[Inflorenza Minima] Orchidée

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[Inflorenza Minima] Orchidée

Message par Thomas Munier » 27 Juin 2016, 08:08

ORCHIDÉE

Une fable poétique et déchirante pour cette première partie d'Inflorenza minima sans aucune préparation.

Jeu : Inflorenza Minima, le jeu de rôle des contes cruels dans la forêt de Millevaux

Joué le 26/02/2016 chez l'habitante, dans le cadre de la tournée Rennes est Millevaux

Personnage : Elle.

Image
photomontage réalisé pour l'occasion par Simon "Angeldust" Li, licence cc-by-bc-nd, stocks par skeeze, Isatsza, tpsdave, domaine public


Feuille de personnage :
(elle n'a pas de nom)
Objectif : Souder une communauté pérenne
Symboles : orchidée, confiance


L'histoire :

Ils étaient deux groupes, qui se sont rencontrés dans la forêt et ont décidé de mettre leur destin en commun. Elle, et son ami, le taciturne Elias. Et de l'autre côté, les parents, Orge la femme et Mari l'homme, et leur fils Fève. Ils ont trouvé une rivière et ont décidé d'installer un campement en son creux. Elle croit beaucoup en ce projet de communauté et veut la rendre pérenne.

Mari et Orge doivent partir chasser. Ils lui confient la garde de l'enfant, à elle, pas à Elias : ils manquent de confiance en lui.

Fève a aperçu une orchidée au fond des bois, pourtant elle ne la voit pas. L'enfant insiste pour aller la chercher, alors elle l'accompagne jusqu'à une ravine au milieu des arbres, où pousse une magnifique orchidée blanche. Elle n'en a jamais vu de telle. Fève tombe amoureux de la fleur, au point que c'est désormais la seule chose importante pour lui. Il veut arracher la fleur pour la replanter dans sa poitrine, mais elle le lui déconseille : la fleur pourrait mourir. Elle lui propose au lieu de cela d'aller la revoir régulièrement avec elle.

Quand elle revient plus tard avec l'enfant, l'orchidée a fané. L'enfant veut en garder à tout prix le souvenir, alors elle lui propose de lui apprendre à écrire et à dessiner. L'enfant accepte, il lui tire le carnet qu'elle a toujours sur elle et lui demande de lui montrer tout de suite, tant qu'on peut dessiner l'orchidée. Elle sent qu'au fur et à mesure qu'elle lui montre les techniques, l'enfant lui draine son talent, comme s'il était tiré de son sang. Elle renonce alors sciemment à savoir écrire et dessiner pour que l'enfant puisse reproduire le souvenir de l'orchidée, ce qui correspond aussi à laisser une partie du sort de la communauté entre ses mains, pour ce qui est de tenir le journal et les itinéraires. L'enfant promet qu'il s'en occupera.

Des jours passent. Les réserves en chasse et en cueillette de leur territoire s'épuisent, alors Elias veut aller explorer un nouveau territoire qu'il juge fertile, pour en faire un terrain de récolte régulier. Il veut prendre l'enfant avec lui, pour qu'il garde trace de leur itinéraire par l'écrit et le dessin. Comme Mari se méfie de ce qu'il pourrait arriver à l'enfant seul avec Elias, il les accompagne pour un voyage de quelques jours.

La nuit tombée, elle est seule au coin du feu avec Orge. Orge en profite pour lui déclarer son amour, lassée d'une liaison exclusive avec Mari. Orge essaye de l'embrasser.

Par le passé. Elle et Elias étaient harcelés par les loups affamés, et c'est au cours de cette fuite qu'ils ont rencontré Mari, Orge et Fève, et ont fui ensemble. C'est pendant cette fuite, lors d'un bivouac auprès du feu, qu'Orge a proposé de former une communauté durable. "Je veux qu'on forme une famille."

Retour au présent. Elle repousse Orge et sa tentative de baiser. Elle lui dit d'en parler avec Mari d'abord, qu'il accepte ses désirs, qu'il accepte la position d'Orge d'en finir avec la monogamie.

Elias, Mari et Fève reviennent avec le fruit de leur récolte. Pour fêter le succès de l'expédition, ils utilisent ces victuailles pour improviser un banquet au coin du feu. Quand Elias et Fève sont allés se coucher dans leurs baraques respectives, elle se retrouve près du feu avec seulement Orge et Mari. Orge annonce alors à Mari qu'elle veut vivre une aventure avec elle. Les yeux de Mari se mettent à exprimer une émotion nouvelle, une grande surprise, une grande colère, un grand mépris. De rage, il empoigne Orge pour lui plonger la tête dans le feu. Elle s'interpose, se met en danger elle-même pour protéger Orge, et dans la lutte, c'est elle dont Mari brûle le visage. Elle sera pour toujours défigurée.

Elias et Fève accourent. Avec Orge, ils s'apprêtent à lapider Mari pour ce qu'il a fait, mais elle leur somme de se retenir. La pérennité de la communauté compte plus que tout. Mari doit rester parmi eux, malgré ce qu'il vient de commettre.

Plus tard. Fève vient la trouver. Il se plaint que Mari dépérisse, il se sent coupable et Orge le rejette. D'ailleurs, elle sait bien, vu la promiscuité de leur campement, qu'Orge et Mari ne font plus l'amour depuis cette affaire. Elle propose à Fève de redonner un peu de fierté à Mari : ils vont lui donner un nom parce qu'il n'en avait pas vraiment jusqu'alors, et ce nom sera Espoir.

La nuit, autour du feu, ils organisent une cérémonie de remise du nom. Elle se tient en face de Mari, de l'autre côté du feu. Elle le somme de s'approcher du feu autant qu'elle, pour prouver sa confiance. Puis elle lui dit qu'il doit plonger son visage dans le feu pour y trouver son nom. Il tremble de tout son corps, mais il le fait, il se brûle le visage, et une fois qu'il le ressort du feu, tout couvert de cloques, elle lui donne son nouveau nom : Espoir. Mari pleure de douleur et de soulagement, et quand ses larmes tombent sur le sol boueux, il en fleurit de minuscules orchidées.

Le lendemain matin, incapable d'en supporter davantage, Orge quitte la communauté. Ils s'abstiennent de tenter de la faire revenir.

Plus tard. L'hiver a été rude, partout la neige et le froid. Poussés par la faim, les loups ont fini par encercler la communauté. Meute de loups noirs, tout autour. Sur l'autre rive enneigée de la rivière, une louve blanche, la cheffe de meute. Elle s'adresse aux humains d'une voix rauque : s'ils se défendent, ils les tueront tous. Si au contraire, l'un d'eux se sacrifie pour les nourrir, alors ils épargneront les autres et les protégeront pour la durée de l'hiver, car un sacrifice est une chose sacrée. Elle insiste pour que la louve s'engage à protéger la communauté pour le restant de ses jours, justement en respect du caractère sacré d'un sacrifice, ce qu'elle accepte.

Espoir veut se sacrifier, mais elle refuse. Il représente l'espoir de cette communauté, et son combat serait vain si c'était lui qui partait. Elle veut le faire. Fève essaye de la retenir, il ne veut pas l'oublier. Elle lui dit qu'il pourra maintenir sa mémoire et son message, en la dessinant. Mais depuis le début, l'enfant n'a jamais dessiné que l'orchidée. Il ne sait dessiner qu'une chose. Il a le choix entre encore dessiner l'orchidée ou maintenant la dessiner elle.

Avec Fève, elle explore leur passé, dans la ravine, ce matin où elle lui a appris à dessiner. Il se fait violence et dessine le visage d'elle au lieu de dessiner l'orchidée. Il lui demande d'arracher l'orchidée, car lui n'en a pas la force, alors elle le fait, elle arrache l'orchidée. La fleur est palpitante de sang, elle ne demandait qu'à s'enraciner dans un cœur.

Elias veut se sacrifier à la place d'elle, il s'est toujours senti le maillon faible. Elle refuse. Il la prend dans ses bras. Il pleure, et alors que les larmes lui ravinent le visage, y poussent de minuscules orchidées.

La louve blanche dit qu'il est temps.

Alors elle jette un dernier regard à ceux qu'elle a aimés, puis se tourne vers la louve qui est sur la rive opposée.

Et elle entre dans la rivière.


Commentaires :

On a joué une heure et demie.

Cette partie est spéciale dans le sens où c'est la première fois que je lance un Inflorenza minima sans avoir rien prévu, pas même une accroche ou un thème.

Ce qui s'en rapprochait le plus auparavant, c'était L'Inconnu, mais il y avait quand même un théâtre, fut-il limité à six mots. Ici, on a commencé par définir l'objectif du personnage et on s'est complètement laissé porter par ça.

Ce fut aussi l'occasion de tester pour la première fois la playlist Millevaux, avec les titres les plus fragiles du catalogue : une grande réussite là aussi.

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Sphere from the woods, par Empusae, de l'ambient ritualiste pour un parcours animiste dans la forêt des rêves perdus.

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Mare Decendrii, par Mamiffer, du piano / ambient / post-rock / noise à chant désincarné pour une mise en lumière de la désolation.

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Come the Thaw, par Worm Ouroboros, musique gothique avec guitares tantôt classiques tantôt doom, autour du chant fragile d'une biche qui n'en finit pas d'attendre le dégel.


La combinaison du jeu sans préparation et de la playlist mobile (parce que sur internet) et actionnable depuis n'importe quelle machine sans avoir besoin de créer aucun compte est un solide aboutissement personnel : jouer à Millevaux devient un exercice spontané.

Et le résultat était la hauteur : la partie fut à mes yeux aussi intéressante que si j'avais préparé : moins ambitieuse, mais plus brute, spontanée, sincère. Élégante.
Énergie créative. Univers artisanaux.
http://outsider.rolepod.net/
Thomas Munier
 
Message(s) : 2003
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