Rôlistes, soyons fiers de notre loisir

Réflexions et billets d'humeur

Rôlistes, soyons fiers de notre loisir

Message par Fabien | L'Alcyon » 05 Mai 2015, 10:17

J'aimerais réagir au buzz créé par deux vidéos du Joueur du Grenier, récemment publiées, une série appelée Aventures:
En soi, l'intention est louable: faire découvrir le jeu de rôle et donner envie d'y jouer à travers une présentation vidéo d'une partie. Cependant, je me sens mal à l'aise face à la réaction enthousiaste et très positive des rôlistes. Cela m'interroge parce que je ne me reconnais pas du tout dans cette représentation, essentiellement sur trois points:
  • un univers médiéval fantastique « à l'ancienne »
  • un jeu très traditionnel, où le meneur raconte les effets des actions des personnages (voire les actions des personnages eux-mêmes) et oriente leurs choix, l'action se déroule tour par tour
  • 5 hommes autour d'une table
En plus de cela le début me met très mal à l'aise: une blague sur le viol, sans aucune réticence de la part des autres; en plus d'être en soi sexiste, ça contribue à une image du milieu rôliste qui n'est certainement pas le meilleur moyen de faire sentir aux joueuses qu'elles sont les bienvenues dans le milieu (surtout si le but est donner une idée de ce qu'est le jeu de rôle).

Je ne me reconnais pas du tout dans cette représentation du jeu de rôle et je n'ai pas envie d'être représenté comme ça. J'ai l'impression de voir une caricature de jeu de rôle comme on le pratiquait quand j'étais ado (et encore).
Je sors d'un week-end prolongé où j'ai joué 5 parties de 5 jeux différents, aucune d'entre elles ne ressemblaient à cela. Si je pense à mes 5 dernières années de jeu de rôle, aucune de mes parties ne ressemble à cela. Mais peut-être est-ce ma pratique personnelle trop différente des pratiques majoritaires du monde rôliste (j'en doute tout de même, les rôlistes sont plus curieux que ça).
L'excuse de dire qu'on présente le jeu de rôle comme il serait « classiquement » ne me convainc pas: il me semble que sont (involontairement) accumulés ici des clichés sur le jeu de rôle qui ne correspondent plus du tout à sa réalité (même si oui, parfois ça arrive de faire du jdr très tradi, parfois ça arrive de jouer dans un jeu à l'ancienne, parfois ça arrive de ne jouer qu'entre hommes alors qu'on est cinq). Je sais bien qu'on ne peut représenter le jeu de rôle dans toute sa diversité en une seule fois, je ne demande à personne de le présenter immédiatement avec Les Cordes Sensibles de Frédéric Sintes, mais pourquoi avoir choisi spécifiquement cette image ? (oui, je sais qu'on ne choisit pas toujours les gens avec lesquels on joue, mais ils avaient au moins la main haute sur l'univers et le système)
Bref, je suis vraiment déçu. Ce n'est pas comme ça que je veux être représenté. Je ne crois pas que ce soit le jeu de rôle tel qu'il est pratiqué en majorité, ce n'est pas notre jeu de rôle à tous.

Mais à nouveau, en soit, la vidéo est ce qu'elle est, avec ses limites. Si cela correspond sincèrement à leur pratique, pourquoi pas.
Ce qui m'interroge vraiment c'est l'accueil enthousiaste du monde rôliste et le peu de critiques (même bienveillantes). Évidemment, je suis content que quelqu'un d'aussi en vue dans la culture pop que le JdG fasse parler de notre loisir et j'imagine que non seulement ça doit demander un sacré travail d'organisation (surtout pour le meneur), mais en plus le logiciel limite les possibilités. Mais je regrette que les rôlistes ne soient pas plus exigeants sur la représentation de leur propre loisir. Oui c'est bien qu'on parle de nous, c'est encore mieux si on nous représente sous notre meilleur jour. Au fond, est-ce que nous avons tellement peu confiance de notre loisir que toute publicité est bonne, quel qu'elle soit ? Est-ce que vos expériences de jeu ne sont pas plus enthousiasmantes que celle qui est présentée ici ?

Cet anecdote illustre donc cœur de mon interrogation: les rôlistes manquent-il de confiance en eux ?
Pour ma part, je crois que c'est le cas.

Je crois que nous pourrions être nettement plus fiers de notre loisir. Nous devrions affirmer qu'il nous apporte énormément (j'avais beaucoup aimé cette initiative, trop peu suivie d'effets), qu'il peut être élevant, enthousiasmant, nous mener là où nous ne pensions pas aller et peut nous amener à des réflexions profondes sur nous mêmes sans perdre de plaisir de jeu. Je crois que nous pouvons affirmer que nos pratiques ont évolué et se sont enrichies, grâce à des auteurs exigeants, à des éditeurs de qualité comme John Doe et à tous les meneurs et joueurs qui partagent leurs expériences et leurs pratiques (entendons-nous bien, je n'adhère de loin pas à tous les conseils et pratiques, mais je constate que ça aide beaucoup de gens à se développer et à s'épanouir). Le jeu de rôle grandit et c'est une excellente chose.
L'autre versant de cela, c'est d'exiger plus de nos pratiques et de nos jeux. Exiger qu'ils abordent de nouveaux univers (y compris des cultures de l'imaginaire, qui sont bien plus vastes que celles que le jeu de rôle aborde aujourd'hui), qu'ils proposent d'autres expériences de jeu que celles auxquelles nous sommes habitués, vouloir explorer de nouveaux territoires ludiques. Cela suppose de prendre le temps de découvrir de nouveaux jeux, de risquer de s'ennuyer occasionnellement pour trouver des pratiques et des jeux qui nous plaisent plus et de sortir de ce que nous connaissons déjà. Il nous faut nous méfier de notre nostalgie et du ressassement de nos propres « classiques » pour découvrir d'autres continents.

Le jeu vidéo, né à peu près en même temps que le jeu de rôle et aux publics proches, a su prendre ce tournant il y a un moment, et offrir des jeux et des expériences ludiques nouvelles, audacieuses et s'affirmer comme un loisir et un média à part entière (sans que ça inquiète le moins du monde celles qui existaient déjà). Certes il lui reste du chemin pour atteindre la profondeur du cinéma ou de la littérature, mais il est en bonne voie de les rejoindre.
Le jeu de rôle, me semble-t-il, a beaucoup plus de mal à faire ce tournant. Bien sûr, la comparaison est fausse, le jeu vidéo est d'une taille infiniment plus grande que le jeu de rôle (à la fois en termes de nombre de pratiquants et de taille de marché économique). Mais la taille modeste de notre communauté ne devrait pas nous empêcher d'être fiers d'être rôlistes et exigeant envers nos pratiques. Cette comparaison devrait au moins nous inviter à réfléchir au problème.
Ma petite théorie pour la France est que nous ne nous sommes toujours pas remis de la crise du milieu des années 1990 et la mauvaise image donnée par Mireille Dumas et consorts. Bien que cette crise ait disparu, nous avons intégré l'envie de paraître inoffensifs, de ne pas faire de vagues, de limiter le jeu de rôle à un divertissement d'ado sans conséquences. Nous avons intégré la critique qui a failli nous détruire.

Je crois que nous méritons mieux, je crois que le jeu de rôle mérite mieux.

Au plaisir de vous lire. Je me doute bien que le sujet est sensible, je compte sur chacun pour conserver une lecture charitable des autres.
Fabien | L'Alcyon
 
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Re: Rôlistes, soyons fiers de notre loisir

Message par Romaric Briand » 05 Mai 2015, 12:59

J'aurai vraiment du mal à discuter le moindre point puisque je suis entièrement d'accord avec toi. J'ai d'ailleurs eu l'occasion de m'exprimer également sur ce sujet dans le thread de l'émission sur le forum Casus No.

Même si l'envie de promouvoir le jeu de rôle m'a initialement motivé à créer La Cellule, je pense aujourd'hui que le crédo du "on fait ça pour promouvoir le jeu de rôle" a vécu et doit disparaître. Il n'y a plus aucune raison de croire qu'il s'agisse d'un média menacé. Le jeu de rôle est maintenant connu et reconnu de toute la population francophone. Aujourd'hui, ce crédo, malheureusement, a tendance a plutôt favorisé l'exploitation des passionnés ("Tu fais ça pour le jeu de rôle, c'est une vocation, un sacerdoce, tu ne vas quand même pas te faire payer pour ça ?") ou bien à couvrir de gloire des initiatives qui ne sont pas aussi bonnes que cela.

Le jeu de rôle est maintenant connu. C'est à nous, auteurs et créateurs de jeu, de trouver un modèle économique qui convienne à son développement. L'important, c'est de continuer la production de bons jeux. Promouvoir le jeu de rôle classique des années 70/80, ce n'est pas faire tant de bien que ça à ce média. Ce qui fait du bien à ce média, ce sont les bons jeux.

Pour autant, même si, selon moi, ils ne le font pas pour LE jeu de rôle, si le JdG et ses potes se font plaisir avec cette émission, c'est qu'elle est excellente pour le jeu de rôle qu'ils aiment. Et sur ce point, on ne peut que leur souhaiter une "bonne chance" et de "bons moments".
Un personnage de fiction souhaitant s'incarner dans la réalité... Les rolistes sont mes proies...
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Re: Rôlistes, soyons fiers de notre loisir

Message par Arjuna Khan (Fabric) » 05 Mai 2015, 13:44

Je pense que il faut aussi bien se rendre compte de qui a fait cette vidéo. De ce que j'ai compris le jdg a fait du jdr étant ado et a repris récemment avec des potes à lui qui ont également une expérience plutôt ancienne du média. Du coup, ils reproduisent simplement l'expérience qu'ils ont connu ou aimé. Et c'est justement pour ça que cette vidéo est intéressante ! Un rapport du thiase dont je n'ai plus exactement les statistiques en tête disait que la majorité des rolistes jouaient entre eux, hors du cercle associatif. Et de mon expérience en virtuel où ce type de public semble beaucoup plus présent qu’ailleurs, j’ai le sentiment que le jdg et sa bande appartiennent à ce type de public. Qui souvent n’ont pas forcément une attitude trés curieuse via à via du jeu de rôle puisque cela reste avant tout pour eux une occasion de s’amuser entre potes. Le plaisir classique du “tunning” en jdr et d’une activité ludique leur suffit amplement. C’est juste un moyen de varier les activités quelque part et il pourrait tout aussi bien être assis autour d’une table à bouffer des springles.


La blague sur le viol je pense est le reflet de ça, une bande de pote qui déconne. Ca apportera donc son lot de remarque sexiste, homophobe, raciste et xénophobe. Déjà parce que c’est l’humour du jdg et de ses potes et c’est aussi l’humour d’énormément de rolistes femmes compris. Ce n’est peut être pas ton expérience mais moi qui ai tourné sur pas mal d’associations sur le grand toulouse, j’ai vu beaucoup de choses de genre. Des femmes limité à leur potentiel sexuel, des étrangers représenté à la caricature qu’il sucite, c’est hélas mon lot quotidien. J’ai jamais passé une année sans entendre des :

Je vais lui montrer mes seins pour le convaincre
Si je t’encule tu parles ?
Avec une robe comme ça elle doit être chaude du cul !

Je veux dire c’est l’image de notre société. Quelque part on a le jeu de role qu’on mérite. On vit dans une société peut être un peu réactionnaire, dont l’humour repose pas mal sur la dépréciation de l’autre, sur la classification des individus et je ne vois pas pourquoi le jdr montrerai autre chose. C’est plus honnête quelque part. Je pense que montrer le public curieux des conventions, les jdrs alternatifs, innovant, hybride comme représentation de ce qu’est le jeu de rôle aujourd’hui est intéressant mais n’est pas représentatif du tout. Car il y a encore beaucoup de table qui joue à des jeux anciens, à des jeux datés car ils ne voient pas l'intérêt d’aller plus loin. De mon ressenti, les jeux innovant voir allons y disons le mot jdr non tradi (j’aime pas du tout ce terme car je le trouve clivant mais bon par commodité on va dire que ça passe) n’ont pas un tel retentissement au sein des tables privés.


Il en est de même pour ta perception des tables sans fille qui ne serait pas normal ou désuette. Personnellement en table privé je ne connais que des tables essentiellement masculine. En convention, sur certaines plate forme virtuelles c’est différent mais en table privé je ne connais que ça. Surement parce que comme je le disais plus haut la proposition est limité et peu donner le sentiment d’une pratique plutôt répétitive et laborieuse pour un public nouveau.


Je ne me sens pas représenté par ce jeu de rôle, pas plus que toi fabien. Mais j’ai conscience si on tentais de mettre l’activité jeu de rôle dans une case je serais plutot dans un coin est sur le bord. Je trouve ta remarque sur mireille dumas si ce n’est pertinente du-moins intéressante. Je n’ai moi même pas connu cette époque donc je ne me sens pas concerné mais ça a sûrement eu un impact oui je pense.

Je ne dirais pas que les rolistes manquent de confiance en eux. Juste que la force des habitudes a beaucoup conditionné et que l’habitude tend à nous diriger vers ce qui nous rassure. Un tient vaut mieux que deux tu l’auras comme disent certain. Mais à contrario je crois que le changement de génération qui arrivera au fil du temps aménera à faire beaucoup évoluer les mentalités.
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Re: Rôlistes, soyons fiers de notre loisir

Message par Steve J » 05 Mai 2015, 14:46

Pour ma part je ne tiens pas à entrer dans le débat sur le jeu présenté, et sur la volonté d'ouvrir l'horizon du JDR.
Le JDR tel qu'il est pratiqué ici ne me passionne pas mais ses participants y trouvent des qualités. Tant pis s'il ne me représente pas (et tant pis s'il ne représente pas le rôliste moyen, nos pratiques étant de toutes façon trop vastes pour être résumées dans un jeu unique).

Par contre je suis très gêné par le fait de voir autant de rôlistes encenser ces vidéos médiocres (et c'est quelqu'un qui apprécie les vidéo du JdG qui parle).
Comme si notre pratique était si douloureusement marginalisée qu'il fallait absolument accueillir comme le messie n'importe quelle vidéo semblant offrir la promesse d'une éventuelle démocratisation de notre loisir.
Sur un autre sujet Mangelunes parlait des deux épisodes de Community (nommés Advanced Dungeons and Dragons) présentant des parties de donjons et dragons. Il s'agit d’œuvres de fiction mais, alors qu'elles se focalisaient sur un JDR tout aussi tradi (Donjon donc) elles parvenaient à faire sentir les potentialités de notre loisir.
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Re: Rôlistes, soyons fiers de notre loisir

Message par Demerzel » 05 Mai 2015, 14:55

Si je puis me permettre, je souhaiterais également communiquer mon ressenti sur cette émission.

Tout d'abord j'en ai vaguement discuté avec d'autres personnes. Un non-rôliste a trouvé le concept amusant, il n'est pas plus intéressé par le JDR après cela, pour lui c'est juste un divertissement de plus dans la lignée JdG. Le logiciel utilisé est pour lui "génial". D'autres connaissances, rôlistes quant à eux, trouvent le concept amusant mais sans plus et d'autres sont comme moi : mitigés dans la négative.

Concernant le choix de la présentation. C'est personnel mais j'ai une profonde hantise des logiciels de JDR. Je ne les trouve pas ergonomique du tout. J'ai également l'impression en considération des vidéos que l'utilisation d'un logiciel réduit la proposition créative. Il semble y avoir une implication moindre qui tend plus au ludique (dans le sens : avoir des personnages et l'utiliser comme on le ferait dans un jeux vidéo, comme l'a écrit Arjuna précédemment).

Concernant la partie.
D'abord pour les joueurs, que ce soit par l'utilisation du logiciel ou peut être parce que c'est leur manière de jouer, j'ai beaucoup de mal à trouver la partie plaisante à regarder. Je n'ai d'ailleurs pas dépassé la moitié de la deuxième vidéo et j'ai dû regarder la première en deux fois. A mon sens il y a un manque cruel de roleplay et une overdose d'optimisation des choix. Ils ont l'air de rechercher essentiellement à finir le scénario. C'est peut-être un choix. "Aventures" se veut-il comme une partie scriptée qui a pour but de proposer un divertissement autour d'une histoire déterminée ou est-ce ce que le but est de relater de véritables parties de JDR ? Dans le second cas, cela semble compromis. Celui qui m'a le plus surpris (dans le bon sens du terme) est Bob Lennon qui doit être un joueur très plaisant autour d'une "vraie" table (au sens matériel, le meuble ^^). Il est investi et je n'aime pas beaucoup l'attitude de ses camarades quand il tente de faire des propositions créatives et qu'il se fait systématiquement rejeté sur fond de blagues vaseuses (depuis le début du jeu, il y en a au moins deux qui auraient pu voir leur personnage disparaître à cause de la perte de points d'immersions mais le MJ n'a pas décidé de prendre cette règle visiblement).
Ensuite le MJ. J'ai essayé de faire quelques recherches et il semble avoir travaillé sur quelques jeux de rôles. Après avoir testé quelques méthodes de meujeutage j'ai été convaincu par la prééminence du "principe de Lumpley", c'est-à-dire, selon ma pratique, à laisser les joueurs ajouter du contenu fictionnel tant que tout le monde autour de la table est d'accord avec la cohérence de la proposition (merci Grégory Pogorzelski). Ici, au contraire, le MJ va jusqu'à prendre le contrôle des personnages des joueurs. Au moins avec lui il n'y a plus le problème du "truc impossible avant le petit dej' " puisqu'il se permet absolument tout. Je n'évoquerais pas le dirigisme car c'est un choix de partie comme un autre, tout dépend des joueurs, si cela leur convient c'est le principal.

Je souhaite toutefois terminer sur une note plus nuancée. Seuls deux épisodes sont sortis à ce jour. Peut-être n'ont-ils pas fait de JDR depuis un certain temps. Ils sont rouillés et il leur faut donc du temps pour se remettre sur les rails. Je les apprécie en tant que créateurs de contenu divertissant mais je ne cautionne pas leur choix de présentation du JDR. L'avantage quand un média est peu connu c'est qu'on peut l'expliquer à d'autres avec nos propres mots. J'ai peur maintenant que si je parle de JDR on associe ma pratique à celle de ce groupe médiatisé. Quand on aime l'immersion, l'amusement dans l'investissement de soi dans une activité et les jeux de rôles originaux comment arriver à s'affranchir de la visions "traditionaliste" (et ça sonne jamais bien avec un "iste" à la fin !) med-fan et dans la déconne 99% du temps ... Je ne veux pas de ça pour mes parties !
Être fataliste sans tomber dans le fatalisme ? "Il est vrai que la lucidité est la blessure la plus rapprochée du soleil mais la puissance et l'obstination aveugleront tellement que nous serions encore capable de traverser les nuages sans voir les oiseaux et de traverser le ciel sans voir les étoiles." René Char.
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Re: Rôlistes, soyons fiers de notre loisir

Message par Prinnydad » 05 Mai 2015, 15:48

Etant moi aussi assez dérangé par l'aspect "le MJ décrit les actions des joueurs" (où est la liberté dans cela ?) et la plus vieille blague du monde, je partage une grande partie de ton propos. La vidéo du joueur du grenier parle seulement d'une partie assez réduite de la population rôliste, qui malheureusement est celle qui fait le plus parler d'elle, cachant de cet arbre unique la forêt de possibles que le jeu de rôle contient.

Quant à la question sur la confiance en soi, je pense qu'elle est justifiée, et j'y répondrai en disant que, selon moi, les rôlistes comme beaucoup d'autres gens n'ont pas le confort nécessaire vis à vis d'eux-même pour s'exprimer de la façon qui leur correspond.

Je m'explique :
C'est dur de dire ce que l'on pense, comme on le pense, et ces expressions de soi changent si l'on est seul, en groupe, ou même quand on dialogue. Le lexique nous manque, la compréhension aussi possiblement, on peut se rendre compte de choses seulement au moment où l'on commence à en parler, et ainsi de suite. Il y a un côté émergent à la connaissance de soi-même qui, je pense, nous concerne tous.

Ainsi, je pense que oui on peut parler de manque de confiance en soi, mais pas que.

J'habite sur Dijon, et la seule association de jeu de rôle que j'ai trouvé propose seulement des jeux fabrication maison, refusant la plupart des jeux à licence (même les indépendants, qui au final font le même travail qu'eux) et s'axant majoritairement sur les statistiques, faisant fi de la crédibilité le plus souvent. Et l'inadéquation entre système et propos ferait un coma philosophique à sieur Briand et aux autres théoriciens de l'extrême du jeu de rôle. Après moult tentatives d'introduire plus de RP, d'espaces de libertés, de chasser un peu le manichéisme et les archaïsmes, j'ai vite compris que beaucoup avaient au final peur de se lancer. La description les effrayent, ils plaquent donc des licences (Pokémon, One Piece et autres mangas) sur leur système de jeu, de même qu'ils favorisent les vannes sexistes au RP à la moindre occasion, les parties se résumant donc à des blagues hors RP et du grobillisme à l'ancienne, avec comparaison de matos et de statistiques gonflées à l’hélium.

Ainsi, le manque de confiance n'est pas la seule raison qui les pousse à s'enfoncer dans l'archaïsme du jeu de rôle, mais plutôt un manque d'audace. Certains seraient prêts à se lancer, entre amis, dans des campagnes sérieuses, mais la mécanique est bien huilée, et les efforts peu présents, et ça les satisfait. Ils ne se rendent pas encore compte que des efforts plus soutenus entraîneraient des sensations de jeu plus satisfaisante.

Pour ceux aillant écouter le podcast sur "Quand il y a deux MJ", je pense que les joueurs classiques doivent passer par une phase de "J'en ai marre de jeter des dés autour d'une table avec des bières, je veux plus que ça", tout comme Maxime est passé par là et le décrit dans ce podcast.

En bref, merci Fabien pour ce post, nous méritons bel et bien plus que ça, de sortir de l'archaïsme et d'explorer tous ces espaces de liberté encore inconnus qui nous passent sous le nez au quotidien !
Prinnydad
 
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Re: Rôlistes, soyons fiers de notre loisir

Message par Mangelune » 05 Mai 2015, 18:33

Il y a quelque chose que je n'ai pas assez mis en avant : je fais partie de ceux qui aiment beaucoup le joueur du grenier. J'ai apprécié ses débuts assez simples, j'ai bien aimé la complexification des moyens mis en oeuvre, ok les blagues sont pas toujours fines mais au moins ça reste des blagues un minimum travaillé. Si le joueur du grenier c'était juste un mec qui joue à un jeu vidéo en direct en improvisant des blagues sans montage ni aucun travail, ben j'aurais sans doute regardé une ou deux vidéos avant de me lasser. Ce serait pire si c'étaient 5 potes qui jouaient à un jeu vidéo en se coupant sans arrêt les uns les autres...

C'est ce qui me choque le plus dans ces vidéos : le décalage. J'en attendais trop venant de cette équipe. Une bande de potes lambda aurait fait la même chose, j'aurais même pas pris la peine d'en parler, j'aurais haussé les épaules et baste. Ma déception est en fait à la hauteur de mes attentes (et renforcée par l'étonnant accueil plutôt positif qui y est fait).

C'est vrai en plus qu'une fille ou deux ça ne leur aurait pas fait de mal.
Contes et histoires à vivre, un site pour parler des Errants d'Ukiyo, de Perdus sous la pluie et du reste.

Pensez aussi à la page Facebook officielle de Perdus sous la pluie.
Mangelune
 
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Re: Rôlistes, soyons fiers de notre loisir

Message par Fabien | L'Alcyon » 06 Mai 2015, 10:46

OK, merci beaucoup de vos soutiens et de vos critiques ! J'en ai vu beaucoup ici et ailleurs, je vais essayer d'éclaircir plusieurs points.

Je passe sur les reproches auxquels je ne peux pas vraiment répondre. Non, je ne suis pas jaloux ou en manque de communication, non je n'ai rien de personnel contre Mahyar Shakeri (que je connais à peine, même si j'ai suivi avec intérêt ses publications à une époque), non je ne suis pas La Cellule (j'y participe et je la soutiens dans l'ensemble mais je ne suis pas responsable des propos polémiques que d'autres tiennent, reprochez-moi ce que j'ai dit, écrit ou fait), non je ne suis pas Daech (oui, j'ai vu sur Facebook qu'on m'avait comparé à l'Etat Islamique...).
J'écris parce que je veux faire évoluer le jeu de rôle dans le bon sens, point.

Ma première remarque renvoie à la vidéo. Comme je l'ai dit plus haut, je comprends bien individuellement le pourquoi de chacun des points que je reproche à la vidéo. Ce qui me pose problème c'est l'accumulation de ces points, jusqu'à ce que cette partie ressemble à un cliché de jeu de rôle. Et non, je ne cherche pas à tout crin à ce qu'on présente le jdr depuis mon angle (je l'ai écrit plus haut), mais il me semble que (par exemple) une table mixte, de Shadowrun, et avec un système cuisiné amoureusement par le MJ aurait bien mieux représenté ce que nous vivons dans les faits, tout en présentant notre meilleur aspect.
Mais rappelons que je ne fais pas ici le procès de la vidéo (ça aussi je l'ai exprimé clairement plus haut, me semble-t-il). J'ai des choses à lui reprocher mais le cœur de ma critique est bien le manque de confiance des rôlistes en eux-mêmes et dans leur média.

Ma seconde remarque tient à la place de la critique.
Oui on peut critiquer une œuvre et un loisir alors qu'on l'aime. Ca ne remet pas en danger l'existence de ce loisir. On peut être ambivalent, aimer certains aspects et en rejeter d'autres tout en acceptant qu'ils existent tous, c'est bien ce que je fais ici et dans La Cellule en général. Critiquer c'est avant tout vouloir que les choses s'améliore. On peut être fan et critiquer, c'est même la meilleure manière de faire. On ne force personne, on invite juste les autres à prendre du recul et à réfléchir. Et ça ne remet pas en cause ce qui existe déjà, ça ouvre de nouvelles perspectives qui au pire amélioreront le loisir dans son ensemble. Mon amour pour des jeux innovants ne remet pas en cause l'existence des pratiques traditionnelles, je montre simplement qu'il existe des alternatives et j'invite à être curieux.
On peut reprocher à quelqu'un de mal critiquer, on ne peut pas reprocher à quelqu'un de critiquer.
Quand je parle de manque de confiance en soi, c'est aussi à cela que je pense: avoir confiance en son loisir, c'est aussi accepter qu'on puisse être en désaccord les uns avec les autres, qu'il puisse y avoir des choses à apprécier et des choses à redire. C'est cette confiance en soi qui permet la critique et donc l'évolution et l'amélioration.

Merci de votre attention.
Fabien | L'Alcyon
 
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Re: Rôlistes, soyons fiers de notre loisir

Message par Steve J » 07 Mai 2015, 10:02

J'ai le même ressenti que Vivien concernant le joueur du Grenier.
Je me lasse un peu de ses dernières vidéos (en même temps j'ai du en regarder plusieurs dizaines avant de m'en lasser) mais j'apprécie sa façon de mettre en scène ses parties et ses analyses de gameplay. De même, malgré les éléments limites de cette vidéo-ci, il m'est fondamentalement sympathique et il suffit de regarder sa vidéo sur Disney (il s'y moque des stéréotypes de la firme) pour se rendre compte qu'il est loin d'être aussi sexiste/raciste que certains ont pu l'affirmer.

Par contre ce qui me gêne le plus ce n'est pas le contraste avec ses précédentes productions, tout le monde peut se tromper.
Ce qui me parait surréaliste c'est le contraste entre la qualité des vidéos -dont tout le monde avoue à demi-mot ne pas les avoir regardé jusqu'au bout de peur de mourir d'ennui- et les critiques élogieuses.
J'ai l'impression que nous craignions tant pour l'avenir de notre loisir que nous sommes prêt à encenser n'importe quoi tant que cela porte une vague promesse de démocratisation du JDR. Au fond on félicité la quantité (1 million de vues !) et non la qualité.

Quand on s'est intéressé au milieu du jeu vidéo de ces dernières années on comprend un peu mieux pourquoi.
L'arrivée de youtubeurs phares a eu un impact considérable sur la vente de certains jeux. La chaine numéro 1 de youtube est celle des Let's Play de PewDiePie (AMHA stupéfiants de nullité) et l'impact de l'émission WTF is ? de Total Biscuit est tel qu'il est très mal vu pour les développeurs d'en dire du mal. En France le monde avait récemment écrit un articlesur un obscur jeu mobile popularisé par Fanta (qui participe à l'émission dont nous parlons).
Je regarde suffisamment de Let's Play pour ne pas mépriser cette culture mais il y a ici une disproportion entre la qualité des vidéos et leur impact (et donc leur réception). Disproportion que j'observe à l'identique dans le cas de la vidéo du joueur du Grenier.
Steve J
 
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Re: Rôlistes, soyons fiers de notre loisir

Message par edophoenix » 18 Mai 2015, 18:25

J'ai personnellement ressenti la même chose que Fabien, cependant, trois arguments en faveur du diable (enfin... du diablotin tout au plus !^^) :

- D'une part, nous sommes ici, sur ce forum, des rôlistes réflexifs sensibilisés aux formes les plus avant-gardistes du jeu de rôle, que tout le monde ne connaît pas. Le propos de Fabrice et celui de Steve sontt ainsi très pertinents à mon sens. Le propos de Seb et Fred n'est pas de parler des innovations rôlistiques, mais de montrer une partie de jeu de rôle. C'est ce qu'ils font. Que la partie soit plus ou moins dirigiste, fait partie du jeu de rôle en général, et si c'est le cas ici, ce n'est pas pour autant autre chose que du JDR traditionnel. Donc, même si cela peut être dommage pour nous qui aimons réfléchir sur notre média, le portrait qu'ils en font reste fidèle à ce que PEUT être une partie.
(edit.: N.B.: et ne serait-ce pas justement l'occasion de prendre contact avec eux pour leur proposer d'autres points de vue pour la suite de leur série ? Je verrais bien un JDG Prosopopée, il suffit de le leur faire connaître ! - peut-être seront-ils intéressés ?)

- D'autre part, "Il n'y a que des hommes" : parce que les participants sont des youtubers connus, ils font partie du réseau d'animateurs francophones de youtube qui (allez savoir pourquoi) reste masculin ; peut-être parce que les filles s'intéressent moins à la production audiovisuelle, et que celles qui s'y adonnent restent plus confidentielles (ou traitent d'autres sujets moins porteurs). Bref, là : je pense que si une youtubeuse rejoignait le clan hélas très fermé des youtubers à succès, les joueurs du greniers (Fred et Seb) s'y seraient sûrement intéressés, ils ont d'ailleurs déjà tourné des vidéos avec des figures féminines.

- Enfin, la blague sexiste sur le viol : il faut aussi le remettre dans le contexte du style développé par le JDG : ils appliquent en fait le même style à un média différent, le jeu de rôle, plutôt qu'aux rétrojeux vidéos.

Avec tout cela, je suis d'accord que l'image qu'il donne du JDR n'est pas très valorisante. Néanmoins, j'ai malgré tout bien aimé leur vidéo, le côté "humour dégueu assumé" en moins, l'ambiance est quand même marrante.

(N.B.: je reviendrais ultérieurement sur la confiance des rôlistes, qui effectivement me semble le plus important dans cette histoire.)
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"Si le monde n'a absolument aucun sens, qu'est-ce qui nous empêche d'en inventer un?" - Lewis Caroll, Alice au pays des Merveilles.
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Re: Rôlistes, soyons fiers de notre loisir

Message par Brisecous (Mathieu) » 18 Mai 2015, 18:57

Salut,

Je suis plutôt d'accord avec les "arguments du diable" de edophoenix. De mon point de vue :

- Les blagues à caractère sexuel peuvent paraître choquantes dans un certain milieu social, mais elles sont une habitude dans d'autres. Et les blagues à caractère sexuel peuvent tout aussi bien être le fait de femmes (même si dans le cas présent l'assemblée est masculine). Je ne suis pas sûr qu'on puisse parler là de "propos sexistes" (sauf à réduire considérablement la liberté de parole). En tout cas à titre personnel, ça ne m'a pas choqué.

- JDG a une pratique du jeu de rôle, et il met en application sa pratique du jeu de rôle. Ce n'est pas la nôtre, mais elle est tout aussi valable et cela ne me choque pas qu'il en fasse la promotion et lui donne l'étiquette "jeu de rôle".

- Dès le moment qu'on ne met pas de jugement de valeur sur sa pratique du jeu de rôle, il me semble qu'on ne peut que se féliciter qu'une vidéo sur le jeu de rôle (représentant une de ses pratiques) fasse le million de vues sur Youtube.

- Ce que fait JDG dans sa vidéo, c'est du "let's play", malgré un habillage graphique destiné à rendre la partie plus compréhensible. Il n'y a donc ni discours de fond, ni scénarisation autre que celle de la partie. On voit les joueurs pratiquer le jeu de rôle tels qu'ils l'entendent et l'apprécient, et cela justifie totalement leur démarche de mon point de vue.

Je n'ai pas spécialement apprécié la vidéo, car elle ne correspond pas à ma pratique et à ce qui m'intéresse dans une partie de JDR. En revanche, j'ai apprécié la démarche et la visibilité que cela apporte au JDR. Faire une chronique JDR sur Youtube, c'était osé pour JDG car ce n'était pas son coeur de cible. Cela ne me semble pas une vision décalée ou abâtardie de la discipline. J'aurais même tendance à dire que cette partie représente assez fidèlement la majorité des rôlistes, et que ce sont nos propres pratiques qui dévient de la norme.

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Re: Rôlistes, soyons fiers de notre loisir

Message par Fabien | L'Alcyon » 18 Mai 2015, 21:58

Précisons à nouveau, comme je l'ai écrit dans le texte, que le fond du problème n'est pas la vidéo elle-même, mais plutôt le peu de réactions critiques à son égard de la part des rôlistes, à mon sens dû au manque de confiance des rôlistes dans leur loisir. Et souvenez-vous, on a le droit d'aimer ET d'être critique.
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Re: Rôlistes, soyons fiers de notre loisir

Message par Brisecous (Mathieu) » 18 Mai 2015, 22:55

Je vais essayer de m'éloigner de la vidéo pour parler du manque de confiance que tu pointes du doigt. Je ne comprends pas le rapport entre la vidéo du Joueur du grenier, et le manque de confiance des rôlistes dans leur loisir. Je pense que cette incompréhension vient d'un positionnement différent que nous avons tous les deux en regardant la vidéo du JDG.

Lorsque je vois la vidéo du JDG, j'y vois un groupe de joueurs qui filme sa partie de jeu de rôle, correspondant à une pratique du jeu de rôle. Cette manière de jouer te semble rétrograde, du moins c'est ainsi que j'interprète tes propos (et je te présente mes excuses si je les ai mal interprétés). Cela me semble être un jugement de valeur sur la manière de jouer du JDG.

C'est ce postulat de départ qui me dérange dans ton argumentaire, et c'est je pense pour cette raison que je ne peux pas en arriver aux mêmes conclusions que toi. Pour moi, toutes les pratiques du JDR se valent. Certaines pratiques correspondent aux premiers temps du JDR, d'autres s'éloignent tellement du JDR que la question se pose de déterminer si elles en sont encore (des JDR). Il me semble délicat de considérer qu'une manière de pratiquer le JDR, parce qu'elle serait moins "mainstream", plus novatrice, aurait plus de valeur qu'une autre, et que par là-même, afficher une autre manière de jouer serait faire du tort à notre loisir. Je n'aime pas la vidéo du JDG, moi personnellement. Sa pratique du JDR ne m'intéresse pas. Mais je ne vois pas de raison d'être critique.

Ton propos sur les femmes en JDR me fait réagir, entre autres parce qu'il est difficile de trouver des femmes intéressées par notre loisir. Je joue avec peu de femmes (1 dame pour 4 messieurs sur ma partie en tant que MJ), et ce n'est pas par sexisme, mais tout simplement parce que mes connaissances féminines ne sont pas intéressées. En cela, la vidéo du JDG est représentative d'une réalité, il me semble.

En ce qui concerne la confiance des rôlistes, indépendamment de la vidéo du JDG, je suis plutôt d'accord avec toi : lorsqu'on se présente comme rôliste, on reçoit une image de marque assez négative de geek asocial qui joue au PC toute la journée en mangeant des chips et du coca. Mais ce jugement de valeur négatif n'est pas propre au JDR : je subis la même chose quand je dis que je joue aux jeux vidéos, je perçois la même chose quand j'entends parler des chasseurs, des artistes, ou quand j'entends parler de football. Je suis archéologue, et une part non négligeable de la population pense que ce n'est pas un vrai métier. La société juge ce qui est différent, ce qui n'est pas "mainstream", ce qui sort de l'ordinaire ou ce qui contribue d'une mouvance minoritaire ou nouvelle. On juge ceux qui critiquent l'ordre établi. On juge tout et n'importe quoi parce qu'on a l'impression que ça nous donne de la valeur. C'est d'autant plus vrai en France qui est un pays conservateur, selon moi.

Si je fais ce constat que ce "manque de confiance" n'est pas propre aux rôlistes mais à toutes les activités sortant un tant soit peu de l'ordinaire, cela m'apporte une grille de lecture différente. Peut-être que le manque de confiance des rôlistes vient justement du fait qu'ils sont persuadés de subir un traitement différent, alors qu'ils subissent simplement l'entropie d'une société réfractaire par nature au changement. Quant à assumer ses passions, à en défendre les valeurs, et à ne pas vivre sous le spectre d'émissions de merde diffusées dans les années 90, je ne peux qu'applaudir des deux mains ceux qui en sont les artisans. Mais c'est une problématique qui ne me semble pas spécifique au JDR.
Dernière édition par Brisecous (Mathieu) le 19 Mai 2015, 17:54, édité 1 fois.
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Re: Rôlistes, soyons fiers de notre loisir

Message par Fabien | L'Alcyon » 19 Mai 2015, 10:15

OK, merci de prendre du recul.

Admettons que les rôlistes ne soient pas moins bien représentés que d'autres groupes sociaux. Est-ce que pour autant ça ne vaut pas la peine de se battre pour l'améliorer ? Je reviens à ma même question: pourquoi ne réagissons-nous pas plus ? Pourquoi nous laissons-nous faire ? Est-ce que notre loisir n'en vaut pas la peine ? Pourquoi acceptons-nous si passivement les représentations dépréciatives qui nous visent ?
J'aime tellement le jeu de rôle, c'est une activité tellement émancipatrice et enthousiasmante ! Je ne veux pas que les médias nous salissent et empêchent d'autres personnes de s'y essayer et d'assumer pleinement d'être rôlistes.
Je crois à la possibilité de faire changer les choses, même si c'est long, même si c'est difficile, et je pense que nous y pouvons tou°te°s quelque chose. [Et il ne s'agit pas de le faire au dépend des autres, on peut travailler à la représentation des rôlistes ET des artistes ET des archéologues (ça me va bien ma maman était archéologue !).]
Et ça suppose donc aussi d'être exigeant, de dire: ça j'aime, ça j'aime pas. Il ne s'agit pas d'exprimer un jugement définitif et absolu qui condamne, mais plutôt d'exprimer des avis et des critiques afin d'encourager les créateurs à innover, et les pratiquants à explorer. Sinon, on revoit tout le temps la même chose et on ne va pas chercher de nouvelles voies et il n'y a aucun espoir d'évolution et d'amélioration. Oui, ce qui a déjà été fait est intéressant et mérite d'être répété, mais s'y accrocher c'est ça être vraiment conservateur. Il ne s'agit pas de condamner ce qui existe déjà, mais de créer du choix afin que chacun puisse trouver ce qui lui plaît le plus (pour nous et pour celles et ceux qui viendront après).

Je voudrais enfin faire une mise au point sur la question des blagues sur le viol.
  • rappelons que 16% des femmes et 5% des hommes déclarent avoir subi un viol ou une tentative de viol durant leur vie ; et les jeunes sont concernés rapidement puisqu'à l'âge de 20 ans, une femme sur 10 déclare avoir été victime de viol (source); et que (faut-il le préciser ?) un viol a souvent des conséquences graves pour la victime: dépression, anxiétés, qui peuvent mener au suicide.
  • les blagues sexistes ont un effet négatif concret: il existe tout un courant de la psychologie moderne qui montre que ces blagues sont "plus que des blagues" puisqu'elles tendent à encourager le comportement dont on se moque et à augmenter la tolérance au sexisme des auditeurs (femmes ou hommes); le langage n'est pas anodin, il modèle les comportements, quel que soit le groupe social
  • les survivant°e°s de viol peuvent en rire pour exorciser le problème, mais ce rire leur appartient et les autres n'ont pas à leur imposer de repenser à leur traumatisme
  • que des femmes perpétuent des blagues sexistes n'enlèvent en rien leur caractère sexiste, et c'est une manière de s'intégrer connue pour des individus en minorité dans un environnement de dominants (on a la même chose pour les personnes issus de minorités ethniques qui font des blagues racistes dans des environnements de blancs)
Si nous avons l'impression qu'il n'y a que des hommes, c'est peut-être justement parce que nous tenons la plupart des femmes à l'écart par des blagues qui les stigmatisent ou les mettent mal à l'aise (et en disant cela, je pense aussi aux blagues homophobes).
Brisecous, je suis d'accord avec toi pour dire que la France est un pays conservateur: est-ce que nous voulons que le jeu de rôle le soit aussi ? C'est à nous de choisir si nous voulons faire du jeu de rôle un lieu accueillant pour toutes et tous.
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Re: Rôlistes, soyons fiers de notre loisir

Message par Frédéric » 19 Mai 2015, 11:45

Et pour en rajouter une couche : "qui prend le cul ?" en parlant d'un personnage de fiction de sexe féminin inconscient, ça signifie suggérer, par l'humour d'avoir un rapport sexuel avec une personne inconsciente, donc contre son gré. Ce qui est du viol.
Ce n'est pas une blague grivoise ou potache ou sexuelle. C'est une blague qui met en scène l'abus sexuel sur quelqu'un en incapacité de répondre et de consentir, de refuser ou de se défendre.

Que ce soit un personnage de fiction peut faire passer cette blague pour anodine (sans doute ne feraient-ils jamais la même blague vis à vis d'une personne réelle), mais participe à la culture du viol, comme l'explique Fabien, l'humour n'est pas gratuit. Quand on fait un trait d'humour, ça vise toujours quelqu'un. Faites gaffe à qui vous ciblez.
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