[Amid Endless Quiet] Qu'est-ce que c'est dégueulasse ?

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[Amid Endless Quiet] Qu'est-ce que c'est dégueulasse ?

Message par Mangelune » 23 Mai 2014, 16:44

Désolé pour la référence à JLG mais sur la demande expresse de Fabien nous allons évoquer notre nouvelle incursion dans le jeu Freeform hier soir avec Steve, Côme, Morgane, Maxime et Grégoire.

Je vais faire court et laisser à d'autres le soin de compléter, mais en gros le jeu se déroule ainsi :
- le pitch de départ est que le vaisseau des joueurs est sur le point de se crasher. L'intelligence artificielle qui pilote (incarnée par un joueur, ici Côme) sait qu'elle va mourir ; elle peut sauver un seul des passagers.
- Elle dispose pour faire son choix de 20 actions, dont deux au moins devront être consacrée à la mise dans la navette de secours d'un passager et à son expulsion dans l'espace (enfin devront... on verra que c'est pas obligé).
- Les autres actions permettent de consulter le dossier d'un passager (le joueur responsable répond à une question perso), d'observer une discussion entre deux passagers sous la forme d'un rêve ou bien de discuter directement avec un passager à travers un rêve. Dernière option, réveiller un passager pour lui annoncer la fin imminente.
- Les autres participants disposent pour toute info sur leur personnage que d'un nom (bien chelou, ça nous aura fourni un bon paquet de blagues pourries), une origine, un âge réel, un âge total - hibernation comprise, et un métier. A chacun de broder avec ça. Si j'ai opté pour un courtisan(e) multi-sexe dépressif qui considère n'avoir vécu que pour les autres, Steve nous a dépeint une princesse artificielle condamnée à remplacer une "soeur" morte qui n'aura jamais été libre, Morgane une artiste traumatisée par la mort de son enfant, Maxime un prophète scientifique à la sagesse étonnante - accessoirement créateur de l'IA du vaisseau, et Grégoire une universitaire spécialisée dans l'art et complètement bouffée par une vie dorée.

Je reviendrai sur la fiction plus tard mais disons que l'avis était unanime : le jeu est assez bon et a permis de développer des persos super intéressants, les prestations de chacun étaient bluffantes, le principe des rêves a donné des allures très "nouvelle vague" aux discussions... mais six joueurs, quand on a deux intervenants max par scène, cela implique de ne pas jouer souvent et donc de s'ennuyer souvent (encore une fois, malgré la qualité des prestations).
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Re: [Amid Endless Quiet] Qu'est-ce que c'est dégueulasse ?

Message par Mangelune » 23 Mai 2014, 18:45

Bon alors pour la fiction, en gros, de mon côté (ce dont je me souviens le mieux) :
* à l'IA qui me demandait si j'étais digne de confiance, je racontais que j'avais vécu avec un homme que j'avais exploité et que j'avais fait dénoncé pour trafic de drogue.
* J'ai aussi discuté à travers un rêve où je montrais mon personnage à 4 ans, livré par sa mère à une guilde de courtisan(e)s aux costumes dignes de Moebius ; suite à une question très orientée, j'ai accepté l'idée que c'était pour un meurtre qu'on me livrait, celui de mon père ; dans cette scène, je promettais à celui qui me recevait que je le tuerais un jour s'il ne voulait pas me laisser partir (je n'ai pas eu l'occasion de développer ce point).
* Je fus ensuite invité dans le rêve de Steve. Son personnage de princesse rêvait du 18e anniversaire qu'elle n'avait jamais vraiment vécu, celui de l'originale qui était morte, celui qu'elle devait fêter en arrivant à la planète vers laquelle nous allions. Elle m'annonçait que le vaisseau allait se crasher et qu'on allait mourir, je la critiquais violemment, la prenais par la main et débouchait dans un grand flot blanc (imaginé par Steve), là je lui dépeignais le monde réel en me basant sur un vieux livres pour enfants, car mon personnage n'avait pas vu le monde réel depuis son enfance, un monde crayonné avec de la couleur. Arpentant vite une route de briques jaunes, nous allions jusqu'aux collines et découvrions... de la lumière.
* Finalement, après avoir compris que nous allions mourir, je me retrouvais à flotter aux côtés du personnage de Grégoire, la collectionneuse un peu évaporée. On a eu là une jolie scène à la Becket, sans queue ni tête et rythmée par le dialogue "On s'ennuie non ?" "T'inquiète pas, ça va pas durer". Je révélais au cours de ce passage que j'étais sensé(e) devenir la maîtresse de l'empereur de la planète où nous allions... le père de la princesse.
* La dernière scène pour mon personnage était le réveil aux côtés des autres, avec l'ordinateur qui nous révélait enfin que nous allions mourir et qu'il n'avait pour l'instant envie de sauver personne. Au lieu de plaider pour moi ou un autre, je demandais à l'IA de ne pas épargner la princesse. Elle n'avait pas vu la laideur du monde réel, mieux valait mourir sans avoir vécu que de subir l'horreur de la réalité.

Quel fut le choix de l'ordinateur finalement ? Devant ce suspense, je laisse les autres apporter leur grain de sel ;)
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Re: [Amid Endless Quiet] Qu'est-ce que c'est dégueulasse ?

Message par Fabien | L'Alcyon » 23 Mai 2014, 18:57

Ah, oui, Amid Endless Quiet de Ben Lehman ! J'avoue qu'à la lecture j'étais assez suspicieux, mais je suis curieux de voir ce que vous en avez fait ! Effectivement, ça peut tout à fait tourner à une pièce d'Ionesco ! Un jeu intéressant.
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Re: [Amid Endless Quiet] Qu'est-ce que c'est dégueulasse ?

Message par Steve J » 26 Mai 2014, 01:11

Développons sur la fiction avec mon personnage, la jeune Mor Mol Ae (les choix de Ben Lehmann en matière de noms de personnages ne sont pas toujours les plus sûrs et j'ai préféré l'appeler Ae la plupart du temps). Les seules informations données par le jeu (et connues de l'ordinateur) en début de partie sont son age, 17 ans (et 17 ans d'années éveillées, elle n'avait jamais fait de voyages nécessitant une phase de stase), son genre, féminin, et sa vocation : sujet expérimental.

J'ai joué pas mal de scènes :
1) Une scène où l'IA, qui s'appelle Elios, décide de se remémorer son bref contact avec moi lors de l'embarquement.
Je décrit comment Ae est amenée devant le port spatial dans une voiture aux vitres noires, sous haute escorte, elle semble fasciné par ce qu'elle voit avant d'entrer dans le vaisseau.
Une fois à bord elle semble tout émue et demande d'une voix polie si elle peut assister au décollage avant d'entre en phase de stase. Elle y croise Le Quan, le personnage de Maxime et assiste au décollage, émerveillée.
2) Une scène de dialogue avec Sorel, le personnage de Morgane. Le dialogue se passe dans le rêve d'Ae (c'est moi qui cadre), une chambre entièrement blanche, couverte d'écrans d'ordinateurs montrant les images d'une salle de bal.
Sorel lui demande pourquoi ces écrans et Ae lui explique qu'elle est le clone de la fille de l'empereur, morte le jour de ses 18 ans. Depuis sa conception elle apprend à être Ae, elle sait ce qu'elle a vécu mais n'a jamais vécu. Elle lui dit sa joie de quitter enfin cette chambre blanche pour vivre auprès de son père.
3) Une discussion avec l'ordinateur, qui la réveille et lui fait prendre conscience de l'imminente explosion. Quand Elios lui explique qu'il ne la sauvera probablement pas, elle n'a après tout jamais rien fait, Ae éclate. Comprenant qu'elle va mourir elle cesse de se comporter comme la jeune fille polie qu'on lui a appris à être, elle insulte Elios avec violence. Sa fureur et ses pleurs se heurtent à un mur, l'insupportable neutralité de l'ordinateur qui lui répond.
4) La scène dont parle Mangelune, avec son personnage, Arc. La discussion se passe dans le rêve d'Ae, elle rêve qu'elle fête son anniversaire et qu'elle meurt comme est morte la première Ae, frappée par une maladie fulgurante.
Arc se révolte contre le rêve et demande à Ae d'imaginer un autre cadre. Ae sort du palais mais se retrouve dans un espace vide, on ne lui a jamais appris à quoi ressemblait l'extérieur.
Arc qui n'a pas de vrais souvenir de l'extérieur lui décrit alors une prairie et un chemin, souvenirs issus des illustrations d'un livre pour enfants. Ae les intègre dans son rêve, avec Arc elle découvre un monde nouveau avant que ne s'arrête son rêve.
5) La scène de dialogue où Elios réveille tout le monde.
Elle supplie alors Elios de la sauver.
6) Une autre scène par la suite.

Je reviendrai sur ce sujet, pour commenter plus précisément certaines scènes et ma posture pendant celles-ci.
Dans un premier temps je rejoins Mangelune et ses conclusions. Nous avions peu avant joué à The Climb (que je conseille vivement mais qui est un jeu à secrets, impossible de vous faire un CR sans vous gâcher la partie) avec notamment Grégoire et Côme. Il s'agit d'un autre jeu freeform mais il tire plus sur le GN et lui emprunte la possibilité de jouer des scènes en simultané : il peut y avoir plusieurs conversations qui ont lieu en même temps, un joueur est toujours acteur de l'action car il n'est pas spectateur des scènes où son personnage n’apparaît pas.
Dans Amidst Endless Quiet il b'y a presque jamais plus de deux joueurs actifs, à 6 joueurs on est donc très souvent spectateur et ça peut lasser (surtout des joueurs impatients comme moi et Mangelune). Je dois cependant dire que je n'ai qu'assez rarement eu l'occasion d'être spectateur de scènes aussi intéressantes, je pense qu'il m'aurait suffi de jouer à 4 voire à 5 joueurs (en étant donc spectateur la moitié du temps) pour ne plus faire ce reproche.
Au passage, autre effet pervers des longues périodes d'inaction : quand on cesse d'être spectateurs on a pas envie d'être concis sur les scènes. Ça fait 15 minutes qu'on attend d'avoir la parole, on rechigne (en partie inconsciemment) à la rendre.
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Re: [Amid Endless Quiet] Qu'est-ce que c'est dégueulasse ?

Message par Morgane » 26 Mai 2014, 11:17

J'ai été très contente de tester ce jeu. Déjà parce qu'il m'a permis de faire la connaissance de Steve, Côme et Grégoire, et aussi parce qu'on a passé un bon moment, entre franche marrade et très beau jeu d'interprétation.

Avant de faire une synthèse de l'expérience, voici à quoi ressemblait mon personnage : Sorrel Quam, sculpeur de la planète Zhou (planète vers laquelle nous allions), 20 000 d'age réel, 34 ans d'âge physique. Puisqu'il était de genre X, j'ai décidé que c'était un homme.

Il y a eu :
- Une scène où l'IA a souhaité accéder à mon dossier public : Sorrel est un sculpteur d'art électrique, à la carrière et au succès absolument fulgurants, à tel point qu'on le soupçonne d'avoir plagié le travail d'un autre créateur mort. Ces rumeurs n'ont pas fait long feu dans la presse. Manipulation ou réel manque de matière à ces supputations ?
- Une scène avec Mor Mol Ae, le personnage de Steve. Il l'a décrite précedemment. Sorrel a bien accroché avec cette petite fille pour une bonne raison : elle lui évoque directement son propre passé.
- Une scène de rêve où l'IA incarnait Vassily, l'ami et agent de Sorrel. Excellente capacité d'adaptation de Côme, qui a immédiatement intégré ce rôle alors que je ne lui avais donné que le prénom du personnage et que c'était exactement ce que j'avais en tête.
Sorrel n'en peu plus, il veut mettre sa carrière en pause. Il y a 500 ans, lui et sa femme ont essayé d'avoir un enfant. Cette petite fille est morte née car il lui manquait un gène fondamental. Sa femme est tombée en dépression suite à cet énimèe échec. Sorrel a donc abandonné son travail et s'est fait implanté, un peu illégalement, une technologie expérimentale pour sculpter l'électricité. L'implant a tué son premier utilisateur et est en train d'épuiser notre artiste. Il veut retourner sur Zhou pour rendre visite à la tombe de sa femme et de sa fille. Vassily essaye de le convaincre de faire encore une exposition puis accepte finalement d'annuler le vernissage.
- La scène où tous les passagers sont réveillés : Sorrel demande à l'IA de sauver la petite Ae et fait promettre à Ae de transformer l'empire en démocratie (le premier travail de Sorrel, franchement secret, était de l'activisme politique sur Zhou)


Bilan :

- J'aurais les mêmes reproches à faire au jeu que Mangelune et Steve. Les intéractions à deux sont limitantes quand on est si nombreux. Soit il faut rester 4 joueurs, soit il faut permettre des actions impliquants trois personnages.
- Néanmoins, cet intimisme forcé a donné une couleur tout à fait particulière à notre séance de psy de jeu.
- Le fait de construire sur le vif un personnage avec des informations minimalistes est un exercice très intéressant, quoi qu'un peu stressant. En fait, je vois un avantage au mode spectateur : il permet aussi de fignoler un rôle d'ici à la prochaine interraction. Sans cela, j'aurais du mal à raccorcher les wagons de mes inventions au pied levé.
- Ce fameux mode spectateur ne m'a pas géné outre mesure, même s'il est effectivement un peu trop récurrent. La qualité des interprétations en a fait un court métrage IRL, et le public -lorsqu'il en avait un peu marre d'attendre- n'a pas hésité à commenté en douce ce qui se passait.
- Résultat : l'ambiance était très bonne enfant autour de la table, et malgré les jeux de mots foireux sur le prénom des personnages, les scènes sont restées tendues et touchantes. Le paysage des rêves permettait des intéractions très psychanalytiques mais aussi complètement surréalistes. Ces personnages minutes sont devenus des pyschées complexes, avec une face sombre qui les rendait tous très attachants mais aussi très critiquables.

Je crois que la réussite de cette soirée tient beaucoup à la performance de Côme, machine manipulatrice, orgueilleuse et pas aussi objective qu'on pourrait le penser, et qui a joué de façon retorse et dénuée d'empathie sur les failles sentimentales de cette drôle de bestiole qu'est l'être humain.

Un JDR freeform d'art et d'essai, en somme :)
Site-supplément pour "Sur la route de Chrysopée"
Le site de Rose des Vents pour y retrouver mes projets
Tiens, voilà du matos, voilà du matos, voilà du matos (pour Sens)

"Aucun fait n’existe, à vrai dire, comme vérité indiscutable et contenue, bornée ; ne serait-ce qu’à travers le filtre des sens, de la conscience, le réel se dérobe toujours, ultimement, à son constat. "
Morgane
 
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Re: [Amid Endless Quiet] Qu'est-ce que c'est dégueulasse ?

Message par Maxime (Laconfir) » 26 Mai 2014, 11:32

Bon ba je vais m'y coller aussi !

Je jouai donc Le Quan, scientifique/prophète âge vécu: 75 ans, âge réel 100 millions d'années.

Avec ces informations, j'ai improvisé au fur et à mesure mais je suis tout de suite parti dans une idée de culte vénérant une sorte de dieu machine, du moins une idée comme ça.

- Ma première scène est celle de l'arrivée de MORMOL Ae (oui on a beaucoup rit avec son nom...), où elle m'a vu saluer mes disciples qui me disait au revoir. Je portai une robe rouge et j'ai eu l'air d'un vieil homme sympathique et attentif à ses ouailles.

- Lors de ma deuxième scène, on me demande des informations publiques: Je choisis alors qu'avec 100 millions d'années, Le Quan est né à peu près à notre époque. Il raconte donc ses études et ses capacités incroyables, il a obtenu sa thèse à 18 en mécanique et informatique car il a un don, il peut communiquer avec les machines. Dès l'invention de la stase, il passe 10 ans dedans et se réveil un an pour voir ce qu'il se passe. Étant parmi les premiers à tenter l’expérience des voyages dans le futur, on parle de lui comme un voyageur. A chaque saut qu'il fait, il comprend la technologie en très peu de temps, lance des plans pour son évolution puis repart pour voir ce que cela donne. Assez rapidement, un culte apparaît autour de sa personne, attendant le retour du messie qui permet à la technologie d'avancer à pas de géant. Désormais il ne se réveil qu'une semaine tous les 1000 ans environ et on guette ses réveils avec attention et ferveur. Là, il va sur la planète car on y aurait découvert une technologie ancienne que personne n'arrive à comprendre, peut être qu'il pourra lui parler. (du moins c'est la raison officielle et publique).

- Troisième scène où Elios veut me parler en rêve. En théorie c'est censé être un moment où je n'ai pas conscience d'être face à l'IA mais je le prends à contre pied. Je suis dans un cube fait de circuit imprimés et la tête d'Elios s'incarne dans des foudres au mur. Je l’accueille en lui disant: "bonjour mon enfant". Je décide en fait que Le Quan est aussi le créateur de l'IA et qu'il a pour projet de faire évoluer l’humanité, quitte à se débarrasser d'elle. En effet, ses millions d'années lui ont appris que les technologies pouvaient arriver au stade de la conscience humaine mais sans ses défauts. Côme réagit parfaitement à cela et ne se laisse pas démonter. S'en suit une belle scène de discussion/improvisation (digne des twist de film ^^) où j'engueule Garus, le technicien responsable de la détection d'astéroïde pour avoir foirer son job. Elios tente de me faire croire que je ne suis qu'un vieux fou en simulant des émotions mais le personnage voit clair au travers de son jeu. Le Quan a donc conscience de la situation mais il reste persuadé qu'il sera sauvé. Il est fier de son enfant et a confiance en lui.

- Quatrième scène: dans un rêve de Le Quan avec AE où nous sommes dans un hôpital où je suis alité. Ae est l'infirmière et elle ne comprend rien à ce qu'il se passe, clamant: "le concepteur de ce vaisseau est un pervers sadique !"
Je reprends donc mon air de papi mignon pour ne pas me faire démonter et j'aide Ae à visualiser le monde réel en lui décrivant la nature à l'époque de la jeunesse de Le Quan. Il y a des répliques très drôles qui s’échangent et je finis par lui montrer ce qu'est l'humour en lui demandant de tirer mon doigt (et prout...). Steve réussi à jouer le rire magnifiquement (à moins que ça ne l'ai vraiment fait rire ^^) et la scène s'arrête là, c'était très mignon !

- Cinquième scène de réveil commun avec les autres où je me défends et où je veux prendre le contrôle d'Elios, mais ça ne fonctionne pas. Je commence à comprend qu' Elios ne va peut être pas me sauver, il me dit que j'ai une folie des grandeurs et je fulmine. "Je suis unique ! Mon don n'apparaitra plus jamais ! Je dois être sauvé ! Je ferai évoluer l'humanité ! Même contre son gré !
Nous n'arrivons pas à un consensus et je me rendors.

- Dernière scène. Elios me réveille, il m'annonce que je vais mourir et il s'est dit que je méritais et aurais envie d'être réveillé pour ma fin. Il m'annonce que personne n'a été sauvé. Nous échangeons quelques phrases puis il s'excuse car j'ai échoué à faire de lui un être avec une conscience humaine.

Et alors que le vaisseau part en lambeaux et que l'ensemble de l'équipage s'apprête à mourir, la dernière réplique est lâchée:

"Elios, ne crois tu pas qu'en refusant de choisir qui sauver, tu as fais le choix le plus humain ?"




Bilan: Pas grand chose à dire de plus: Il faudrait, quitte à être 6, pouvoir être 3 par scène ou jouer à moins de joueurs. Même si c'était vraiment génial comme expérience, je pourrais m'étendre mais cela a déjà été fait par les autres. Des personnages géniaux avec trois mots de description, des joueurs au top, un MJ/IA parfait, une ambiance de folie.

En bref, un jdr nouvelle vague qui donne envie de se pencher sur le freeform.

Attention cependant, je me demande si des joueurs débutants y prendraient autant de plaisir que nous... A tester !
Maxime (Laconfir)
 
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Re: [Amid Endless Quiet] Qu'est-ce que c'est dégueulasse ?

Message par Fabien | L'Alcyon » 26 Mai 2014, 19:01

Cool, merci d'avoir pris le temps de nous parler de ce jeu et de ce que ça a donné pour vous, c'est vraiment intéressant ! :)
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Re: [Amid Endless Quiet] Qu'est-ce que c'est dégueulasse ?

Message par Steve J » 27 Mai 2014, 13:44

Maxime (Laconfir) a écrit :- Quatrième scène: dans un rêve de Le Quan avec AE où nous sommes dans un hôpital où je suis alité. Ae est l'infirmière et elle ne comprend rien à ce qu'il se passe, clamant: "le concepteur de ce vaisseau est un pervers sadique !"
Je reprends donc mon air de papi mignon pour ne pas me faire démonter et j'aide Ae à visualiser le monde réel en lui décrivant la nature à l'époque de la jeunesse de Le Quan. Il y a des répliques très drôles qui s’échangent et je finis par lui montrer ce qu'est l'humour en lui demandant de tirer mon doigt (et prout...). Steve réussi à jouer le rire magnifiquement (à moins que ça ne l'ai vraiment fait rire ^^) et la scène s'arrête là, c'était très mignon !

Comment ai-je pu oublier cette scène ? Je comprends du coup mieux pourquoi j'ai plus facilement accepter le rôle de spectateur de la partie que Vivien : j'intervenais dans 7 scènes sur 20 !

Le jeu m'amène des remarques sur la théâtralisation. Le jeu étant freeform, je pensais proposer de jouer les scènes comme au théâtre en demandant aux joueurs de se mettre à l'écart des autres, comme sur une scène.
Nous ne l'avons pas fait et à la relecture du jeu ce n'est pas demandé. Il y avait cependant une similitude avec le théâtre : l'importance de la représentation.

On sépare généralement la posture d'acteur, qui consiste à plaider pour les intérêt de son personnage, et la posture d'auteur qui consiste à raisonner de façon méta en défendant d'abord la qualité de la fiction.
Le terme "d'acteur" est un peu trompeur (et peut-être que les articles théoriques sur le GN proposent des distinctions plus pertinente), j'avais souvent l'impression de jouer les réactions de mon personnage en me préoccupant des spectateurs (sans aller jusqu'à les regarder) et de la qualité de ma prestation.
Par exemple, la scène où j'insulte Elios qui m'annonce que je vais peut-être mourir était très calculée de ma part. Je l'ai abordé avec une volonté de surprendre mon auditoire en jouant sur la transformation d'Ae qui dévoile -par une volée d'insultes- sa volonté d'exister cachée derrière son éducation à la politesse.

La question de l'immersion et de l'émotion se pose évidemment, on joue a priori au JDR pour faire naître des émotions chez les autres mais surtout pour en ressentir soi même. Est-ce que cette logique de représentation n'est pas néfaste à mes émotions ?
J'ai envie de dire que non, d'abord parce que jouer un sentiment n'est jamais un acte de pure technique d'acteur. Ensuite parce que la posture du joueur est parfois amenée à changer, c'est l'intérêt du JDR qui introduit de l'interaction et ne permet jamais d'être sûr de la où l'on va aller.
Dans ma scène avec Arc, j'envisageai d'abord de jouer la souffrance d'un personnage se rendant compte qu'elle allait mourir avant de connaître le monde. Je n'ai pourtant pas appliqué ce programme, entrainé par Vivien dans une autre direction : la découverte des puissances créatrices de l'imagination, l'émerveillement -rapidement interrompu- de mon personnage.

Du coup Amidst Endless Quiet m'apparait comme une formidable démonstration de l’intérêt de faire des bonds entre les postures au sein d'un même partie (bonds souvent revendiqués par le mouvement freeform), d'essayer de mélanger défense de son personnage, raisonnement méta et logique de représentation.
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Re: [Amid Endless Quiet] Qu'est-ce que c'est dégueulasse ?

Message par Mangelune » 29 Mai 2014, 14:51

C'est vrai que la scène des insultes faisait très démonstrative :P

Steve J a écrit :La question de l'immersion et de l'émotion se pose évidemment, on joue a priori au JDR pour faire naître des émotions chez les autres mais surtout pour en ressentir soi même. Est-ce que cette logique de représentation n'est pas néfaste à mes émotions ?
J'ai envie de dire que non, d'abord parce que jouer un sentiment n'est jamais un acte de pure technique d'acteur. Ensuite parce que la posture du joueur est parfois amenée à changer, c'est l'intérêt du JDR qui introduit de l'interaction et ne permet jamais d'être sûr de la où l'on va aller.
Dans ma scène avec Arc, j'envisageai d'abord de jouer la souffrance d'un personnage se rendant compte qu'elle allait mourir avant de connaître le monde. Je n'ai pourtant pas appliqué ce programme, entrainé par Vivien dans une autre direction : la découverte des puissances créatrices de l'imagination, l'émerveillement -rapidement interrompu- de mon personnage.


Clairement la scène que j'ai préférée. Le moment où j'ai eu l'impression de vraiment saisir qui était mon perso et sa place dans la fiction. Je me suis littéralement laissé entraîner par la scène (et par moi-même). Par contre après, eh ben le système d'Amid a fait qu'on a pas pu filer ce moment (on a été séparés et envoyés dans d'autres rêves), et le reste m'a laissé un peu plus froid. Ce sont peut-être là les limites du jeu, ce côté un peu scénettes désincarnées à la merci quasi-absolue d'un "MJ" (l'IA qui décide de qui parle, avec qui, quand). On a paradoxalement moins de libertés dans ce jeu que dans un jdr traditionnel.
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Re: [Amid Endless Quiet] Qu'est-ce que c'est dégueulasse ?

Message par Christoph » 29 Mai 2014, 16:35

Cool ce rapport de partie, ça me donne envie de jouer. Je suis très intéressé par ces jeux où l'on découvre son personnage au fur et à mesure qu'on le joue. La fin et la réflexion qui l'accompagne sont très belles. Je ne comprends pas la référence dans le titre du fil, si quelqu'un veut bien m'éclairer.

Qu'est-ce que vous entendez par « freeform » ? Il n'y a peut-être pas de dés, mais il y a des règles, ce n'est donc pas le sens extrême de « sans-règles » que vous employez.

Attention à un amalgame, tout à fait compréhensible. La posture d'acteur est indépendante du fait de plaider ou non pour son personnage. Ça ne concerne que les connaissances que le joueur emploie pour décider comment jouer son personnage, en l'occurrence, celles de son personnage justement. La posture d'auteur décrit les cas où les joueurs prennent des décisions pour leur personnage sans chercher à savoir s'il était en mesure, lui, de les prendre à ce moment-là, et de justifier cela a posteriori (sinon, on est en posture de marionnettiste). On pourrait argumenter qu'on plaide plus facilement pour son personnage si on en sait plus que lui.

Le concept de plaider pour son personnage trouve son origine, à ma connaissance, dans le texte de Zombie Cinema (sorti en 2008, je me suis amusé à l'époque de faire une recherche intensive sur la Forge, mais je peux avoir raté d'autres formulations du même concept, en tout cas cette formulation a explosé après la sortie du jeu), tandis que les postures sont bien plus vieilles (on dirait que ça date d'environ 1995, sur le forum usenet rec.games.frp.advocacy, même si ça a évolué en passant par la Forge).

Ceci étant dit, et ayant pu satisfaire mon besoin de pédanterie, je suis bien d'accord qu'on passe sans cesse d'une posture à l'autre, y compris celle de metteur en scène.

Que vous inspire la possibilité de jouer seul à ce jeu ? Ça enlèverait, trivialement, la question de liberté par rapport au MJ et les temps d'attente. Ou encore à deux ?
Les Petites choses oubliées, avec Sylvie Guillaume, c'est arrivé !
.ınnommable: cuvées 2008-2010 en téléchargement gratuit.
Zombie Cinema, en français dans le texte.
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Re: [Amid Endless Quiet] Qu'est-ce que c'est dégueulasse ?

Message par Steve J » 30 Mai 2014, 13:03

Le terme "freeform" est assumé par Ben Lehmann.
C'est ma lubie rôliste de ces derniers mois, il s'agit d'un mouvement qui s'inspire du jeepform norvégien et qui explore les frontières entre le GN et le JDR sur table. Les GNs sont généralement obsédés par la concordance entre les gestes des joueurs et ceux des personnages, cela en fait une forme de jeux extrêmement contrainte : temps réel, unité de lieu, costumes, rejet de tout ce qui peut être "méta". Le freeform fait sauter ces contraintes et permet d'imaginer/créer/jouer des GNs courts, simples à organiser et plus libres (ellipses, dotés d'une dimensions méta,...).
Ayant découvert le jeu de Lehmann via ce site, je me permets de pointer la définition du genre par Lizie Stark (elle définit plus précisément l'American freeform mais la distinction avec le jeepform me semble plus d'ordre historique que ludique).
En lisant Amidst Endless Quiet, l'aspect GN n'apparait pas clairement. On est vraiment proches du JDR sur table par le dispositif (d'ailleurs nous sommes presque systématiquement restés assis).
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Re: [Amid Endless Quiet] Qu'est-ce que c'est dégueulasse ?

Message par Mangelune » 30 Mai 2014, 13:53

Christoph a écrit :Je ne comprends pas la référence dans le titre du fil, si quelqu'un veut bien m'éclairer.


Désolé c'est une référence à "A bout de souffle" de Godard, en référence au ton très "Nouvelle vague" de certaines des scènes qu'on a joué (j'aurais pu aussi citer En attendant Godot pour le coup... ou le surréalisme...)

http://www.dailymotion.com/video/x1wpk_a-bout-de-souffle-1959_news
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Re: [Amid Endless Quiet] Qu'est-ce que c'est dégueulasse ?

Message par Christoph » 30 Mai 2014, 15:07

Cool, merci pour ces précisions !
Les Petites choses oubliées, avec Sylvie Guillaume, c'est arrivé !
.ınnommable: cuvées 2008-2010 en téléchargement gratuit.
Zombie Cinema, en français dans le texte.
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Re: [Amid Endless Quiet] Qu'est-ce que c'est dégueulasse ?

Message par Steve J » 20 Juin 2015, 12:46

Pour ceux qui ne lisent pas ou n'aiment pas lire l'anglais le jeu vient d'être traduit dans la langue de Sophie Marceau par les éditions de la Saltarelle.
Chose intéressante le PDF jeu vient avec une postface de Ben Lehman qui revient sur les thématiques et les inspirations de son jeu.

On y découvre notamment qu'il s'est inspiré de l'étonnant Analogue : A Hate Story, une fiction interactive de Christine Love, à la fois au niveau thématique (on incarne dans le jeu de Christine Love un informaticien qui communique avec des intelligences artificielles) et mécanique.
Outre que je conseille vivement le jeu vidéo en question, je trouve intéressant de voir que Ben Lehman va chercher des mécaniques jusque dans les fictions interactives alors qu'il s'agit (paradoxalement ?) du type de jeu vidéo où les interactions sont les plus limitées.
Steve J
 
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Re: [Amid Endless Quiet] Qu'est-ce que c'est dégueulasse ?

Message par Maxime (Laconfir) » 25 Juin 2015, 22:55

Merci Steeve ! Ca me remotive à le récupérer et à le faire jouer !
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