionnel par excellence

Message par Maxime (Laconfir) » 21 Août 2015, 11:57

Je suis de loin cette conversation et je suis très intéressé par cette tentative de classification entre méta fiction et méta jeu.

Je pense que là on va arriver dans un bourbier où chacun met derrière ce qu'il estime pouvoir mettre derrière donc je serai curieux de savoir si un travail théorique a déjà été fait ou pas.

Parce que pour moi: méta, veut dire: "le joueur est au courant de quelque chose que le personnage ne sait pas".

Cette information peut être intradiégétique (intérieur à la fiction, comme l'exemple d'eugénie: Machine est catatonique) ou extrediégétique (là je n'ai pas d'exemple... Grouille de finir la scène la pizza est chaude ?).

Je pense que toute intervention méta fictionnelle est nécessaire au jeu et que jouer une partie sans est impossible (même en GN et murder on y arrive pas)... Par contre, il faut vraiment un propos fort pour faire un jeu qui tourne beaucoup autour... En effet, même si ces interventions méta ont leur place dans une partie, chacun doit aussi savoir quand en faire et quand se taire.
On peut avoir dysfonctionnement quand quelqu'un commence un dialogue et que l'autre répond: "dans sa tête, Manolo s'imaginait répondre par l'affirmative, mais pour le protéger, il devait mentir". Cela peut, selon le jeu et la table être une super réponse comme être une réponse pourrie. Si l'interlocuteur attendait un dialogue et voulait comprendre seul les motivations du personnage, il sera frustré par cette réponse.

Je ne sais pas si je suis clair... Mais je pense qu'on est tous d'accord pour dire que les éléments purement méta non fictionnel (extradiégétique donc) sont à réduire au minimum en jdr. Je pense que c'est ce méta que les idéalistes veulent bannir Vivien mais qu'ils le confondent avec le méta fictionnel dont tu parles qui lui, est indispensable au jdr, mais doit être dosé.
Maxime (Laconfir)
 
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Re: Le jeu de rôle, art méta-fictionnel par excellence

Message par Mangelune » 21 Août 2015, 12:38

Oui, comme toujours le risque de dériver sur des questions de définition est grand (cf. les podcasts de la Cellule hein ;))

A mon sens le méta-fictionnel est nécessairement extra-diégétique mais tout ce qui est extra-diégétique n'est pas méta-fictionnel (ahhhhh ma tête !).

* L'intra-diégétique, ce sont tous les éléments internes à la fiction effectivement : en jdr, cela comprend en gros ce que mon/mes personnages disent par ma bouche (que ce soit au style direct "Rendez-vous monseigneur" ou indirect "Et là je lui dis de se rendre, avec classe et désinvolture"), les descriptions de lieux et d'actions, les pensées énoncées ("mon personnage commence à flipper, il se dit qu'il aurait mieux fait de rester chez lui").

* L'extra-diégétique, c'est ce qui est extérieur à la fiction :
- ce qui touche aux mécaniques de jeu : "Je fais un test de Bagarre ?", "Vas-y lance les dés pour voir", "T'as combien en TACO ?", "Prends un point d'immersion négative saligaud", "10 ! Dans ta face !"
- mais aussi ce qui touche aux relations sociales entre joueurs et n'a aucun rapport avec la fiction : "La pizza est prête !", "Vire ton coude de mes omoplates steplait", "on rejoue quand ?", "z'avez vu le dernier James Bond ?"
- et on a le méta-fictionnel : sous forme de suggestions, d'hypothèses et/ou de jugements "ce serait trop drôle si en fait c'était lui le meurtrier", "tu veux vraiment faire ça ?", "C'est débile, jamais ton perso il agirait comme ça normalement", "Bien ouej mec", "Tiens prends mon dé, j'ai trop envie que ça aille dans ce sens", "Je parie que derrière on va trouver le cadavre de la vieille", etc.

* Des exceptions : après bien sûr, on a des zones plus floues dues à la séparation pas si stricte que çà entre joueur et personnage. Si un joueur un peu tendu s'exclame "Oh putain oh putain", on sait plus trop si c'est le joueur qui parle ou son perso (a priori un peu des deux).

Pour moi les idéalistes veulent bannir tout ce qui est extra-diégétique (y compris les discussions méta), ce qui est une erreur. C'était notamment le principe de l'immersion dans Sens, avant d'être modifié par son propre auteur. Ce que j'aimerais établir, c'est pas qu'il faut réduire l'extra-diégétique, juste se rendre compte qu'il en existe de plusieurs sortes et l'accepter comme une dimension positive tant qu'elle reste n'étouffe pas le reste.
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Re: Le jeu de rôle, art méta-fictionnel par excellence

Message par Maxime (Laconfir) » 21 Août 2015, 12:58

Ok, je comprend mieux ton propos et je ne peux aller que dans ton sens.

Maintenant la grande question: c'est le rôle de qui de réguler le niveau de méta ? L'auteur via le jeu ? Le MJ ? La table ? Les joueurs ? Le contra social ? Un peu tout le monde ?

J'ai l'impression que plus ça va aller, plus avant de faire une partie de jdr on va discuter 2h de ce qu'on attend et définir notre contrat social. Ensuite on passera également 1h à débrieffer les parties, du moins en vue d'une campagne...

Remarque j'ai expliquer les règle d'un jeu à sortir à mes joueurs Mardi et ça nous a prit 4h de discussion autour, au final on a pas joué, mais ça restait cool et les choses sont maintenant clairs...
Maxime (Laconfir)
 
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Inscription : 23 Août 2013, 20:50

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