My Little Pony - Initiation d'une enfant de 5 ans 1/2

[Frédéric]

Aujourd’hui, j’ai eu le plaisir d’initier ma fille au jeu de rôle.

Les protagonistes sont :

• Maya, 5 ans et demi (jamais joué auparavant, mais une vraie passionnée de fictions et de jeux, qui passe le plus clair de son temps à se raconter des histoires seule avec ses jouets)
• Magali, dite “maman”, 34 ans, une quinzaine de parties à son actif
• Frédéric, dit “papa”, 35 ans, dont 26 de pratique du JdR et MJ de la partie

Maya m’a demandé de lui faire découvrir le jeu de rôle, dont je parle tant. J’ai immédiatement pensé à la faire jouer dans l’univers d’un dessin animé qu’elle adore et qu’elle connaît sur le bout des doigts. J’ai donc opté pour My Little Pony: Friendship is Magic.

La raison de ce choix étant qu’elle possède beaucoup de figurines, dont toutes les héroïnes. Pratique pour faire de petites mises en scène pendant le jeu.

Maya joue Twilight Sparkle et Magali joue Rainbow Dash.

J’ai réfléchi à une mécanique simple, car à 5 ans ½, on ne sait pas encore lire, mais on sait comparer de petits chiffres.
Donc inutile d’envisager des Traits ou des Caractéristiques avec des concepts compliqués.
Je voulais également éviter que l’arbitraire du MJ sur les résolutions d’action ne prenne trop d’importance.

Voici donc les fiches utilisées.
On lance autant de dés que de carrés à côté de la carac. le MJ en lance 2 en temps normal, 3 dans des circonstances particulières (ennemis nombreux, par exemple) et 4 pour l’antagoniste de l’histoire. Celui qui obtient le dé le plus haut l’emporte.

Puis j’ai préparé une mini-intrigue en regroupant tout le contenu dans la destination finale des personnages : le village de Hollow Shades. À la différence de joueurs adultes et casse-pied comme moi, une mission avec voyage n'est pas gênant pour un enfant de son âge (j'ai géré le voyage comme une ellipse). Cependant, il lui a fallu un peu de temps pour comprendre que j'avais prévu des problèmes et qu'elle devait les résoudre. Elle m'a demandé ce que j'avais d'écrit sur ma feuille pendant la fiche, alors je lui ai expliqué et tout a roulé.

Voici la mécanique du jeu et l’intrigue.

J’ai également récupéré des plans du monde d’Equestria et du village de Ponyville pour se repérer pendant la partie.

Introduction de la partie.
On a réuni toutes les figurines, je leur ai donné les fiches des poneys qu’elles avaient choisis.
J’ai mis la musique du générique du dessin animé et j’ai expliqué simplement : on va se raconter une histoire, Maya, tu es Twilight Sparkle et Magali est Rainbow Dash.
Quand il y aura des problèmes, on lance autant de dés que la valeur de “jambes”, “tête”, “cœur” ou “courage” (je me suis inspiré du Magicien d’Oz, je crois sur lequel j’avais écouté le podcast de la Cellule).

La partie
(À partir de là, il est possible que vous ne compreniez pas grand chose aux personnages et à leurs relations, tant les références au dessin animé sont nombreuses, n’hésitez pas à poser des questions si besoin).
J’ai commencé en racontant que c’est un beau jour sur Ponyville, qu’il n’y a aucun nuage dans le ciel. Rainbow Dash apprend à Twilight à utiliser ses nouvelles ailes et je leur propose de s’amuser à raconter comment ça se passe.

Magali explique qu’il faut d’abord apprendre à planer en sautant d’un monticule (et mime les gestes avec sa figurine, le monticule étant constitué de dés).
Maya fait pareil. Pour lui apprendre la mécanique du jeu, je lui propose de faire un lancer de dés en “jambes”. Elle lance 1 dé, j’en lance 2 (difficulté de base). Elle échoue, je raconte donc qu’elle perd l’équilibre et qu’elle s’écrase doucement au sol.

Soudain, Sweetie Belle, la sœur de Rarity accourt. Rarity est partie ce matin. Elle a essayé de l’arrêter, mais elle s’est montrée méchante avec elle (alors qu’elle n’a rien fait cette fois-ci).
Magali oriente la discussion pour essayer d’en savoir plus, tandis que Maya essaie de tempérer la gravité du problème.
Sweetie Belle explique que Rarity recevait des lettres d’un certain Split Shadow (un PNJ de mon cru) qui l’agaçaient et ce matin, elle a décidé de partir sans raison, elle ne semblait pas dans son état normal.

Maya et Magali discutent et décident d’aller voir la princesse Célestia.
(On discute pour savoir si c’est nécessaire de retrouver les autres protagonistes, comme c’est souvent le cas dans le dessin animé, mais je leur dit que non, voire qu’il ne vaut mieux pas, ce sera plus simple, mais Spike, l'ami et assistant de Twilight, vient avec elles).
La princesse leur apprend que l’auteur des lettres vit dans un village étrange appelé Hollow Shades et qu’il en est devenu le prince il y a peu et que depuis, des choses bizarres se passent là-bas. On dit qu’il y a des créatures et des sorcières dans ce village.
Là, Maya part du principe qu’il faut prévenir leurs amies de leur aventure pour qu’elles viennent les aider en cas de problème (ce que j'aurais pu utiliser si les événements tournaient mal, mais ça n'a pas été nécessaire. L'idée était néanmoins sage et on l'a approuvée socialement).

Les poney et leur ami dragon prennent le train vers Hollow Shades, je leur décris une forêt un peu effrayante. Puis elles arrivent devant la maison d’une sorcière, non loin du village. Elles regardent par la fenêtre, voient une poney avec un grand chapeau préparer des potions. Elles commencent à émettre des hypothèses entre-elles. Je joue Spike assez peureux. Elles décident de l’épier pour voir ce qu’elle va faire. Soudain, la sorcière en question, du nom de Bella Donna (un PNJ de mon cru) les surprend (elle était dans la maison l’instant d’avant et soudain elle disparaît et réapparaît derrière elles).
Elle leur demande “pourquoi vous m’espionnez ?”
Là, Magali lui explique qu’elles trouvaient sa maison très jolie et qu’elles voulaient lui demander de l’eau à boire. La sorcière les invite à l’intérieur.
Elles parlent de Rarity et de Split Shadow et devinent qu’elle est amoureuse de Split Shadow (en fait, quand elle parle de lui, je décris ses joues qui rosissent. Magali fait une remarque par l’intermédiaire de son personnage pour faire comprendre à Maya qu’elle doit être amoureuse de lui).

Comme Bella Donna dissimule de toute évidence des informations, Magali décide de la confronter. Bella Donna finit par raconter que le prince s’est installé ici il y a quelques années et s’est proclamé seigneur de Hollow Shades. Depuis qu’il a croisé Rarity, il est tombé fou amoureux d’elle, mais ce n’était pas réciproque. Il lui a envoyé de nombreuses lettres, mais ça excédait Rarity. Du coup, il a demandé à Bella Donna de fabriquer un philtre d’amour. Celle-ci ne pouvant rien lui refuser, elle a accepté. Elle a versé quelques gouttes dans le jus de pomme de Rarity, voilà l’explication de son départ. Bella Donna est honteuse. Pour se racheter, elle propose d’aider les héroïnes.

Elles arrivent à Hollow Shades, les poneys se comportent bizarrement : certaines se disputent voire se battent, d’autres marchent en se cognant machinalement contre les murs (je mime leurs comportements avec des figurines). Magali et Maya se demandent ce qu’ils ont. Bella Donna leur explique, confuse qu’elle a lancé un sort parce que Split Shadow se plaignait que personne ne voulait écouter ce qu’il ordonnait. Du coup, ils sont devenus un peu idiots et ils exécutent bêtement les ordres de leur seigneur.
Soudain, des villageois aperçoivent les héroïnes et les attaquent.
Maya utilise sa magie et Magali s’envole.
Maya réussit, je lui propose de dire comment, elle explique qu’elle propulse les villageois au loin grâce à sa magie.
Magali échoue. Je raconte alors qu’un villageois attrape sa jambe, que plusieurs autres se jettent sur elle et l’emmènent vers le château de Split Shadow.
Maya lance les dés pour tenter de la délivrer. C’est une réussite, je lui propose de raconter comment elle arrive à faire ce qu’elle veut. Maya raconte (je retranscris avec mes mots) : je m’envole, je passe discrètement les gardes, j’entre dans le château et j’arrive jusqu’à la prison où est enfermée Rainbow Dash et avec la magie de ma corne, j’ouvre sa cellule et je la libère !
Frédéric et Magali : bouche bée devant la narration de Maya.

Ensuite, elles réfléchissent à l’endroit où doit se trouver Rarity, Maya pense à la prison, mais Spike (que j’utilise pour faire des suggestions) pense que si elle est sous l’emprise du philtre d’amour, elle n’a pas besoin d’être emprisonnée.
Bella Donna parle d’une grande suite luxueuse. Le château dans son entier est richement décoré, ce qui doit plaire à Rarity.

Elles se rendent là-bas. Rarity les reçoit sèchement, comme si elles venaient lui voler son prince. Elles tentent de la raisonner sans succès.
Magali demande à Bella Donna s’il y a un moyen de briser l’effet du philtre d’amour et la sorcière lui répond qu’une preuve d’amour plus grande doit lui être donnée.
Le conflit tourne à la dispute et Split Shadow finit par faire son entrée dans la pièce.

De toute évidence, il a monté Rarity contre ses amies. C’est pour ça qu’elle est agressive envers elles.
La discussion tourne au combat et Magali parvient à retirer son masque à Split Shadow qui se transforme en cheval un peu monstrueux aux yeux rouges. Il attrape Rainbow Dash et menace de lui faire du mal si Twilight et elle ne partent pas. Mais Twilight parvient à libérer son amie et le combat continue alors qu’elles et Spike (sous l'idée de Maya) ouvrent leur cœur à Rarity pour briser l’effet du philtre. Progressivement, Rarity reprend ses esprits, mais elle continue à lutter contre l’emprise du philtre, c’est à ce moment-là que Bella Donna souffle une poudre magique qui libère Rarity de son emprise.

Rarity se tourne vers Split Shadow et le pousse en lui disant avec colère qu’il n’a pas le droit d’utiliser de tels subterfuges pour qu’elle l’aime, qu'elle ne l'aimait pas et qu'il devait se faire une raison. Split Shadow s’enfuit, la tête basse.

Je leur propose de raconter la fin de l’histoire.
Elles décident que les habitants du village d’Hollow Shades recouvrent leur état normal. Bella Donna s’excuse pour le mal qu’elle a fait.
Les amies rentrent toutes et tous à Ponyville où Sweetie Belle, heureuse de retrouver sa sœur la prend dans ses bras. Rarity remercie ses amies pour leur aide.

FIN

Remarques

• Ça s’est très bien passé, mes appréhensions dues à l’âge de Maya étaient vaines.
• Je suis stupéfait de voir à quel point dès la deuxième scène, Maya a endossé le rôle de son personnage avec facilité et a fait des propositions très pertinentes (Compétence “Roleplay” level 54).
• À certains moments, Maya racontait que son poney disait quelque chose à l'oreille du poney de Magali et parlait à voix basse. J'entendais aussi, mais on savait tous que les autres PNJ présents n'entendaient pas. J'ai déjà vu des joueurs adultes incapables d'un tel degré d'abstraction. ^^
• Dans les premières scènes d’action, j’ai vu les petites étoiles dans ses yeux. *-*
• Les figurines et le plan se sont révélées utiles, car cela limitait l’abstraction des situations fictives.
• Je me suis demandé avant de jouer si ce n’était pas trop exigeant que de faire faire à Maya ses narrations de succès et en fait pas du tout, elle s’est régalée (cf. le moment où elle libère Rainbow Dash, le personnage de Magali).
• La mécanique était fluide, ça a bien roulé.
• En revanche, la fin pédalait un peu dans la semoule. En s’entraidant, les stats étaient nettement favorables aux joueuses, mais j’ai enchaîné les bons scores, du coup on a dû relancer plusieurs conflits pour vaincre Split Shadow et briser l’effet du philtre (c’est pour ça que j’ai fait intervenir Bella Donna à la fin, car sinon ça aurait pu durer encore longtemps et Maya commençait à décrocher depuis 10 minutes).
• Pour la prochaine partie, je modifierai légèrement la mécanique de façon à ce que l’ennemi perde obligatoirement (après tout, les dessins animés sont comme ça : les méchants perdent forcément, ou veulent se racheter). Et dans les dessins animés de son âge (et pour plus grand) les héros gagnent toujours. Là, l’incertitude était trop forte. Il faut donc que la mécanique rende l’échec impossible, y compris si le MJ a le cul bordé de nouilles, comme c’était le cas. Il pourrait s’agir simplement d’indices ou d’objets ou de PNJ, qui, quand ils sont amenés dans le conflit final, baissent le nombre de dés que lance le MJ (éventuellement jusqu’à 0).
• J'ai remarqué que les limites du partage de Responsabilités étaient floues pour Maya : elle n'a pas hésité à plusieurs reprises à contrôler un PNJ ou à faire agir Spike d'elle-même (en même temps, c'était une relation de son poney qui la suivait partout), à décider d'éléments d'intrigue ou de contenu, etc. Ça n'a pas vraiment nui au jeu. Quand ça contrariait ma préparation, je lui disais qu'en fait c'était pas comme ça et je corrigeais. Il y a un petit apprentissage à faire à ce sujet (ce qui me fait pencher vers l'idée que les Responsabilités serrées en JdR tradi ne sont pas naturelles, c'est le fruit d'un apprentissage).
• Une petite difficulté : à un moment Maya a proposé que Spike lance Twilight sur Split Shadow pour qu’elle puisse sauver Rainbow Dash (ce qui pose un problème de crédibilité, puisque Spike étant un dragonnet, il a la force d’un enfant, tandis que Twilight est une jeune adulte plus grande et plus lourde que ce qu’il est censé pouvoir soulever). Je lui ai dit que c’était pas possible, mais elle a insisté. Là, j’ai clairement compris qu’il ne fallait pas trop la brider de ce côté là. Si elle avait 1 ou 2 ans de plus, on pourrait peut-être discuter crédibilité, mais là elle est clairement trop jeune. Soit on y passait un quart d’heure, ou bien je la frustrait, soit on jouait et j’ai préféré accepter sa proposition. Je pense que c’est une chose à laquelle on doit se préparer quand on joue avec des enfants si jeunes : se mettre à leur niveau d’exigence en matière de crédibilité.
• À la fin de la partie, la première chose qu’a dit Maya est : “On pourra rejouer ?” [[[VICTOIRE !!!]]]
• Lors du débrief pendant le repas du soir, elle a dit que ce qu’elle avait préféré, c’était les combats et qu’elle avait envie d’y rejouer (en jouant Apple Jack cette fois-ci). Elle a également dit qu'elle avait beaucoup aimé la partie.
• Magali a apprécié la simplicité de l’intrigue pour jouer avec Maya (la partie a duré 45 minutes, explication comprise) et la fluidité des mécaniques.
• Elle a beaucoup aidé à recadrer Maya et à lui expliquer certaines choses. Mon boulot aurait été bien plus compliqué sans elle.
• Maya a compris de suite les différentes Caractéristiques, le fait de lancer un nombre plus ou moins grand de dés et le fait de comparer les scores (faut dire qu’on joue à des jeux de société depuis longtemps). Seule la Caractéristique Courage n’était pas très claire pour elle, mais si la situation s’était présentée, je lui aurait proposé de l’utiliser.

Point important : J'ai volontairement amené des thématiques qui pouvaient faire écho au vécu de Maya, avec cette histoire d'amoureux qui veut forcer les autres à l'aimer et à faire ce qu'il veut. On a effleuré cette question avec elle lors du débrief. Je ne sais pas si ça aura vraiment la vertu de l'aider à mieux appréhender ce genre de situations par la suite, mais je pense que c'était une bonne idée de l'aborder de cette façon. L'aspect fantastique (et fictif, tout simplement) de la partie aidant à prendre du recul. On fait souvent ça avec des livres, voire des dessins animés pour lancer des discussions sur ses problèmes quotidiens, donc pourquoi faire différemment avec le JdR ? D'autant plus que My Little Pony: Friendship is Magic est un dessin animé connu pour ses thématiques féministes, donc je ne comptais pas déroger à la règle.

Bref, je suis un papa heureux.

Je serais heureux de discuter plus en détail de cette expérience, posez-moi vos questions, n’hésitez pas à comparer avec vos propres expériences de jeux avec des enfants. Discutons de nos partis pris, échangeons des conseils !

[Schultz (Jérôme S.)]

Bravo pour cette partie Fred !

À certains moments, Maya racontait que son poney disait quelque chose à l'oreille du poney de Magali et parlait à voix basse. J'entendais aussi, mais on savait tous que les autres PNJ présents n'entendaient pas. J'ai déjà vu des joueurs adultes incapables d'un tel degré d'abstraction. ^^

J'adore ^^

(je me suis inspiré du Magicien d’Oz, je crois sur lequel j’avais écouté le podcast de la Cellule).

C'est une bonne idée je pense. L'idée d'utiliser un "petit" PNJ pour guider les joueurs si ça pèche était aussi dans ce jeu, avec le chien. Tu avais ça en tête avec Spike ?

J'ai remarqué que les limites du partage de Responsabilités étaient floues pour Maya : elle n'a pas hésité à plusieurs reprises à contrôler un PNJ ou à faire agir Spike d'elle-même (en même temps, c'était une relation de son poney qui la suivait partout), à décider d'éléments d'intrigue ou de contenu, etc. Ça n'a pas vraiment nui au jeu. Quand ça contrariait ma préparation, je lui disais qu'en fait c'était pas comme ça et je corrigeais. Il y a un petit apprentissage à faire à ce sujet (ce qui me fait pencher vers l'idée que les Responsabilités serrées en JdR tradi ne sont pas naturelles, c'est le fruit d'un apprentissage).

J'ai la même conviction. Avec des joueurs débutants qui ne sont formatés ni par le JDR (ou l'image qu'on a pu leur en donner dans des fictions comme Big Bang Theory ou autre), ni par le jeu vidéo, j'ai souvent constaté ce coté flou du partage d'autorité.

[Frédéric]

Merci Jérôme,
au tout début je n'avais pas pensé à Spike, mais Maya voulait qu'un autre personnage viennent avec leurs PJ. Du coup on a opté pour Spike. Spontanément, j'ai commencé à m'en servir pour donner des conseils ou mettre les joueuses sur la voie.

C'est vrai que c'est peut-être l'un des conseils du Magicien d'Oz, maintenant que tu me le dis, je n'y avais pas pensé. C'est un excellent conseil !

[Christoph]

Vous êtes trop chou ! Ça m'a fait super plaisir de lire ce compte-rendu.

Le fait que Maya avait tendance à vouloir jouer Spike m'a fait penser à Trollbabes, où Ron explique que les PNJ qui sont marqués comme des relations sur la feuille de perso d'une PJ, reçoivent les indications de comportement et les buts généraux de la part du joueur, mais que c'est le MJ qui les interprète/décrit. Est-ce que cette solution aurait convenu pour vous ?

Le coup de Spike qui jetterait Sparkle semble t'avoir travaillé. C'est un dessin animé pour enfants, on s'en fiche un peu, non ?

J'aime bien l'idée des objectifs intermédiaires qui enlèvent les dés du grand méchant, histoire d'arriver à une conclusion heureuse et rapide. Qu'est-ce que les dés apportent concrètement ? Maya a-t-elle bien aimé cet aspect ?

[Frédéric]

Hello Christoph,

À mon avis, les définitions des Responsabilités sont difficiles à définir (trop abstraites ?) à cet âge là. Même si je lui dis : tu ne joues que Twilight, ce qu'elle dit et ce qu'elle fait, je ne prends pas en compte les moments où elle agit sur quelqu'un d'autre, voire sur le décor. Les responsabilités sont toujours perméables et on trouve toujours des cas de figure particuliers, qui nous entraînent ver sun niveau d'abstraction qui me semble inapproprié (non pas qu'elle ne puisse pas comprendre, mais plutôt que ça lui demande topr d'efforts pour les avoir en tête et les respecter).
J'avoue que ça ne me dérange pas qu'on partage Spike, après tout, c'est son allié. Elle n'a pas fait la même chose avec les autres PNJ. C'est peut-être la proximité avec Spike qui fait qu'elle s'est sentie le droit de le contrôler par moments.

Pour tout dire, quand Maya joue seule avec ses poneys, elle se raconte des histoires où elle joue tous les personnages. Elle les fait se disputer, se réconcilier, etc. Il n'y a pas de partage de responsabilités clairement défini. Et quand on joue à son jeu avec elle, c'est assez dur de la suivre, parce qu'elle a tendance à nous dire ce qu'on doit faire ou pas faire. C'est son monde à elle, nous on est des invités quand on le partage avec elle. C'est son monde imaginair,e donc elle agit comme si elle avait le dernier mot sur tout, voire comme si elle était metteuse en scène de la fiction.

Du coup, lui dire "en JdR, tu as le droit de dire ce que fait ce personnage, mais pas tel autre", c'est pas évident. Spontanément, elle saisit la responsabilité sans se poser la question. Le fait qu'elle m'ait laissé les antagonistes et qu'elle ait laissé la responsabilité à Magali de son personnage me paraît un bon départ et le signe qu'elle comprend que le jeu de rôle a ses propres spécificités, mais par moment, elle tirait l'histoire dans sa propre direction.

Le coup de Spike qui lance Twilight m'a posé un léger souci, parce que dans le dessin animé, c'est quelque chose qui serait passé pour invraisemblable. Même dans les (bons) dessins animés pour enfant, il y a une logique fictionnelle. Des choses possibles et d'autres non. Globalement, Maya l'a bien respectée, elle a fait beaucoup de références aux épisodes de My Little Pony, aux capacités de son personnage (sa magie, etc.) qui étaient vraiment crédibles. C'était la seule entorse. Je pense que je peux vivre avec, c'est pas un problème en soi. Mais ça m'a surpris. Je crois juste qu'il faut être coulant là-dessus, parce que si c'était vraisemblable pour elle et pas pour nous, c'est à nous de s'adapter, c'est nous les adultes.

À quoi servent les dés (haha, t'essaies de me tirer vers notre discussion par mail petit sacripant, mais du coup c'est intéressant d'avoir un rapport de partie d'un jeu d'une simplicité extrême pour discuter) :

1. Clairement, ça me met à l'aise de ne pas avoir trop de pouvoir décisionnel sur l'issue des conflits (bien que j'ai fait une entorse à la fin, quand j'ai fait intervenir Bella Donna pour briser l'effet du philtre sur Rarity, c'était nécessaire, du fait des failles de la mécanique du jeu, mais je n'ai pas aimé devoir prendre cette décision).
2. Je ne pense pas que ça serait gênant en soi si je décidais de l'issue des conflits. Mais je pense que je serais facilement tenté d'être trop gentil. Là, la question ne se pose pas. Le moment où le poney de Magali se fait capturer et où celui de Maya la libère était super cool. Je ne pense pas que ça se serait produit sans les dés.
3. De plus, j'ai l'impression que ça donne un sentiment de "pouvoir" aux joueurs sur les événements : sur les moments où les joueuses prennent une décision et lancent les dés pour la réaliser, qu'elles ne ressentiraient peut-être pas si elles obtenaient toujours immédiatement ce qu'elles veulent.
   
   
4. Et d'un autre côté, ça évite également de donner trop ou trop peu de pouvoir décisionnel aux joueurs sur l'issue des conflits. Quand Maya joue avec ses figurines, clairement, elle a trop de pouvoir et on a beaucoup de mal à trouver un équilibre quand on joue avec elle. Ici les dés servent à ce que nous puissions obtenir une prise suffisante pour prendre un peu de plaisir dans le partage sur les événements fictifs.
   Néanmoins, je me demande : est-ce que ça se vérifierait que Maya tirerait la couverture à elle comme quand on joue à se raconter une histoire avec des figurines ? Ce qui me fait dire ça, c'est quelques indices pendant la partie où elle avait tendance à réorienter un peu l'intrigue spontanément, comme de décider que Rarity se trouve dans une prison, ou d'autres choses dans ce goût-là... J'avoue que je ne préfère pas tenter pour le moment de me lancer dans des expérimentations, car le but est avant tout de passer un bon moment et de se faire plaisir en lui faisant découvrir le jeu de rôle.
   Je me demande aussi tout de même s'il n'y aurait un autre moyen de gérer tout ça que l'utilisation de dés ? Sur ce point je n'ai pas trop d'idées. Si je la laissais choisir l'issue de son action, elle gagnerait sans doute tout le temps (encore qu'elle se mettrait peut-être d'elle-même dans la panade... je ne trouve pas ça super excitant).
   
   
5. D'un autre côté, dans cette partie, les dés nous ont un peu emmerdés parce qu'ils ne voulaient pas laisser gagner les joueuses. Mais bon, pour ça j'ai déjà des pistes d'amélioration. :)
6. Les combats sont les moments que Maya a préféré dans la partie, je ne sais pas si les dés y ont contribué. Je pense que j'y serai vigilant lors de la prochaine partie, pour voir si les dés augmentent son plaisir ou non.

Donc pour résumer, ça donne du poids à certaines choses, ça régule le pouvoir sur la fiction entre joueurs et MJ, et ça m'évite au MJ d'avoir à trancher arbitrairement.
Je suis prêt à discuter avec toi de ça plus en profondeur, si tu as des remarques, je suis très intéressé.

[Djinfizz]

tres intéressant ce CR, à 5 ans et demi fallait le faire!
J'ai tenté pour ma part de faire jouer à lego star wars (système d6 a l'ancienne, plein de figurines lego et vaisseaux en briques a l'appui) à mes fils de 7 et 9 ans et un de leur pote de 10 ans. Une vraie réussite,un format court d'une heure mais très mouvementé! Je n''ai pas pris de notes et ne peut donc pas en faire un CR aussi détaillé, mais quelques anecdotes croustillantes et surprenantes. comme le mélange réalité fiction:
à un moment , un vieux maitre jedi annonce aux personnages qu'il s'est fait voler son sabre laser alors qu'il le réparait et demande de l'aider à le retrouver(dans la fiction) les enfants ont bondi de leur chaise et se sont précipites dans le coffre a jouet de panoplies et m'ont ramené un de leur sabre laser en plastique en criant tiens tiens maître on l'a retrouvé! et tant pis pour l'enquête dans la fiction!
c'est un vrai bonheur de faire du jeu de rôle avec des enfants, même si c'est éprouvant , il y a l'innocence, la fraicheur naïve,la spontanéité et comme tu dis, presque immédiatement des étincelles dans le regard, rien que pour ça c'est génial!

[Schultz (Jérôme S.)]

à un moment , un vieux maitre jedi annonce aux personnages qu'il s'est fait voler son sabre laser alors qu'il le réparait et demande de l'aider à le retrouver(dans la fiction) les enfants ont bondi de leur chaise et se sont précipites dans le coffre a jouet de panoplies et m'ont ramené un de leur sabre laser en plastique en criant tiens tiens maître on l'a retrouvé! et tant pis pour l'enquête dans la fiction!

Les petits malins savaient déjà se servir des faits de Cellulis (private joke Sensienne) ! Superbe anecdote, j'aime beaucoup ^^

Et j'aime beaucoup aussi la discussion en cours sur les jets de dés, crédibilité et partages de narration ^^

[Frédéric]

Grégory : En effet, excellente anecdote ! C'est là qu'on se rend compte qu'il ne vaut mieux pas trop scénariser. ^^
Déjà, je me suis rendu compte que ma préparation était un poil trop scriptée (j'hésitais à imposer un voyage). Je n'ai pas pris les précautions que je prends habituellement pour ne pas imposer aux joueurs d'aller à un endroit ou de faire quelque chose de spécifique, en me disant que le "genre" des histoires de My Little Pony suffirait. Au final, à deux reprises les joueuses sont parties dans des directions qui ne m'arrangeaient pas. J'ai dû ruser gentiment pour les amener là où je voulais : le village de Hollow Shades (et Magali m'a aidé à recadrer un petit peu quand Maya voulait faire tout autre chose que suivre l'intrigue que je proposais). ^^'

[Christoph]

Hello Fréd'

Okay pour le lancer de poney, je comprends mieux dans quel contexte ça s'insère.

Quant aux dés, c'était surtout pour savoir comment Maya y réagissait, si elle les lançait pour vous faire plaisir, ou au contraire qu'elle trouvait génial de pouvoir faire ça comme son papa, etc. Je vois bien les intérêts théoriques que cela peut apporter, une fois les poneys moins défavorisés par ton générateur de TPK... au pire, tu peux toujours continuer de tricher pour l'intérêt de l'histoire.
Sérieusement, ici je suis assez d'accord avec le fait de lancer des dés pour savoir qui se fait capturer ou pas, par exemple. C'est un enjeu direct, l'histoire est une aventure, etc. Ça n'a pas vraiment d'impact sur comment les personnages décident de se comporter.

[Frédéric]

Du coup, j'ai demandé à Maya ce qu'elle avait pensé des dés dans les combats, elle m'a répondu :
"Ce que j'aime, c'est que quand je gagne, après je peux délivrer Rainbow Dash."

En creusant un peu, je pense que ce qu'elle a apprécié, c'est le fait de pouvoir tourner la situation à son avantage (le principe d'empowerment), d'avoir prise sur les événements, en quelque sorte.

Ça me paraît tellement clairvoyant que j'ai peur de l'avoir orientée dans sa réponse. ^^'

[Frédéric]

Ah, et Christoph, si je fais référence à notre discussion par mail sur le rôle des dés (et de la Résistance), c'est aussi que ça me travaille et que la fin qui s'enlisait m'a fait me poser des questions à ce sujet.