[It Was A Mutual Decision] Edouard et Gemma

Pour le développement de vos jeux ou pour discuter de théorie

[It Was A Mutual Decision] Edouard et Gemma

Message par Fabien | L'Alcyon » 11 Mai 2016, 20:52

Le week-end dernier à l'occasion d'une rencontre rôliste, nous avons testé It Was A Mutual Decision de Ron Edwards, dans lequel on joue un couple hétérosexuel qui se sépare, chacun des membres pouvant se transformer en terrible rat-garou (oui).

Pour donner un peu de contexte, le jeu a été écrit à l'origine en 2005 pour accompagner les Ronnies, un « concours » de création de jeux de rôle sous la contrainte d'une durée limitée (24h à quelques jours) à partir de quelques termes (le principe depuis a essaimé largement chez nous avec le Game Chef); les termes qui ont inspiré ce jeu sont « girlfriend » et « rat ». Comme Ron Edwards était également l'organisateur et un des juges de l'événement, son jeu n'était pas en lice mais accompagnait les autres.
Ce jeu est aussi une réponse un peu trash à Breaking the Ice d'Emily Care Boss, dans lequel on joue les trois premiers rendez-vous d'un couple qui se forme, traduit en France par la Boîte à Heuhh (site originel, fiche du GRoG, podcast de la Cellule, rapports de partie). Si Breaking the Ice jette un regard tendre sur le couple, It Was A Mutual Decision en a une approche beaucoup plus amère, voire critique, remettant en cause ses normes et ses codes (je reviendrai à cette question).

Une dernière particularité saillante de It Was A Mutual Decision, c'est que le jeu demande aux joueurs de jouer la femme du couple, et aux joueuses de jouer l'homme du couple. Gardez ça à l'esprit.

La partie
Mise en place
Nous avons donc joué samedi soir dernier, de 20h à minuit. Nous étions 6: Chloé, Maud, Cécile, Vivien, Maxime et moi.
Précision: nous avons joué dans une grande avec une table de Les Cordes Sensibles à proximité. Je pensais que l'aspect intimiste nous permettrait de partager la même pièce, mais notre niveau sonore a finalement explosé et pour ne pas déranger nos voisins, nous avons dû déménager vers une petite pièce beaucoup moins confortable où le son résonnait, ce qui a sans doute diminué notre plaisir de jeu.

J'avais poussé pour avoir à peu près autant de joueuses que de joueurs (il y avait de nombreux volontaires des deux sexes) et chaque groupe s'était placé d'un côté de la table, avec la feuille entre nous. Le jeu n'impose pas ces deux contraintes, mais il suggère tout de même fortement la seconde (la feuille de personnage est la même pour les deux personnages et se place entre les deux groupes, chacun écrivant sur son côté).

La création de personnage est rapide: on donne un nom, un style et un réseau de relations à chacun des personnages.
Chloé, Maud et Cécile jouaient Edouard, un prof de philo peinard et amateur de musique.
Vivien, Maxime et moi jouions Gemma, une métalleuse jouant dans un groupe de musique.

On doit raconter comment nos personnages se sont rencontrés et pourquoi ils sont ensemble (d'après leurs familles et leurs amis). Le jeu invite à ce que ce soit « mielleux et à l'authenticité douteuse ». Nos personnages se sont rencontrés lors d'un concert du groupe de Gemma. Leurs regards se sont croisés au milieu de la foule et ils se sont immédiatement plu. Selon leur entourage, ils sont ensemble parce qu'il lui apporte de la stabilité et elle lui apporte de la liberté fougueuse.

Chaque personnage a trois caractéristiques: Dépendant, Borné et Confiance (je ne peux pas détailler leur fonctionnement, mais les deux premières caractéristiques servent à agir, la troisième est une jauge qui booste les deux précédentes). Elles sont déterminées en lançant des dés (à six faces) successivement jusqu'à ce que les chiffres 1, 2, 3, 4, 5 et 6 soient répartis dans les caractéristiques des deux personnages.
C'est entièrement aléatoire et donc la situation que nous avons eue était due à la chance: Gemma avait Dépendant 4, Borné 5 et Confiance 6, tandis qu'Edouard avait Dépendant 2, Borné 1 et Confiance 3. Gemma était donc nettement avantagée; dans beaucoup de jeux de rôle (comme Dogs in the Vineyard) un personnage plus puissant que les autres n'est pas un problème, mais là... on verra que ça a aussi influencé sur la partie. D'après l'auteur non plus ça ne devrait pas poser de problème.

Déroulement et construction de la fiction
Le jeu se déroule scène par scène, racontées ensemble par les deux groupes.
Il y a trois grandes phases: d'abord la phase Avant où les scènes sont des disputes entre les deux personnages, puis la phase Pendant (qui en fait se joue juste avant la rupture) où les scènes mettent en avant une tentation pour un des deux personnages (le groupe du personnage absent joue la tentation), puis la phase Après (juste après la rupture) où les personnages sont forcés de se revoir (socialement par exemple) et l'enjeu est de savoir si aucun, un seul ou les deux s'humilient devant l'autre et comment, càd est-ce que les liens sont vraiment rompus. Dans cette phase, le rat-garou peut pleinement se manifester et un des personnages peut mourir ou être mutilé. La partie prend fin lorsque durant une scène aucun d'entre eux ne s'est humilié.
On joue la scène sans règle très précise, simplement à l'aide des directions données par la description de chaque phase. On fait appel aux dés pour résoudre la scène: chaque groupe choisit laquelle de ses deux caractéristiques il utilise, choisit s'il utilise de sa jauge de Confiance et peut encore se renforcer en utilisant des dés noirs. Il y a quatre dés noirs au centre de la table, le groupe qui a la caractéristique la plus faible dans la scène peut prendre des dés noirs en premier, puis l'autre groupe, puis à nouveau le premier groupe, etc. Si à un moment il n'y a plus de dés à prendre ou si un des groupes refuse d'en prendre, l'« enchère » aux dés noirs prend fin. Prendre un dé noir oblige à intégrer le mot ou le symbole du rat dans la scène (Maxime s'est fait plaisir à l'aide de nombreux jeux de mots à base de « rat »), prendre deux dés noirs oblige à intégrer le rat comme animal dans la scène, prendre trois ou quatre dés noirs oblige à laisser entendre que son personnage pourrait être un rat-garou. Sur le long-terme, prendre des dés noirs c'est corrompre son personnage et courir le risque de le voir se transformer en rat-garou.
Chaque groupe lance ses dés. Celui qui fait la plus haute somme aux dés gagne l'enjeu.

Fiction créée
Nous commençons par la phase Avant.
Dans la première scène, Gemma reçoit un coup de téléphone: son groupe est pris en tournée pour 6 mois. Edouard fait la gueule (ils devaient partir au Brésil ensemble!) mais (le groupe de Gemma gagne) il finit par l'accepter.
Dans la deuxième scène, Gemma et Edouard se téléphonent. Il a acheté un rat pour lutter contre la solitude, ils se disputent pour savoir quand elle va revenir le voir, mais sont interrompus (égalité au jet de dés).
Dans la troisième scène, Edouard vient rendre visite à Gemma. C'est son anniversaire à lui mais il a accepté de venir la voir. Ils vont au restaurant; il y a des rats dans les coins. Elle lui offre une bague de fiançailles mais (le groupe d'Edouard gagne) Edouard refuse de s'engager.
Dans la quatrième scène, Gemma et Edouard se retrouvent dans leur lit après son retour de tournée. Ils font l'amour sans protection et Gemma annonce à Edouard qu'elle ne prend pas la pilule. Elle aimerait tomber enceinte d'Edouard. Conflit pour savoir si, s'il y avait bébé, ils le garderaient. Gemma l'emporte (mais elle ne tombe pas enceinte).

Nous continuons par la phase Pendant.
Edouard donne un petit concert dans un bar. Une de ses ex le recroise. Il a un peu bu, elle est très belle. Elle s'excuse pour ce qu'elle a fait, elle veut le quitter proprement. Finalement (le groupe de Gemma l'emporte), ils s'embrassent par erreur, mais mettent un moment à se séparer.
Gemma va voir ses parents. Ils n'aiment pas Edouard qu'ils trouvent trop pincé et intello. L'enjeu serait qu'elle dise du mal de lui. Elle s'y refuse (le groupe de Gemma l'emporte).
Edouard reçoit une proposition pour se produire dans un cabaret berlinois. Il accepte (le groupe de Gemma l'emporte).
Gemma est emmenée dans une soirée par une amie de son groupe. Elle comprend qu'il s'agit d'une soirée échangiste en cours de route. Finalement, elle décide qu'elle a aussi le droit à de la tendresse et part avec un homme qui lui plaît (le groupe d'Edouard l'emporte).

Nous entrons dans la phase Après.
A ce stade, le groupe d'Edouard a dû utiliser fréquemment (mais pas massivement) des dés noirs pour l'emporter. Il est établi qu'il est un rat-garou.
Nous ne jouons qu'une seule scène. Les deux personnages se partagent les affaires de l'appartement. Gemma retrouve la bague de fiançailles et en parle à Edouard. S'humilier, pour elle, serait de pleurer devant lui. S'humilier, pour lui, serait de la traiter avec mépris et de jeter la bague (et symboliquement de négliger les sentiments). Les dés font qu'aucun d'entre nous ne s'humilie et la partie prend fin ici.

Discussion du jeu
Je crois qu'on a été unanimes pour dire que l'expérience n'a pas été très bonne, pour de multiples raisons que je vais essayer de décrire ici. Vivien disait avec justesse que les scènes les plus intéressantes étaient celles du début de la partie, lorsque les deux personnages s'engueulent, ce qui donnait lieu à des échanges forts. Durant la deuxième phase, les scènes semblaient un peu raides, artificielles et peu intéressantes: un personnage est tenté et résiste ou pas - et puis voilà, pas de justification, pas de positionnement fin du personnage, etc. La troisième phase aurait pu être intéressante, mais elle s'est arrêtée trop vite et on commençait à en avoir plein les bottes, dommage.

La répartition de la parole
La première difficulté du jeu est la répartition de la parole dans chaque groupe. Qui a l'autorité pour parler du personnage du groupe ? Ça a mené à deux effets pénibles.
D'une part, c'était un peu la cacophonie. Même en essayant de respecter ce que disaient les autres membres du groupe, chaque personnage avait l'air de faire des sautes d'humeur bizarres, voire de se contredire. Chacun d'entre nous n'avait pas la même emprise sur le personnage commun, selon son degré de créativité et de capacité à s'imposer.
D'autre part, il y avait certaines scènes où un joueur prenait le contrôle du personnage parce qu'il avait une idée claire de ce qu'il voulait faire, mais je dois dire que je n'arrivais pas toujours à assumer ce que le personnage avait fait, je me sentais un peu dépossédé. La scène de sexe, notamment, menée principalement par Maxime dans le groupe de Gemma, me faisait être nettement moins fan de mon propre personnage.

Des règles, des règles, des règles !
Les règles de It Was A Mutual Decision sont difficiles à comprendre et à maîtriser. Il y a un cadre général que je vous ai précisé ci-dessus, mais il est plein de petites exceptions et de changements phase par phase, qui faisaient que je me replongeais régulièrement dans les règles pour être sûr de ne pas en manquer une importante (et pourtant j'avais déjà lu trois fois les règles depuis les 4 ans que je possède ce jeu !).
Elles sont souvent aussi difficiles à retrouver dans des blocs de texte pas toujours facile à manier.
Vivien trouvait que le style de Ron Edwards posait problème; je ne partage pas l'analyse, j'avais l'impression que son style est clair (mais Vivien est bien meilleur anglophone que moi) et que le problème était plus dans la présentation des règles et dans leur prolifération.

Par ailleurs, je dois dire que je ne comprenais pas le sens des règles. Je ne comprenais pas ce que signifiaient les différents choix et comment ils devaient avoir un vrai impact sur la fiction (autre que « vous devez raconter tel ou tel truc[g]), je ne comprends pas quels comportements elles devaient émuler chez nous et de quelles libertés nous disposions.
Je pouvais tout à fait appliquer les règles (encore que, plusieurs éléments ont demandé une grosse interprétation de ma part) mais je ne comprenais pas où elles nous emmenaient. Elles ne faisaient pas système.
Par exemple, la répartition exceptionnelle des caractéristiques a poussé le groupe d'Edouard à piocher dans les dés noirs pour se défendre, et donc l'a transformé en rat-garou. Mais en quoi était-ce un symbole de la situation ? Edouard ne m'a pas semblé plus méchant ou plus vicieux ou plus à plaindre que Gemma. Pourquoi fallait-il qu'il se transforme en rat-garou ?

Pour qui plaide-t-on ?
Avec le recul, je ne sais pas pour qui on est censé plaider dans ce jeu, et je ne crois pas que ce soit pour son personnage.
Déjà, comme je l'ai dit, le fait d'être plusieurs à contrôler le même personnage détruit le sentiment d'appartenance. On ne s'en sent plus responsable, au double sens de [g]devoir y faire attention » et de
De même, je ne comprends pas pourquoi dans la deuxième phase le groupe dont le personnage est absent doit jouer la tentation et pousser l'autre à l'erreur. Si on plaidait pour son personnage on essaierait de garder l'autre dans la relation, en montrant combien notre personnage est cool et sympa. Mais ici on essaie de montrer combien l'autre est un salaud et soi-même un ange.
De manière générale, j'ai l'impression qu'on veut nous faire construire une histoire mais sans savoir quels sont les choix importants, quels sont les enjeux (est-ce de ne pas être un salaud ? est-ce de souffrir le moins possible ?). Donc déception supplémentaire.

Et pourtant...
Et pourtant, It Was A Mutual Decision est vraiment sous-tendu par une réflexion et un propos fort sur le couple. Chloé a dit, de mémoire, que quand on quitte quelqu'un, il y a forcément un moment où on le voit comme un monstre, pour parvenir à s'en éloigner, avant de revenir sur son jugement et de faire sa propre autocritique. J'ai trouvé cette phrase formidable.
J'ai aussi mentionné qu'il peut être lu comme une critique de l'hétéronormativité (faire jouer une femme par un groupe d'hommes ou un homme par un groupe de femmes participe à la réflexion sur le genre) ou de l'importance excessive donnée à la romance et à la vie de couple (finalement, ne vaut-il pas mieux être seul que mal accompagné ?). Le rat-garou pourrait aussi être une métaphore de la violence conjugale, même si ici ça ne s'est pas vu.
Bref, il y a là un symbole très puissant, qui ne demande qu'un bon Système pour qu'on en explore la force.
Les textes à la fin du livre et les quelques sous-entendus sont particulièrement intéressants et montre que l'auteur a eu une réflexion aboutie sur le sujet.

Conclusion
It Was A Mutual Decision, pour autant que j'ai pu en juger, me semble être un jeu parti avec une idée formidable, mais dont la réalisation n'est pas assez aboutie. Les règles manquent de cohérence profonde et certains points centraux (comme la répartition de la parole au sein d'un groupe) ne sont pas suffisamment construits. C'est vraiment dommage. Avec Breaking the Ice, ils auraient pu faire un couple de jeux intéressants sur les relations amoureuses et romantiques, l'un optimiste et l'autre pessimiste, se répondant de deux positions opposées mais complémentaires.

Pour autant, je trouve sa lecture intéressante. Il y a un vrai propos, même s'il est mal concrétisé, et je pense que ça intéressera toute personne souhaitant créer un jeu sur la romance. Une fois n'est pas coutume, je recommande plus de lire que de jouer à ce jeu, d'autant que le PDF ne coûte que 5$.

Je pense aussi que ce propos pourrait être bien abordé dans un jeu comme Les Cordes Sensibles de Frédéric Sintes, pourvu qu'on se mette d'accord sur quelques éléments: on joue à deux, la situation de départ est celle d'un couple qui se sépare, on intègre dans chaque scène le symbole du rat, et l'acte irréparable est la transformation en rat-garou.

J'invite évidemment mes partenaires de jeu à s'exprimer et à donner leur vision de la situation.
Fabien | L'Alcyon
 
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Re: [It Was A Mutual Decision] Edouard et Gemma

Message par Maxime (Laconfir) » 11 Mai 2016, 21:13

Je suis globalement d'accord avec ton analyse, mais n'ayant pas lu le jeu je n'y voit même pas les points positifs que tu soulève...

C'est bien dommage car l'idée était intéressante. Vivien a très vite soulevé le problème de la prise de parole et nous n'avons pas vraiment réussi à le régler, le jeu est très mal construit pour cela.

Pour la dépossession du personnage, j'en suis désolé mais cela me semble inévitable. je ne pense pas que ce jeu encourage à s'investir dans le personnage ou à la trouver crédible, simplement à créer des situations conflictuelles (d'où le fait que j'ai fait faire des choses horribles à Gemma, on est là pour créer du conflit, pas pour s'en sortir bien selon moi...). Par ailleurs, contrairement à Shades ou la confiance est le propos, ici ce n'est pas clair et on peut théoriquement revenir sur ce que d'autres ont dit.

Je crois vraiment que l'auteur n'imagine pas de roleplay pour son jeu mais plus une discussion sur la mise en place de situation, et ce n'est clairement pas ma came...

La phase 1 était en effet la "meilleure". La phase 2 était ennuyeuse et très étrange en terme de positionnement et de règles. La phase 3 devait finir vite (mathématiquement, je crois qu'elle n'a quasiment aucune chance de durer plus d'une scène d'après les règles).

Le rat garou est clairement inutile, quelque soit la métaphore derrière, les règles permettant son apparition ne coïncident pas avec le propos.

En discutant avec Chloé on est en effet arrivé à la question de la vision de l'autre, le jeu aura permit une discussion sympa après au moins.

Je suis peut être dur, mais j'ai vraiment un sentiment de gachi, j'aurai vraiment préféré faire une partie de LPCO ou de breaking the ice. Au moins ça a été tenté, mais ce jeu me fait vraiment me dire que je joue à de bons jeux à côté de ça ^^.
Maxime (Laconfir)
 
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Re: [It Was A Mutual Decision] Edouard et Gemma

Message par Gaël Sacré » 11 Mai 2016, 21:14

Très intéressant. Merci pour ce rapport de partie, Fabien !
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Re: [It Was A Mutual Decision] Edouard et Gemma

Message par Fabien | L'Alcyon » 11 Mai 2016, 21:44

Maxime, qu'on soit clairs, je ne te reproche absolument pas ta prise de parole durant la scène de sexe. Elle était autorisée par les règles et intéressante. Je pense que le problème vient du jeu. Sans doute que je parviendrais à assumer le personnage plus facilement - même lorsqu'il commet des actes que je réprouve - si j'avais été seul à le faire agir.
Fabien | L'Alcyon
 
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Re: [It Was A Mutual Decision] Edouard et Gemma

Message par Solweig » 11 Mai 2016, 22:27

Ah ! Alors comme Maxime j'ai eu la sensation de perdre de mon temps. Je trouve que le seul concept intéressant de ce jeu est que chaque groupe incarne une personne de l'autre sexe... en revanche, je ne vois pas finalement en quoi ça redéfinit l'hétéronormativité. Déjà je dirais plus que ça pourrait redéfinir les rôles des genres, et même là je ne trouve pas que le but est atteint.
Peut-être qu'un meilleur système pour accumuler des malus et se transformer en rat-garou serait de se faire accuser de cliché par l'autre camp (si on joue un homme trop « cliché » qui ne pense qu'au sexe par exemple ou une femme trop « cliché » qui parle sans arrêt de son apparence) et du coup de perdre des points qui nous amènent vers le monstre. Ainsi, on aurait une vraie réflexion sur les genres, puisqu'il s'agirait de jouer un personnage le plus subtil possible et de déconstruire l'image préconçue que l'on a de l'autre sexe.

Mais le jeu, en l'état, n'a pas énormément d'intérêt, ne serait-ce que parce que, comme tu le dis Fabien, on ne sait pas vraiment quel est le but. En plus de ce que tu as pointé du doigt, voilà ce qui m'a agacée : On ne peut pas « gagner » puisque l'issue est écrite d'avance (rupture), et devenir rat-garou est bien trop aléatoire (jet de dé et pas mal joué) pour que ça ait un sens. Si le but était de ne pas se transformer, il suffirait de ne jamais tirer de dés noirs. Finalement, on pourrait très bien jouer avec un récit minimum (« ok, disons que dans cette scène l'enjeu est de déménager ou non », jet de dé, X gagne, scène suivante), le jeu ne pousse pas à la narration (je trouve). Et comme ça a été dit, la 2e phase a des règles totalement arbitraires et inintéressantes. Ce qui est bien dans le système de résolution des cordes sensibles, c'est qu'on joue ses cartes comme on veut, et on peut choisir entre gagner le conflit, avoir des repercussions, perdre sans repercussions ou même perdre avec repercussions, et cela permet de construire un personnage bien plus humain. Ici, aucun intérêt.

Par contre Max je ne suis pas tout à fait d'accord avec toi quand tu dis qu'il s'agissait juste de créer du conflit. Dans la scène de sexe, j'avais le sentiment que tu voulais pousser Edouard à mal prendre les avances de Gemma, alors que nous les filles (en tout cas moi) ne voyions pas pourquoi Edouard n'irait pas dans le sens de Gemma, et qu'en plus je ne pense pas que le personnage de Gemma aurait agit ainsi. Mais ça vient probablement d'une façon différente d'aborder la partie. Cyril m'a expliqué la théorie des immersions multiples, et ça me parle dans ce cas là. Pour ce jeu, j'étais immergée personnage, mais pas du tout univers ni narration (car le système de jeu me sortait de la narration) ; et toi peut-être étais-tu plutôt immergé narration et pas personnage.
http://ptgptb.fr/theorie-des-niveaux-d- ... -multiples

Du coup on a vécu la partie un peu différemment.

Et sinon, le fait d'invoquer des rats dans la narration, j'ai trouvé ça totalement inintéressant et artificiel, et je n'ai vraiment pas vu l'intérêt pour le jeu.

Mais j'ai quand même passé un bon moment car les joueurs étaient de charmante compagnie ! :)
Solweig
 
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Re: [It Was A Mutual Decision] Edouard et Gemma

Message par Fabien | L'Alcyon » 11 Mai 2016, 23:18

Oui, tu as raison sur la question de l'hétéronormativité. J'ai repris un peu vite ce que Ron Edwards dit dans son appendice où il explique ses intentions. En particulier, il justifie le fait d'imposer un couple hétérosexuel par le fait que, parmi les conventions de la romance, il veut en particulier remettre en cause l'hétéronormativité. Mais c'est vrai qu'il n'y a pas vraiment de règle qui permette de mettre cela en avant, c'est plus l'impossibilité de jouer tout autre type de couple.
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Re: [It Was A Mutual Decision] Edouard et Gemma

Message par Solweig » 11 Mai 2016, 23:53

Etrange de combattre l'hétéronormativité en l'imposant. Ne serait-il pas plus parlant d'imposer l'homosexualité du couple ? :D Comme ça les homophobes refoulés (à notre époque il n'y a plus d'homophobes affichés, en tout cas pas des rôlistes :p) seraient bien obligés d'entrer dans la peau d'un/e homosexuel/le !
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Re: [It Was A Mutual Decision] Edouard et Gemma

Message par Frédéric » 12 Mai 2016, 01:36

Argh, encore une déception !
En tout cas vos analyses donnent du grain à retordre et si la partie n'était pas top, le compte-rendu est vraiment intéressant.
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Re: [It Was A Mutual Decision] Edouard et Gemma

Message par Mangelune » 12 Mai 2016, 08:36

Alors je vais essayer de pas être trop méchant. D'abord parce qu'un jeu raté, ça peut arriver à tout le monde. Ensuite et surtout parce que je veux pas que notre guide en soit affecté : Fabien je te remercie chaleureusement de t'être porté volontaire pour nous faire jouer, je voulais tester ce jeu, le sujet me bottait à donf, et le nom de Ron Edwards rendait le tout super intriguant.

Bon, j'ai détesté ce jeu, et j'en veux pas mal à Ron Edwards.

Effectivement, la prise de parole a été un calvaire, et le premier tour j'ai vraiment cru que j'avais pété un plomb ou que j'allais pas tarder à le faire (la fatigue pouvait aider). J'ai ici vécu le Mind'Fuck évoqué par Thomas, et c'était pas agréable. Un bad trip. Trois personnes pour un seul PJ, démultiplié par le fait d'être en face de trois personnes pour un seul PJ, des joueurs incapables de s'auto-réguler peu importe les suggestions...

D'ailleurs je plussoie sur la dépossession mentionnée par Fabien : si j'avais déjà commencé à me foutre pas mal du personnage, les décisions conflictuelles des autres m'ont moins poussé à réinventer son identité en permanence qu'à complètement lâcher l'affaire, et j'avoue que j'ai fini par considérer cette créature comme un truc incompréhensible.

Du coup, et là je repense à ce que dit souvent Romaric sur certains jeux, les émotions n'étaient plus celles de moi incarnant un perso dans un récit, mais celles de moi joueur à qui on rappelait des éléments très désagréables de sa vie (la rupture, le déménagement qui s'en suit, etc.) sans le moindre filtre et la moindre sublimation. C'était extrêmement désagréable.

Je passerai assez vite sur le système de jeu qui clairement nuit au tout. Je pense en survolant le bouquin que Ron Edwards ne cherche pas le roleplay et l'incarnation comme le dit Maxime. Des tests désincarnés, des mécaniques potentiellement interminables pour clore les phases 2 et 3, un équilibre pété si un des persos obtient les meilleurs scores... On a fini par jouer contre le système pour accélérer un peu.

Quant au fond, l'héternormativité et le reste, franchement je pense que vous y mettez ce que vous voulez y voir. Oui vivre en couple c'est difficile, cela révèle parfois ce qu'il y a de pire en l'homme. J'imagine que c'est pareil que tu sois hétéro ou pas (ou alors ils ont un secret que je n'ai pas). Montrer ce visage atroce est intéressant (je l'ai dit, le thème me bottait), et la métaphore du rat garou plutôt bonne à la base (et foirée dans notre partie). Mais c'est tout.
Contes et histoires à vivre, un site pour parler des Errants d'Ukiyo, de Perdus sous la pluie et du reste.

Pensez aussi à la page Facebook officielle de Perdus sous la pluie.
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Re: [It Was A Mutual Decision] Edouard et Gemma

Message par Fabien | L'Alcyon » 12 Mai 2016, 10:03

T'inquiète, Vivien, je comprends bien ce que tu veux dire et je me positionne bien par rapport au jeu. Je ne me sens pas affecté par les critiques qui lui sont formulées.

Cela dit, si des rôlistes passent par ici et ont aimé le jeu, qu'ils n'hésitent pas à en dire du bien et à nous expliquer ce qu'on n'a pas compris ! Il se peut que le jeu puisse être plaisant sous certains aspects, que nous n'aurions pas saisis à la lecture des règles.
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Re: [It Was A Mutual Decision] Edouard et Gemma

Message par Steve J » 12 Mai 2016, 11:35

C'est bête à dire mais je ne peux pas complètement m'empêcher d'être intéressé par ce qui ressort du compte rendu de Vivien, notamment quand il écrit ça
Effectivement, la prise de parole a été un calvaire, et le premier tour j'ai vraiment cru que j'avais pété un plomb ou que j'allais pas tarder à le faire (la fatigue pouvait aider). J'ai ici vécu le Mind'Fuck évoqué par Thomas, et c'était pas agréable. Un bad trip. Trois personnes pour un seul PJ, démultiplié par le fait d'être en face de trois personnes pour un seul PJ, des joueurs incapables de s'auto-réguler peu importe les suggestions...


Bon l'effet doit très très vite montrer ses limites (Vous avez joué plusieurs heures de mémoire ?) mais cette idée de partage de narration cacophonique vient sans doute empêcher d'approcher la dispute avec une posture de tacticien très courante en JDR mais assez éloignée du ressenti que l'on peut avoir dans une engueulade.
Je ne me vois pas réutiliser l'idée sur une partie entière mais il y a là une idée de mise en scène ("en table" ?) qu'il pourrait être intéressant de tester sur une courte scène (comme un nano-système à la Sundered Land).

Ceci dit votre ressenti est vraiment super négatif et il y a deux points qui devraient interroger.
1) La mise en avant des expériences du joueur qui n'a plus le filtre de son personnage (car le personnage est inexistant)

On peut en vouloir à l'auteur qui joue à l'apprenti psychologue.
Le milieu du GN utilise le terme de bleed (un terme d'imprimerie) pour parler des interactions entre les émotions/ressentis du joueur et de son personnage. Ce terme a une utilité très concrète : poser la question des limites et de la prise en compte d'effets franchement désagréables pour le joueur. Dans cet article du site Electro-GN on peut lire ceci
Apprenti-sorciers ?

Reste que l’exercice est une prise de risque, et peut donc avoir des conséquences indésirables. D’autant plus quand on met en jeu sa propre identité, son ressenti, ses convictions.

À mon sens, rejeter en bloc la recherche de l’effet Bleed est tout aussi absurde que l’ériger en Saint Graal. Être conscient que le GN, lorsqu’il en vient à flirter avec certaines limites, peut présenter un risque, me paraît plus pertinent et productif que nier en bloc cette possibilité, restreindre le champ du jeu à des occurrences réputées parfaitement « safes », enfermer le GN dans un cadre sclérosant et laisser livrés à eux-mêmes les malheureux qui se retrouveraient malgré tout dans pareilles situations.


Il est peut-être temps d'importer ces réflexions à nos tables !

2) La lourdeur des mécaniques, les bugs de système, les jets qui n'ont aucun sens
Ce n'est malheureusement pas le seul exemple de jeu forgien à souffrir de ces défauts et je ne peux pas m'empêcher d'y voir la conséquence d'un game-design abstrait, qui ne repose que sur quelques idées fortes mais se désintéresse de problématiques techniques : équilibrage, fluidité des mécaniques à l'usage, ressenti des joueurs vis à vis des mécaniques (quel effet a le jet de dé sur le joueur).
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Re: [It Was A Mutual Decision] Edouard et Gemma

Message par Thomas Munier » 12 Mai 2016, 12:02

Sur l'absence de filtre entre le joueur et le personnage qui crée une sensation de bleed (identification extrême au personnage) qui peut être vécue comme douloureuse, on a eu la même expérience en jouant La photographie, une séance d'Inflorenza Minima, où l'un des joueurs a connu ça parce que son personnage était trop simple à son goût, ce qui l'avait obligé à investir de lui-même plus qu'il n'aurait préféré.

Ce sont des phénomènes qui peuvent être tamponnés par l'élaboration d'un contrat social sain.
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Re: [It Was A Mutual Decision] Edouard et Gemma

Message par Fabien | L'Alcyon » 12 Mai 2016, 12:31

Steve, je ne suis pas sûr de comprendre ce que tu veux dire avec le concept de bleed. On n'a pas attendu le GN pour jouer sur les liens entre les émotions des joueurs et des personnages, je me trompe ? J'en veux pour preuve les différents jdr qui demandent aux joueurs de s'impliquer personnellement dans les enjeux de leurs personnages (au premier rang desquels Les Cordes Sensibles ou Breaking the Ice) et toute la réflexion sur la synesthésie de Fred.

Pour rester dans l'exemple donné ici (et j'aimerais qu'on reste ancrés dans du concret, c'est le principe de ce sous-forum), il me semble que le problème était moins qu'il n'y avait pas de filtre, que le fait qu'il n'y avait pas de personnage à s'approprier et auquel s'attacher. Plusieurs joueurs pour un seul personnage et sans règle de propriété/responsabilité claire, ça conduit à ne pas pouvoir assumer ce que fait le personnage, c'est-à-dire endosser la responsabilité de ses actes. On ne construit rien et le personnage reste une coquille vide auquel on ne peut pas s'identifier à un personnage comme on le ferait dans une histoire de roman ou de film. Et parce qu'on ne peut s'identifier à aucun personnage, il n'y avait pas d'émotion pour les joueurs, on s'ennuyait surtout, ce qui ne nous a pas poussé à mettre nos émotions sur la table.
C'était moins vrai au début (j'étais assez pris dans les scènes de la phase Avant) mais ça a été de plus en plus vrai ensuite.
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Re: [It Was A Mutual Decision] Edouard et Gemma

Message par Mangelune » 12 Mai 2016, 13:12

Fabien | L'Alcyon a écrit :Pour rester dans l'exemple donné ici (et j'aimerais qu'on reste ancrés dans du concret, c'est le principe de ce sous-forum), il me semble que le problème était moins qu'il n'y avait pas de filtre, que le fait qu'il n'y avait pas de personnage à s'approprier et auquel s'attacher. Plusieurs joueurs pour un seul personnage et sans règle de propriété/responsabilité claire, ça conduit à ne pas pouvoir assumer ce que fait le personnage, c'est-à-dire endosser la responsabilité de ses actes. On ne construit rien et le personnage reste une coquille vide auquel on ne peut pas s'identifier à un personnage comme on le ferait dans une histoire de roman ou de film. Et parce qu'on ne peut s'identifier à aucun personnage, il n'y avait pas d'émotion pour les joueurs, on s'ennuyait surtout, ce qui ne nous a pas poussé à mettre nos émotions sur la table.
C'était moins vrai au début (j'étais assez pris dans les scènes de la phase Avant) mais ça a été de plus en plus vrai ensuite.


Ce que je disais, c'est que ce réflexe de se raccrocher à du réel est arrivé par moments dans la partie. Plusieurs explications sont possibles, par exemple :
- certaines situations vécues ont laissé une empreinte très douloureuse, et le simple fait d'en parler produit un effet chez moi, peu importe à quel point le jeu est mauvais (un peu l'équivalent du jump scare au cinéma, on obtient un effet, mais c'est un effet juste désagréable, ni cathartique ni artistique)
- parce que le jeu est mauvais et la partie ennuyeuse, on est tenté de se raccrocher à ce que l'on trouve - ici une expérience personnelle forte - pour ne pas être complètement largué. D'autant que de mon point de vue, les gens avaient l'air de s'amuser beaucoup plus que moi, et que naturellement je voulais éviter d'être largué.
- le fait de se sentir à la ramasse, isolé, pendant toute la partie peut aussi aggraver les sensations.

C'est donc pour moi un peu différent d'une simple absence de filtre. Il n'y avait pas de personnage simple, juste pas de personnage.
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Pensez aussi à la page Facebook officielle de Perdus sous la pluie.
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Re: [It Was A Mutual Decision] Edouard et Gemma

Message par Steve J » 12 Mai 2016, 13:27

L'intérêt du détour du côté des GNistes c'est qu'il s'agit d'une communauté qui se pose beaucoup plus concrètement que nous la question des limites. C'est une habitude qui vient du fait que le GN implique le corps du joueur ce qui fait que, même quand les thématiques abordées sont légères, il est toujours important de se poser ces questions dans le grandeur nature.
Cette question des limites surgit dans le champ du JDR sur table quand on s’aperçoit que l'on traite de problématiques plus fortes et plus engageantes. Dans les cas de LCS et de Breaking the Ice il y a une longue réflexion autour de ces limites (les Voiles et les Lignes, les réflexions sur l'inscription dans les mécaniques de la possibilité d'arrêter la partie,etc). Il s'agit de plus de jeux qui ont été longuement playtestés.
Mais on se rend compte que les GNistes ont beaucoup plus conscience de l'importance de ces limites. Ainsi quand le biclassé Thomas B. joue à LPCO et écoute le podcast de la Cellule au sujet du jeu, il analyse immédiatement les réactions de Romaric -dont parle Vivien- comme problématiques et il écrit ce qu'aucun critique non-GNiste n'a à ma connaissance soulevé
Thomas B. a écrit :Quoi qu’il arrive, je conseille à celles et ceux qui voudraient tenter l’aventure d’en parler avec leurs partenaires de jeux et leurs partenaires dans la vraie vie. Aucun des deux jeux ne propose de technique de debriefing satisfaisante, donc c’est à vous de discuter avant (pour clarifier les attentes et limites de chacun), pendant (pour être sûr qu’elles sont respectées) et après (pour pouvoir partager vos ressentis et digérer l’expérience). En adultes responsables, quoi.


Dans le cas d'It Was A Mutual Decision, en me basant sur le retour de Vivien, je suis interpelé. La partie a déjà eu lieu il y a plusieurs jours et il me semble que le ressenti de Vivien est encore fortement négatif. Ses critiques sur le jeu ne sont pas à placer dans la catégorie des critiques techniques, de game-designer, sur les éléments de design, son message ne parlait pas d'ennui mais de calvaire, d'expérience extrêmement désagréable, etc...bref on est au delà de la déception et l'énervement ressenti me semble suffisamment singulier pour se poser la question de sa non reproduction.
Il me semble que si l'auteur avait été présent le debriefing aurait été particulièrement conflictuel et déplaisant. En jeu vidéo on commence à se poser des questions de Humane Design en se posant la question de la bienveillance du créateur du jeu envers les joueurs. Là il me semble qu'on n'y est pas du tout (d'autant plus que le jeu est notoire pour avoir été peu playtesté par son auteur qui -quand on le lit à son sujet- ne semble pas s'être posé ces questions).

Spécifiquement j'ai l'impression que ce sentiment négatif vient d'un ensemble de facteurs :
*Une certaine facilité des effets : le jeu abordant frontalement des événements dont le souvenir est en soi déplaisant pour les joueurs. Bref il y a quelque chose qui fonctionne mais qui n'a pas de dimension artistique/cathartique (les cinéphiles penseront au fameux "le travelling est affaire de moral" qu'utilise Rivette dans sa critique du film Kapo : ce n'est pas parce qu'un effet formel fonctionne qu'il faut en féliciter son auteur).
*Un personnage en coquille vide qui empêche la distanciation (il devient clair que nous n'incarnons que nous même).
*La durée de la partie qui reste inféodée au système et fait artificiellement durer les scènes.
*Un effet de brouhaha rapidement pénible (voir physiquement déplaisant ?)
Steve J
 
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