[La Cause] Crashtest : Les Etats-Unis Noirs d'Amérique

Où on cause des jeux à venir sur Rose des Vents et de ce qui gravite autour

[La Cause] Crashtest : Les Etats-Unis Noirs d'Amérique

Message par Morgane » 20 Déc 2015, 20:23

Ce week-end, avec Jérôme et Gaël, on a crashtesté le jeu dont j'avais un peu parlé chez Fred : La Cause.
L'idée, c'était de faire un jeu "boite à outils", donc modulable, autour des idées révolutionnaires, de l'impuissance et des choix d'une vie destinée à changer le monde.

Sans plus attendre, le rapport de partie (en plusieurs morceaux pour faciliter la lecture)

I La création de personnages

Choisir le contexte : nous décidons de jouer dans un contexte historique contemporain : les manifestations et événements qui ont suivi l'affaire Rosa Park aux États-Unis. Martin Luther King, les Blacks Panthers, Nixon, l'appartheid, etc.

Notre Cause : Établir des États-Unis noirs d'Amérique.

Gaël joue Calvin Johns : 33 ans, bluesman noir et évangéliste.
Musicien de talent, un peu à part dans sa propre communauté, il rêve d'universalité.
Il choisi de défendre la Cause pour que la culture noire acquiert son indépendance, afin que la musique noire soit internationalement reconnue.
Archétype : visionnaire

Le jeu demande de mettre 9 traits dans 4 Atouts pour compléter le personnage. Ces traits représentent des attaches, des valeurs, et peuvent être sacrifiés durant certaines phases de jeu. On y reviendra. Plus un Atout est riche de traits, plus il est important dans l'attitude et la psychologie du personnage.

Conscience (l'attention portée aux autres, l'empathie) : révélateur de talents, métissage
Conviction (la force de volonté, la flamme, le charisme) : Martin Luther King, la liberté, la télévision
Aura (l'influence, la reconnaissance) : musicien, Dieu, mouton noir
Estime (le respect des lois, les valeurs morales, l'éthique) : Milène (le personnage de Morgane)

Jérôme joue Michelle Reese : jeune femme blanche de 26 ans, diplômée de lettres, fille de bonne famille évangéliste mais athée, petite amie d'Abraham (un jeune homme noir).
Son petit ami a été arrêté injustement et est actuellement en prison.
Elle a choisi de défendre la Cause pour mettre fin à la domination blanche qu'elle déteste et pouvoir vivre sa vie avec Abraham.
Archétype : rebelle

Conscience : Abraham, ma condition de femme, la police
Conviction : Nixon
Aura : diplomée, famille fortunée
Estime : non-violence, les USA, Martin Luther King

Morgane joue Milène Johns
: jeune étudiante noire en lettre de 20 ans, elle est la sœur de Calvin et vient d'une famille d'anciens récolteurs de coton. Sa famille est évangéliste mais elle est athée.
Elle a été très marquée par les discours de Martin Luther King et sent bouillonner une envie de changement à laquelle elle veut prendre part.
Elle veut défendre la Cause pour en finir avec l'égalité afin que son peuple vive libre et soit reconnu comme l'égal des autres.
Archétype : iconoclaste

Conscience : Mon frère Calvin, ma communauté, Rosa Park
Conviction : le président américain, mon envie de changement, le discours de Martin Luther King
Aura : mes études de lettres
Estime : ma famille, le pasteur du quartier

Retour sur la création de personnage :

Elle donne des personnages assez complets et subtils en une demie-heure de temps. Le plus long et difficile est sans doute d'attribuer des traits dans les Atouts car ils peuvent être positifs (mon envie de changement) ou négatifs (la police), actifs (révélateur de talents) ou passifs (famille fortunée). Il faut tenir compte que leur nombre dans un Atout influence la psychologie du personnage.
Jouer dans un contexte réel (historique ou contemporain) nécessite aussi d'accorder les violons sur quelques évènements et personnalités afin d'avoir un background évocateur pour tout le monde. Mais il faut bien préciser qu'aucun de nous n'était vraiment spécialiste de la période choisie !

Ce que j'en tire : rien à ôter ou à rajouter de mon point de vue mais par contre il faudra absolument donner des exemples détaillés dans le livre de règle pour aiguiller les joueurs sur le contenu des traits qu'ils peuvent mettre.
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Re: [La Cause] Crashtest : Les Etats-Unis Noirs d'Amérique

Message par Morgane » 20 Déc 2015, 20:44

Module 1 : Ordre du jour

Ordre du jour est la première réunion des personnages, celle dans laquelle ils vont décider des actions à mener, des précautions à prendre, de l'implication de leurs proches et des moyens à mettre en œuvre.

Calvin est élu chef de séance.
A l'issue de la réunion, le groupe a décidé ce qui suit :

Le groupe s’appellera les Blacks Phoenix et l'oiseau noir deviendra son symbole. Le signe de reconnaissance consiste à rajuster son col avec fierté.
5 actions sont décidées (ainsi que le demande le jeu) :
- Organiser une grève générale
- Repeindre la state de la liberté en noir
-Saboter systématiquement toute action demandée par un fonctionnaire (travaux publics, procédure de justice, action de police, etc)
- Assassiner Nixon
- Prendre le Mississipi et le déclarer Etat indépendant.

Chaque joueur décide de deux moyens nécessaires à l'accomplissement de ces actions :
Milène : des imprimeries clandestines et la diffusion de tracts, la population noire de toute origine.
Michelle : le milieu universitaire, les communistes
Calvin : les alliés français (après mai 68) et un grand festival de musique noire

Tous ces points sont décidés et débattus au fur et à mesure ainsi que d'autres. Les actions et les moyens serviront aussi dans les modules suivants. Ils sont notés sur des post-it.

Retour sur Ordre du jour :

Clairement, le module dont je suis le moins satisfaite. Comme dans les jeux sans univers, il consiste surtout à définir l'univers, à ceci près que la création est intradiégétique et qu'elle permet de tisser d'emblée des liens entre les personnages, de poser des attitudes et des relations.
Gaël soulignait à raison que l'absence de résistance (liée au format freeform) rend le module assez mou.
En fait, cette situation vient du fait que nous étions 3, et que le système d'opposition prévue par le jeu n'a pas été utilisé. 1) Parce que Jérôme a décidé de ne pas y faire appel quand il le pouvait. 2) qu'à 3, le rapport de force s'établit très vite et qu'on n'a pas besoin d'user de la mécanique de "clans" que le jeu propose. Il faudrait un playtest avec plus de joueurs pour que la mécanique qui consiste à sacrifier des attaches pour remporter des voix soit mise à l’œuvre.
Jérôme notait que cette mise en contexte des personnages (eux-même sont assis autour de la table pour débattre) était plutôt efficace.

Ce que j'en retire : Ce module va vraiment nécessiter d'autres playtest, pour dégager ce qui est de l'ordre de (l'absence de) système et ce qui revient à notre dynamique personnelle. La résistance existe et on ne s'en est pas servi. Impossible donc de savoir si elle fonctionne correctement. Pour l'instant, je ne veux pas mécaniser outre-mesure un débat.
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Re: [La Cause] Crashtest : Les Etats-Unis Noirs d'Amérique

Message par Morgane » 20 Déc 2015, 21:09

Module 2 : L'heure H

Avec l'Heure H, on joue la dernière heure de l'ultime mission qui vire au cauchemar. Sommes-nous prêts à aller jusqu'au bout ?

La partie se joue avec un minuteur réglé sur 1 heure. Il nous faut choisir, dans les actions décidées au module précédent, celle qui nous semble la plus périlleuse et capitale. On s'entend sur la prise du Mississipi.Ensuite, on décide parmi nos 6 moyens d'actions de ceux qui seront affectés à cette mission : le festival, les alliés français et la foule.
A l'issue du Module 1, nous avons voté pour désigner le personnage qui nous paraissait le moins investi. C'est tombé sur Michelle. Pour ce module, Jérôme sera donc le MJ, que je jeu appelle le Système.

Le but du module est assez simple : le Système pose une situation de base qui tourne mal et lance le chrono. Chacun de nous décrit ce qu'il fait. Tant que le système estime que nous restons dans les clous, nos actions réussissent. Si nous décidons d'aller contre le Système, il nous fait un rappel à l'ordre. Si nous persistons alors nous entrons frontalement en opposition.
En nous appuyant sur les post-it devant nous, nous lançon un dé : pair est une réussite (et nous prenons l'avantage temporairement) et impair un échec (le système peut nous faire souffrir mais jamais nous tuer)
Sacrifier des attaches nous permet de relancer le dé ou d'obtenir une réussite automatique. Mais ces attaches sacrifiées sont toujours données au Système qui pourra les utiliser contre nous quand il le souhaitera.

Pour atteindre le gouverneur et le faire abdiquer, un grand festival de musique est organisé dans la ville. Il y a beaucoup plus de monde qu'escompté et la foule se masse dans les rues. Milène apprend que Michèle a été prise par la police alors qu'elle devait coordonner les actions des français.
[Début du compte à rebours]
Finalement, la mission tournera à l'apocalypse. Refusant de céder à la police, Calvin déclenchera une émeute tandis que sa sœur grimpe sur un toit et arrose les forces de l'ordre avec un automatique. La manifestation s'envenime. Calvin retrouve des partisans, les étuis de guitare libère des armes à feu. Milène se procure des coktails molotov pour faire paniquer la garde massée devant l’hôtel du gouverneur tandis que Calvin pénètre à l'intérieur avec des black phœnix en arme. Il lui faut user de toute sa diplomatie pour éviter que les enfants et la femme du gouverneur ne soient tués. Milène échappe à la garde en tuant un militaire au couteau. elle se précipite dans l’hôtel où Calvin rechigne à abattre le gouverneur. Comme le politicien refuse de céder et que son frère hésite à passer à l'acte, la jeune femme achève le gouverneur d'une balle dans la tête.
[Fin du compte à rebours]

Finalement, Milène a dû sacrifier (entre autre) toutes ses attaches en Estime pour garder prise sur le cauchemar et Calvin a renoncé à son utopie de métissage, à la considération de ses proches et même à Dieu pour tenter d'endiguer la catastrophe.

En vain. Au terme du chronomètre, nous sommes tous d'accord pour avouer que cette mission fut un échec. Nous décrivons les premières minutes qui suivent cette terrible prise de conscience.

Retour sur le module II :

Il a remarquablement mieux marché que ce à quoi je m'attendais. Je ne remercierai jamais assez Steve pour son aide précieuse sur le système. Ce qu'il faut savoir c'est que les personnages ont à tout moment la possibilité d'abandonner pour rejoindre le système mais que cette possibilité pousse paradoxalement à aller vraiment jusqu'au bout. Le chronomètre rajoute une pression terrible qui conduit à prendre des décisions sur un coup de tête et c'est précisément ce que je souhaitais.
Il faut néanmoins que je précise certains points pour le Système : comment utiliser les post-it, comment faire intervenir son ancien personnage et que je donne des exemples concrets in-situ.
Le Système est vraiment une opposition neutre, un mur plutôt qu'un ennemi violent et c'est exactement ce que j'espérais.

Ce que j'en tire : une sacrée surprise. Le module me collait une peur bleue et finalement il a tourné sans accro, avec une tension sans cesse croissante et même des personnages qui échappent à nos propres considérations morales. J'avais peur que Jérôme soit frustré de n'avoir pas pu jouer son personnage. visiblement ce ne fut pas le cas, il en parlera mieux que moi.
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Re: [La Cause] Crashtest : Les Etats-Unis Noirs d'Amérique

Message par Frédéric » 22 Déc 2015, 14:29

Salut Morgane, c'est cool de voir cet ambitieux projet avancer ! J'en ai entendu du bien dans l'oreillette. ;)

J'ai deux questions :
1) N'as-tu pas peur que pour des personnes dans la situation que vous avez explorée, votre partie puisse sembler caricaturale, ou du moins ne pas rendre justice à une certaine minorité, ou à une certaine cause ?
Je ne dis pas que votre partie est dans ce cas, mais si je jouais ce type de combat, j'aurais peur de verser dans une simplification dommageable. C'est la difficulté majeure de la création de JdR à mon avis : soit l'auteur s'est renseigné à fond dans un domaine particulier et il bâtit son jeu autour de ces informations, soit on est obligés de laisser chaque groupe s'approprier des choses complexes sans avoir le temps de faire des recherches sérieuses sur le sujet.

2) Si l'on peut choisir librement sa cause, comment réagirais-tu à un retour de partie de joueurs qui ont utilisé ton jeu pour incarner un groupe de suprématistes, ou de défenseurs des valeurs du FN ?
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Re: [La Cause] Crashtest : Les Etats-Unis Noirs d'Amérique

Message par Morgane » 23 Déc 2015, 10:29

Haha Fred, tu me poses la même question que Jérôme il y a quelques mois (qui me suggérait Soral de son côté)

1) En réalité ce n'est pas tant le contexte ici qui m'intéresse que l'impact émotionnel. Je n'ai pas encore pris le temps de développer le troisième module (noël, noël...) mais le jeu donne des choses surprenantes. La sensation que le personnage prend son indépendance notamment.
Je ne sais pas si les garçons auront le temps de faire part un petit retour ici, mais on était tous très bouleversés à la fin de la partie. Le jeu nous avait sorti de notre zone de confort, parce qu'on s'est mis à défendre des actions, à prendre en pitié ou en admiration des parcours et des personnalités qu'on n'avait pas prévu.

Or, c'est ce que je voulais. Alors oui, peut-être que la situation fictionnelle n'est pas très fine mais celle des personnages me semble à contrario pleine de subtilités et de nuances. Il me faut d'autres playtests pour approfondir cette réfléxion.

2) Revenons en à Soral et au FN. Je crois que je serai très très mal à l'aise de voir un tel propos utilisé en jeu. Ça me ferait sans doute vraiment mal. Mais le jeu traite de l'extrémisme en règle générale. Le FN entrant dans le lot, c'est une chose possible. J'assume. (mais ça me ferait vraiment super mal à titre personnel.)
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Re: [La Cause] Crashtest : Les Etats-Unis Noirs d'Amérique

Message par Thomas Munier » 23 Déc 2015, 14:49

Et moi, je vais poser la même question mais d'une façon différente : est-ce intéressant que des joueurs qui aient des valeurs humanistes incarnent des personnages qui aient des valeurs antihumanistes ou des actions antihumanistes ? Ainsi, dans ton CR de partie, les personnages sont moins dans une dialectique d'égalité des hommes que dans une inversion du suprématisme : remplacer la domination blanche par la domination noire (avec, comme point de départ, des actions violentes, notament l'assassinat d'un homme). Mais le CR ne dit pas si les joueurs sont d'accord avec les valeurs de leurs propres personnages.
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Re: [La Cause] Crashtest : Les Etats-Unis Noirs d'Amérique

Message par Fabien | L'Alcyon » 23 Déc 2015, 16:59

Salut Morgane !

Cool de voir un nouveau projet qui se lance !

Apparemment, on vote pour déterminer qui est le moins engagé et c'est lui le MJ ensuite ? Ça fait pas trop « punition » ?

Comme Fred, je m'interroge sur la dimension potentiellement caricaturale de la fiction ainsi créée, surtout pour des luttes aux enjeux aussi importants et profonds, pour lesquels des gens sont morts. Je crois qu'il y a plus précisément deux écueils:
  • la sur-simplification: le mouvement des droits civiques et de la lutte contre le racisme aux États-Unis est extrêmement complexe, avec des positions qui souvent s'opposent, se complètent, y compris au sein de groupes qu'on penserait homogène. On peut penser à l'opposition traditionnelle entre Martin Luther King et Malcolm X, mais en réalité il y a plein d'autres groupes et positions, qui chacun me semble se tenir, avec sa propre cohérence interne. Un peu de la même manière que le féminisme français contemporain est extrêmement riche et complexe (on vit une belle époque) avec notamment des divisions profondes sur certaines questions comme la prostitution ou le voile. C'est vrai aussi dans l'opposition à un mouvement social: les racistes comme les anti-féministes ont pris des formes très diverses.
  • la vision du vainqueur: c'est courant de représenter une époque de mouvement social d'un unique point de vue. Par exemple on oublie souvent la dimension sociale et d'auto-défense des Black Panthers, pour ne les représenter que comme des radicaux violents. De même, le terme d’« extrémistes » me met mal à l'aise: on ne se radicalise qu'à proportion d'une violence sociale qu'on subit (ici le racisme institutionnalisé). Ca me semble d'autant plus important que c'est un enjeu pour la culture populaire à l'heure actuelle, par exemple le scandale autour du film Stonewall d'Emmerich qui efface le rôle des personnes transgenres et de couleurs dans les combats LGBT.
Bref, je serais partisan de
  • soit de faire un pas de côté, de parler d'un mouvement social entièrement fictif, par exemple d'une révolution sur une autre planète, ce qui te permettrait de maîtriser entièrement le contexte et d'y placer les luttes que tu souhaiterais, sans craint de caricaturer une lutte;
  • soit se fixer sur un mouvement social qui te plaît, que tu connais et sur lequel tu pourrais donner beaucoup de matériel à tes participant°e°s pour construire leur partie. Et pourquoi pas ? Ce serait chouette d'avoir un jdr où l'érudition serait orientée vers le militantisme, comme Pavillon Noir de Renaud Maroy proposait du matériel érudit sur la piraterie et la navigation ou SPIONE de Ron Edwards sur l'espionnage durant la Guerre Froide à Berlin. Je suis à ta disposition pour chercher des sources de qualité.
Au plaisir de te lire !
Dernière édition par Fabien | L'Alcyon le 24 Déc 2015, 00:10, édité 1 fois.
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Re: [La Cause] Crashtest : Les Etats-Unis Noirs d'Amérique

Message par Frédéric » 23 Déc 2015, 19:27

Haha, Fabien comme d'habitude est plus précis que moi sur ces sujets ! Merci. ;)
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Re: [La Cause] Crashtest : Les Etats-Unis Noirs d'Amérique

Message par Jiceno » 24 Déc 2015, 11:37

Je suis d'accord avec Fabien (et Frédéric). L'inspiration historique limpide me dérange à la lecture du CR, et pas dans le bon sens du terme. Je pense moi aussi qu'il faudrait opter pour un contexte entièrement fictif. Les JDR politiques tirés de faits réels existent (je pense notamment au hack de Lady Blackbird de Macbesse, qui se déroule pendant les années de plomb italiennes; https://www.dropbox.com/s/bqg601264yjpz ... 2.pdf?dl=0 ), mais ce sont des oeuvres extrêmement fouillées, signées de fins connaisseurs du sujet en question. On ne peut se permettre d'être simpliste lorsqu'on traite d'un sujet historique aussi complexe. (Au risque d'être injuste, j'ai un peu l'impression que cela revient à se réapproprier une lutte réelle et sanglante dans le seul but d'éprouver une émotion personnelle, complètement déconnectée de la réalité historique).

Ce point mis à part, ce CR est sacrément intriguant et intéressant!
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Re: [La Cause] Crashtest : Les Etats-Unis Noirs d'Amérique

Message par Thomas Munier » 24 Déc 2015, 15:59

Pour ma part, j'aurais trois choses à dire sur l'idée de permettre aux joueur.se.s de s'approprier n'importe quel contexte, historique ou imaginaire :

1. L'intimité créatrice. Le fait que "Les Etats-Unis Noirs d'Amérique" soit l'objet d'un compte-rendu de partie nous apporte un biais d'analyse : au départ c'est une partie où le seul public, ce sont les joueur.se.s. S'ils sont d'accord pour aborder un contexte historique complexe sans en maîtriser toutes les clés, quel problème cela leur pose-t-il ?.
2. Du moment qu'elle se déplace des manuels vers une partie de jeu de rôle, l'histoire devient de l'imaginaire. Les problèmes de précision historique se posent différemment.
3. En choisissant de mettre en scène la création l'assassinat d'un gouverneur et la création d'un Etat Noir, il me semble que les joueur.se.s ont d'emblée choisi de quitter l'histoire pour aller dans l'uchronie. En jeu de rôle, l'histoire devient l'uchroni

4. Dans 1-2-3, je prends le point de vue des joueur.se.s. Pour l'auteur-trice, les choses sont différentes. Dans un jeu de rôle politique, si l'auteur-trice veut présenter plusieurs settings, alors en rédigeant un setting historique (pas de surnaturel, pas d'uchronie), peut se sentir une responsabilité d'exactitude et de précisions, et également citer ses sources.
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Re: [La Cause] Crashtest : Les Etats-Unis Noirs d'Amérique

Message par Morgane » 25 Déc 2015, 16:26

La question est capitale et à dire vrai, je ne sais pas comment y répondre. Le jeu ne prévoit pas que la partie soit nécessairement historique. Pour le moment, il indique : historique, contemporain ou fictif. Je ne sais pas. Vous avez raison, je partage votre avis sur la simplification de l'histoire. Je crois que ce n'est pas clair pour moi. Je voulais surtout tester les mécaniques.

J'en finis donc avec ce CR et on revient à la conversation ensuite pour que tous les éléments soient posés (l'occasion pour moi aussi de réfléchir à ce que vous écrivez :) La question est trop importante à mes yeux. Je crois que Thomas saisi bien mes intentions dans son message du dessus. Ce jeu n'a pas pour vocation de sortir du privé ni de ré-écrire l'histoire. Mais j'ai bien conscience qu'en donnant cette opportunité aux joueurs, on s'approche d'une pente délicate que je ne sais pas comment aborder là tout de suite.)

En avant donc pour le...

Module III : Au bout du compte.


Un historien convie, 30 ans après, les participants à témoigner de leur expérience. Il leur explique en parallèle ce que l'histoire a retenu et modifié de leurs actions, motivations et engagements.

Il serait très difficile de vous raconter le contenu fictionnel de ce module, beaucoup de petites choses fortes mais diffuses. Pour simplifier, le groupe apprendra donc que
- Calvin est devenu auteur de livres après la prison pour parler de son idéal d'universalité. Il ne renie pas ce qu'il a été obligé de faire mais s'en détache désormais.
- Milène est en résidence surveillée. Elle ne regrette rien et regarde le passé avec fierté. Mais ses proches ne se sont jamais remis de ses actions.
- Michell garde un profond sentiment de culpabilité, et apprend que l'histoire parle d'elle comme d'une espionne qui aura finalement permis l'échec de l'insurrection.

On s'est partagé le rôle de l'historien, piochant tour à tour des post-it dans les attaches, les actions et les moyens pour questionner les autres joueurs sur leur vision des choses. L'historien demande toujours, après avoir expliqué "le regard de l'histoire", si les personnages souhaitent que cette vision soit conservée ou qu'il apporte des corrections.

Retour sur le module III


Si ce rôle tournant permet d'avoir des questions et des approches différentes, il a le défaut d'empêcher des confrontations entre les personnages si l'un d'eux est réquisitionné par le rôle de l'historien. Ça aurait pu clasher assez fort entre Michell et Milène et ça n'a pas pu avoir lieu, ce qui est très dommage.

Par contre, on a obtenu un résultat étonnant. On a tissé des relations très fortes avec nos personnages respectifs et, bien que nous soyons parfois en désaccord profonds avec eux, on y était très attachés. Le fait que l'historien apporte un biais objectif est un élément à conserver selon moi. Il peut donner une profondeur supplémentaire à ce qui serait sinon une simple séance de psy.

Ce module III (un peu comme le I) devient une sorte de debriefing intradiégétique.

Ce que j'en retiens : le système doit être encore plus mécanisé. Il s'inspire directement des Petites Choses Oubliées mais peut être encore amélioré. En rendant le rôle de l'historien parfaitement mécanique (un protocole à suivre) pour permettre aux joueurs d'être toujours leurs personnages et leur donner l'opportunité de s'opposer en permanence. Avec une technique de phrases clés, que j'affectionne beaucoup, on doit pouvoir engendrer des résistances efficaces. [J'aimerais ajouter quelque chose, je n'ai pas vécu la chose de cette façon, etc...]

Retour global sur le jeu

J'appréhendais beaucoup ce playtest. A la fois parce que c'est le premier jeu que j'écris qui se teste en live -et ce n'est pas rien- et ensuite parce que gérer 3 approches, et donc 3 systèmes, était une première. Je n'avais jamais écris de système aussi mécanique que le module II. Il me terrifiait.

Globalement, ça s'est bien passé. Et même beaucoup mieux que ce que j'espérais. Le jeu tourne mais il a des écueils plutôt bien identifiés maintenant. Le module II est un succès étonnant à mes yeux. J'imaginais La Cause comme une boite à outils. En réalité, dans les faits, c'est un seul et unique jeu avec un prologue et un épilogue.
En fait, j'ignore si ça me convient ou si ça doit/peut être modifié. D'autres playtests seront nécessaires pour savoir si j'ai bien 3 modules ou juste 3 chapitres. Cet effet de brief intradiégétique n'était pas prévu. Je n'en suis pas si contente que ça. Mais je pense que cela tient au système bancal des modules I et III.

Il y a eu un de ces silences à la fin de la partie... On était tous plutôt secoués et il a fallut quelques minutes pour digérer. On a tous noté cette impression : "Le personnage prend son indépendance." On avait beau partir avec une idée précise de ce qu'on imaginait jouer, on se retrouvait à soutenir des actions et des idées qui étaient à mille lieues des nôtres habituelles. C'est assez étonnant et très intéressant. J'en suis venue à admirer Milène que je ne soutiens pourtant pas du tout.
Je craignais une posture d'auteur trop présente. Je crois qu'il n'en est rien. J'apprécie aussi beaucoup l'influence qu'ont eu les personnages les uns sur les autres tout au long des modules.

Donc c'est mécaniquement et émotionnellement prometteur. J'aime bien finir un jeu et entendre "Attends, faut que je digère".

On va pouvoir en revenir à la présence de l'histoire en jeu de rôle. Je réfléchis à ce que vous dites et je reviens très vite. En attendant, sentez-vous libres de continuer à critiquer et questionner. Vous avez tous les évènements sous les yeux maintenant !

Edith. j'ai oublié de te répondre à propos de la punition, Fabien : en fait l'effet "punition" est voulu. Je voulais que le joueur du Système ai ce passif avec ses anciens camarades. Jérôme ne s'est néanmoins pas senti privé ni puni -juste, les règles ne sont pas assez claires sur la façon dont il peut faire intervenir son personnage- J'avais la même crainte que toi. Ça a bien fonctionné pourtant. Mais c'est pareil, c'est à tester dans d'autres conditions pour savoir si c'est vraiment efficace ou si ça peut être castrateur.
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Re: [La Cause] Crashtest : Les Etats-Unis Noirs d'Amérique

Message par Mangelune » 25 Déc 2015, 21:07

Juste pour dire que je rejoins relativement Thomas sur le coup : il ne faut pas confondre intimité d'une partie, dévoilée de façon artificielle lors d'un CR, et message porté par le jeu. A moins que l'objectif de toi, auteure, ne soit autre bien sûr, mais dans ce cas c'est une question de positionnement, pas de valeur morale.

De plus, le cinéma et la littérature nous ont souvent offert de très bonnes œuvres sur des sujets graves en se permettant de gros raccourcis au nom de "l'art cinématographique", et je ne vois pas pourquoi le jdr devrait se montrer plus timoré, plus "responsable", que ses prédécesseurs.

Après sur le jeu en lui-même, j'ai beaucoup de mal à visualiser vraiment l'ensemble à partir de CRs, si tu veux un avis sur lecture un de ces quatre Morgane je suis partant.
Contes et histoires à vivre, un site pour parler des Errants d'Ukiyo, de Perdus sous la pluie et du reste.

Pensez aussi à la page Facebook officielle de Perdus sous la pluie.
Mangelune
 
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Re: [La Cause] Crashtest : Les Etats-Unis Noirs d'Amérique

Message par Steve J » 29 Déc 2015, 20:35

Content d'avoir pu t'aider sur les mécaniques du deuxième module (surtout que cela a apparemment bien fonctionné).

Quelques remarques sur le partage des responsabilités entre les joueurs et les auteurs de jeu.
C'était l'un des sujets d'une des conférences des Utopiales où intervenait Eugénie. Elle y faisait une remarque qui m'avait bien plu en disant qu'en tant que joueuse elle appréciait de prendre sa part de responsabilité dans l'échec (ou la réussite) d'une partie.
Je vais dépasser le cadre de cette vidéo (et donc son discours) mais il me semble qu'on pourrait étendre cette idée aux propos de la partie. Plusieurs jeux amènent d'ailleurs les joueurs à choisir les thématiques autour desquelles ils souhaitent jouer (c'est par exemple le cas de Shock).

Il y a au passage un enjeu parce que, comme le signale Thomas, l'intimité de la partie permet d'expérimenter en se posant moins de questions (de respectabilité, de bons goût, de manipulation).
Évidemment dans ton jeu final tu proposera sans doute des cadres jeux spécifique ce qui ne fait que décaler la question mais bon...

Au passage Jason Morningstar a proposé pas mal de jeux utilisant des problématiques tirées du monde réel (et se rapportant à des enjeux encore importants aujourd'hui).
Dans certains de ses jeux il utilise tel quel le cadre réel (par exemple ici dans ce jeu où l'on incarne des volontaires de retour du Burkina Fasso) et dans d'autre il décalque une situation réelle sur un cadre fictif.
Ainsi son jeu 'Terps est un jeu de Sf qui parle en fait de la guerre en Irak (et qui l'indique aux joueurs) et son Duranceévoque les massacres des aborigènes).



Sinon je pense qu'il faut reformuler la question de savoir si cela pose un problème que ton jeu soit utilisé par des amateurs d'Alain Soral.
La vraie question c'est de savoir si son système soutient leur point de vue.

En l'état ton jeu met les joueurs dans une situation où l'action violente ne permet d'aboutir à une victoire qu'en abandonnant ses idéaux. Cela ne me semble pas très soralien...
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Re: [La Cause] Crashtest : Les Etats-Unis Noirs d'Amérique

Message par Frédéric » 29 Déc 2015, 22:42

Morgane : comprenons-nous bien, tout cela n'est qu'une question de positionnement d'auteure :
- Soit tu considères que ce n'est pas grave qu'une table massacre des idéaux ou des combats majeurs de notre société, soit tu considères que c'est important que ça n'arrive pas (ou du moins que ça n'arrive pas si l'on respecte tes règles).

Je sais que pour moi c'est un élément important si je me penche sur un jeu qui parle d'activisme et Monostatos est un parfait exemple de jeu qui oriente efficacement les enjeux politiques qu'il aborde.

Fabien t'a déjà listé des approches dans ce sens. Tu peux aussi te contenter de définir l'oppresseur (Guy Debord dirait la bourgeoisie, John Stoltenberg dirait la blancheur et la masculinité...) de cette manière tu pourrais laisser les joueurs créer une cause fictive (dans un univers fictif) face à des oppresseurs connus et identifiables, que tu pourras développer suffisamment pour donner de l'épaisseur à ta création et aux combats qui seront abordés.

A toi de voir ce que tu en fais et quel est ton niveau d'exigence.
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Re: [La Cause] Crashtest : Les Etats-Unis Noirs d'Amérique

Message par Schultz (Jérôme S.) » 02 Jan 2016, 19:39

Salut tout le monde ! J'avais pas vu ce CR, alors j'arrive un peu après la bataille, mais me voilà enfin. Très beau CR très détaillé d'ailleurs, bravo Morgane.
J'ai relu le fil une seconde fois pour être sûr de ma réponse, mais en fait beaucoup de choses ont déjà été dites.

Après avoir fini de taper tout ça, je me rends compte que c'est très long, donc je vais couper ça en deux : une première partie sur le jeu en lui-même, et une autre sur le problème "politique".

Morgane a écrit :Le signe de reconnaissance consiste à rajuster son col avec fierté.

En tant que fan de Cantona, je ne pouvais que valider. (oui bon ça n'a rien à voir avec la choucroute ^^)


Parlons sérieusement maintenant : j'ai beaucoup aimé cette partie. Le premier module et le dernier, faisant office de création d'univers et de débriefing à l'intérieur de la fiction, j'ai trouvé ça cool. Je ne sais pas comment ça marche dans l'Agence, que je ne n'ai pas encore testé, mais ça donne envie de s'y essayer. (Je rappelle que dans l'Agence, on prépare la future mission dans une scène où l'on joue son personnage)

Effectivement, je n'ai pas utilisé le système de résolution pour influencer la fiction dans mon sens lors du premier module. Pour mon personnage, l'assassinat de Nixon et la prise du Mississipi (d'ailleurs, pour préciser un peu, le projet des révolutionnaires dans cette partie n'était pas d'inverser la suprématie en mettant les noirs au pouvoir, mais de donner à ces derniers un état dans lequel ils pourraient vivre sans la domination blanche, en s'auto-déterminant quelque part. Je crois que la phrase "ça a bien été fait pour Israël après la guerre" a été prononcée. Ou alors je l'ai pensée très fort.
Le Mississippi semblait un territoire tout indiqué comme réparation pour l'esclavage. Ça change pas grand chose non plus, mais je tenais à le préciser, surtout après le premier commentaire de Thomas. De plus, je précise que le jeu demande clairement à la fin si les joueurs sont d'accord avec les valeurs de leur personnage, même si le CR n'en dit effectivement rien ici.
Pour le coup, je peux le dire : j'ai été le seul à hésiter avant de répondre "non" à la question "êtes-vous en accord avec ce qu'a fait votre PJ dans la partie et ses convictions"...

J'insiste sur le point que Morgane a soulevé ici :
Morgane a écrit :On a tous noté cette impression : "Le personnage prend son indépendance." On avait beau partir avec une idée précise de ce qu'on imaginait jouer, on se retrouvait à soutenir des actions et des idées qui étaient à mille lieues des nôtres habituelles. C'est assez étonnant et très intéressant. J'en suis venue à admirer Milène que je ne soutiens pourtant pas du tout.


Il y a un réel sentiment que le personnage nous échappe. Je ne sais pas d'où ça vient exactement, peut-être le coté "arbitraire" de certaines mécaniques qui poussent le joueur à partir dans une direction qu'il n'avait pas envisagé. Ça a été mon cas lorsque j'ai été choisi pour représenter le système, j'avais un peu zappé cette possibilité et j'avais joué le module 1 comme si cela ne pouvait pas m'arriver.

Du coup, en me retrouvant MJ, j'ai dû de suite changer mon fusil d'épaule pour le module 2 concernant mon personnage. J'me suis dit que ça pouvait être sympa de laisser une première porte ouverte, alors j'ai juste dit que Michelle s'était faite arrêter. Honnêtement, je pensais que peut-être les PJ allaient essayer de le tirer d'affaire avant qu'elle ne parle, ça me semblait cool. Finalement, avec la panique qui a pris très vite dans la fiction, la question ne s'est pas posée. Michelle avait avoué.
À partir de ce moment là, c'est à dire presque dès le début du module 2, je n'avais qu'une hâte : arriver au module 3 pour voir comment Michelle encaisserait ça finalement.

Parlons-en, de ce moment où Michelle a été désignée comme la moins impliquée. Ça fait toujours un peu bizarre, hein, je vais pas le nier. Perso, ça m'a fait un peu l'effet du moment dans une partie de Loup-garou de Tiercelieux où on apprend qu'on a été désigné par les loups et qu'on est mort. Sauf que là, je savais clairement pourquoi ça m'arrivait. La comparaison vaut ce qu'elle vaut mais bon...
Pour le coté punition, je pense que bien préciser que devenir le MJ si on joue le perso un peu timoré avant la partie suffit, en fait. Je pense même que certains joueurs pourraient en jouer volontairement. Et puis ça donne un passif, comme disait Morgane. Un petit coté "ah ouais, vous m'avez giclé ? Vous allez voir comment vous allez prendre cher les cocos".

Au final ça ne m'a pas dérangé, j'ai juste été un peu pris au dépourvu. Je crois que ça s'est senti un peu au début. D'ailleurs, pour poser ma situation incontrôlable, j'ai eu recours un chouïa à la technique du retour de questions (j'appelle ça comme ça là,mais ça a un nom "officiel", ce genre de masterisation à la Lady Blackbird ou 1e partie d'Apocalypse World où on pose des questions aux joueurs ?).
Les 20 premières minutes m'ont paru interminables, je ne saurais dire dans quel sens du terme. J'avais l'impression que je pouvais broyer les PJ à tout moment et je me suis un peu retenu à cause de ça je pense. Je dis tout ça avec le recul, sur le coup c'était vraiment le "feu de l'action". Je me rappelle m'être dit "ouf, un tiers de passé" et juste après "mais c'était long j'ai trouvé, comment je vais tenir encore 40 minutes ?".
Mais c'était sans compter sur Morgane et Gaël, qui voyaient le compteur tourner également. C'est vers là que Calvin a commencé à sortir ses gars et à avancer promptement vers le palais du gouverneur, et que Milène s'est mise à courir dans les rues, fusil automatique à la main, en mode "MERDMERDMERDMERD...". J'ai adoré ce moment, je m'en suis donné à cœur joie : civils mis en danger, milice qui repousse les manifestants, gouverneur qui s'isole...
Et le dernier tiers a été frénétique. Le compteur défilait, et Morgane et Gaël sachant que la situation n'allait clairement pas vers une réussite de l'opération, les actions se sont enchainées sans que l'on puisse réfléchir à ce qui se passait. J'ai trouvé ça vraiment cool, il y avait vraiment cette sensation des moments où tout part en vrille et où finalement on se demande ce qu'on fout là : ne pas se lever ce matin nous aurait fait du mal, mais se retrouver dans cette situation encore plus.
J'étais vraiment en empathie pour les PJ (malgré la pression que je leur mettait) et je me suis demandé à un moment si l'un d'entre eux n'allait pas finir par se mettre en boule et à pleurer.
Morgane m' fait la remarque "je t'ai vu, espèce d'anarchiste, essayer de nous faire gagner" après la partie ;) . J'aurais peut-être pu être agressif plus tôt en effet, je ne sais pas... Bref.

Ce module 2 a bien fonctionné à mon goût, malgré son aspect simple. C'est cool.

À propos du module 3 :
Morgane a écrit : Ça aurait pu clasher assez fort entre Michelle et Milène et ça n'a pas pu avoir lieu, ce qui est très dommage.

Mais oui, quelle déception ! Je dis ça mais c'était cool quand même. Seulement, il aurait fallu que Gaël, quand est venu son tour de jouer l'historien, décide de nous interroger là dessus. Et ça, malgré le système de post-it comme suggestion de thème à l'historien, on a pas réussi à le faire. Et vu le nombre de tours de jeu, j'aurais eu peur d'imposer une question qui concerne mon perso à Gaël qui voulait peut-être creuser autre chose en tant qu'historien. Du coup je n'ai rien dit sur le moment.


Pas grand chose à dire là tout de suite sur le jeu et la partie en elle-même, si ce n'est que je kiffe La Cause. Bon après, je suis pas tout à fait neutre dans l'histoire, vu que j'ai pas mal participé, indirectement, à sa conception. C'est un peu de l'adoption : ce n'est pas mon enfant, mais il y a quand même une partie de moi en lui ^^. Enfin, c'est un ressenti perso, parce que Morgane a tout fait au final, hin...
Podcasts amateurs et pleins de spoilers sur Sens : http://desrolistesdanslacave.fr/
Schultz (Jérôme S.)
 
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