par Olivier » 17 Mai 2016, 23:55
Bonjour à tous
Ça n'aura pas traîné : après avoir découvert Les Cordes Sensibles avec Fred la semaine passée et avoir vécu une partie enthousiasmante avec lui, j’ai proposé LCS à des amis.
Pas de suspense, nous avons passé un très très bon moment. Au point qu’on rejouera à LCS et Démiurge les prochains WE alors qu’on alterne les jeux d’habitude.
Immédiatement après la partie, nous étions juste emballés par les histoires vécues. C'est en y réfléchissant et en rédigeant le présent rapport qu'il est apparu qu'il semblait possible de mieux jouer à ce jeu.
Cadre :
Pas optimal, on avait prévu de se voir mais pas de jouer (+bébé qui tournait entre les participants). Du coup, j’ai lu les règles en vitesse et je me suis dit qu’ayant déjà joué ça irait tout seul. Ce n’était pas le cas et j’ai eu du mal avec les règles de retombées. Peut-être que j’ai aussi mal présenté le jeu (cfr. ci-après).
Contexte :
J'évoque ma bonne expérience avec une partie dans le milieu de la mafia, les autres pensent aussi qu'on créera mieux si on a un cadre commun. On envisage des politiciens, des gardiens de prison,... On décide finalement de jouer l'équipe d'un journal, L'Indépendant (l'indé), qui vient d'être racheté et qui a trahi ses origines de journal d'investigation.
Persos :
Yann Blanc (joué par Thomas, plutôt compétitif, on joue de longues campagnes tradi depuis le lycée), jeune journaliste.
Problème : Puis-je choisir mon idéal plutôt que mon désir de réussite ? Je n'ai pas envie d'être pauvre. J’ai souvent des offres d’emploi alléchantes dans d’autres domaines.
Croyances : Je fais une réelle différence dans le monde. Les gens sont définis par leur choix pas par les circonstances.
Gilles Berns était mon idole mais il n’est plus à la hauteur. Gilles est un vendu.
J’ai du respect pour Rodolphe. J’ai de la compassion pour Rodolphe.
C’est difficile de travailler avec des gens qui me détestent.
Mépris pour les autres journalistes.
Sentiments : frustration / futilité / colère / triomphe / trahison
Rodolphe Hax (joué par Fabrizio qui aime les expériences fortes), vieille gloire du journalisme.
Problème : Pourrai-je maintenir ma stature sociale ? Alors que je suis fatigué et que mon réseau me contacte de moins en moins.
Croyances : Je ne peux qu’être au top. Les autres sont des minables qui se tiennent tous par les couilles.
Yann est mon confident, il m’aide à garder la tête hors de l’eau avec ses contacts.
Mauvaise foi.
Prêt à tout.
Sentiments : Humiliation / dégout / exaltation / dépression
Laure de Crécy (jouée par Amélie qui aime surtout l’interprétation des persos), community manager de l’indé.
Problème : aurais-je le cran de me confronter à l’image paternelle ? Alors que j’ai moins peur de la médiocrité que de l’échec et qu’on ne me prend pas au sérieux.
Croyances : reconnaitre sa faiblesse c’est le début de la fin. On ne peut jamais vraiment se relever d’un échec On peut apprendre d’un échec et évoluer.
Rodolphe est le meilleur ami de mon père mais il est difficile de lui cacher ma faiblesse
Mes modèles photo ont peut-être tort de me faire confiance.
Mon père : monstre sacré ? Sacré gros con…
Sentiments : hypocrisie / espoir / colère / déception
Gilles Berns (joué par moi), directeur de rédaction et éditorialiste.
Problème : Pourrai-je créer mon paradis loin du monde ? Je ne crois pas que les humains (y compris ceux qui composent mon paradis) puissent échapper à leur nature qui est mauvaise. Mon paradis me coute cher.
Croyances : la nature humaine doit être combattue. Je ne suis ni meilleur ni pire qu’un autre.
Laure est ma confidente, j’envie le peu d’emprise que le monde a sur elle mais je ne crois pas que sa solution soit applicable pour moi.
Juliette, ma fille, est un élément essentiel de mon paradis.
Mon paradis est un enfer pour les autres.
Iris (ma nouvelle compagne) n’est pas celle que je croyais.
Sentiments : Lassitude / Colère / Emprise / Borné
La partie
Rodolphe : exposition
Il n’avait pas vérifié ses sources pour son dernier article. Gilles l’engueule (il me fait intervenir) et lui demande un article de correction.
Yann : exposition
Il prend le métro bondé et croise dans la rue un ancien co-étudiant qui a réussi financièrement.
Laure : exposition
Au journal, son travail paraît bien futile au regard des enjeux qui animent ses collègues et on ne peut évoquer ses réussites sans parler aussi de son père.
Gilles : exposition
Il jette ses déchets par la fenêtre de sa grosse bagnole dans les embouteillages. Arrive tard à sa grande maison et s’énerve parce que sa fille a tout laissé en bordel.
Rodolphe : développement (dév.)
Il s’ennuie dans un petit vernissage. Il ne supporte plus les discussions creuses et se réfugie aux toilettes. Il entend un homme menacer une artiste montante parce qu’elle s’est engagée à l’aider à blanchir de l’argent par la vente de certaines œuvres. Il sort après que l’homme soit parti et fait un discours fataliste à l’artiste en lui expliquant que c’est comme ça que les choses fonctionnent et qu’elle sera plus heureuse si elle s’y fait.
Yann : dév.
Va boire un verre avec une connaissance prétentieuse et riche. Ce gars et lui draguent des filles dans le bar avec la question de la richesse en toile de fond. Discussion idéologique. Le ton monte. La connaissance part en laissant la note salée de la soirée à Yann.
Laure : dév.
Des photos qu’elle prend lors de ses sorties circulent dans la rédaction de l’indé. Certains se moquent, d’autres les trouvent très bonnes. Gilles prend la défense de Laure et lui propose d’en publier certaines dans le journal.
Gilles : dév.
Sa grosse baraque lui coute trop cher, il doit ruser avec divers créanciers.
Rodolphe : dév. 2
Gilles lui met bcp de pression (suite au rachat certains vont être virés) pour qu’il produise un très bon article. Il sait que l’artiste montante de la scène précédente va organiser une expo dénonçant les mafieux dans le milieu de l’art. Il appelle un de ces pseudo-mafieux pour dénoncer le projet et créer ainsi un événement qu’il pourrait couvrir mais change d’avis (après en avoir déjà beaucoup dit). Il mène une enquête avec Yann, soutien une artiste qui a été tabassée et écrit un article coup-de-poing sur le blanchiment dans le milieu de l’art.
Yann : dév. 2
Lors d’une conférence, il a rencontré une femme qu’il aime vraiment bien. Il lui propose de l’accompagner à l’hôtel où ils couchent ensemble. Le lendemain, elle sous-entend qu’il ne doit pas prendre leur relation très au sérieux puisqu’il a choisi un hôtel miteux.
Après un long échange, il lui donne raison et décide de lui faire une surprise vraiment classe.
Il veut obtenir une avance pour cela mais n’est pas prêts à faire des articles de commande pour l’obtenir. La relation amoureuse foire finalement pour d’autres raisons (un malentendu).
Laure : dév. 2
Ses photos ont beaucoup de succès mais l’une d’elle montrant une mendiante fait polémique. Elle débat avec ceux qui dénigrent son travail. Son père et Rodolphe l’interpellent. Son père estime qu’elle trahi les valeurs d’humanisme pour lesquelles il s’est battu. Elle s’énerve et lui rappelle certaines photos de guerre qui exploitaient aussi la misère et la souffrance de ses modèles.
Gilles : dév. 2
Son ex-femme avec qui il est fier d’avoir divorcé à l’amiable le contacte. Elle veut se « ressourcer » au Canada et veut emmener Juliette, leur fille de 12 ans. (Je demande à Amélie - qui cadre - de ne pas créer une ex-femme trop caricaturale à la fois pour éviter la parodie et parce que je n’imagine pas mon perso s’être marié avec une mégère). Le ton monte, ça se règlera en justice…
Rodolphe : dév. 3
Il est sauvé et présenté en héros suite à son dernier article. Il est pleinement heureux et recommence à se consacrer à des petits articles (quel est le meilleur resto thaï en ville ?).
La police le contacte. Le mafieux qu’il avait contacté par téléphone était sous écoute. Il refuse de s’entendre avec la police et ceux-ci mettent à exécution leur menace de transmettre la retranscription de l’écoute à des journaux concurrents.
Sa réputation est salie. Il veut obtenir de l’artiste tabassée qu’elle prenne parti pour lui. Elle lui demande des explications et il préfère tenter de l’acheter. Echec, elle se fâche. Scandale.
Yann : dév.3
Il risque d’être éclaboussé par le scandale provoqué par Rodolphe puisqu’il a participé à l’enquête. Retrouve un Rodolphe dépressif qu’il engueule en lui affirmant qu’il a trahi leur idéal commun.
Laure : dév. 3
Traverse diverses épreuves alors qu’elle veut quitter son job et tenter d’en trouver un autre. Gilles tente de lui faire du chantage émotionnel mais elle part du journal.
Gilles : dév. 3
Fugue de sa fille qui téléphone à sa nouvelle épouse. Ils vont chercher sa fille. Voyage aller et voyage retour en voiture. Il impose son autorité à sa fille et fait comprendre à sa nouvelle femme qu’il ne veut pas qu’elle interfère dans sa relation avec sa fille.
Résumé de la suite et fin des persos (je saute quelques dév. pour en venir au final de chacun)
Rodolphe se suicide.
Yann décide de bosser pour une boite en rupture avec ses idéaux mais qui le paye très bien.
Laure se libère de l’emprise de son père et lance ses propres projets.
Gilles laisse sa fille partir avec son ex, il rompt avec sa nouvelle femme et se réfugie dans le boulot jusqu’à la faillite du journal (provoqué par les actes d’autres joueurs dans des scènes non-résumées ici)…
COMMENTAIRES
On a tous beaucoup aimé.
Il me semble que j’ai mal présenté le jeu en laissant penser qu’il s’agissait de se mettre en difficulté mutuellement.
On a tous cadré « à la jugulaire » en tentant souvent de mettre les persos des autres face à des choix aussi durs que possible. Certains ont même délibérément aggravé la situation de leur perso (la tentative de corruption de Rodolphe était manifestement destinée à échouer ; Yann dans des scènes non-racontées ici fait passer un article qui met la survie du journal en danger ; Gilles qui se fâchait avec ceux qu’il aimait).
J’en suis venu à me demander si nous ne sommes pas passés à côté d’une partie du jeu en jouant à mi-chemin entre « fais-moi mal » et « je ne t’abandonnerai pas ».
Fab a aimé les nombreuses possibilités d’explorer des cadres inhabituels qu’offre le jeu et il a adoré la fiction. Il trouvait que l’apparition d’un conflit avait été utilisée parfois pour rompre avec une situation difficile qu’il aurait été plus intéressant d’aborder en roleplay (mon perso qui veut imposer son autorité à sa fille plutôt que de discuter).
Amélie a beaucoup aimé mais elle regrettait qu’outre la bienveillance à table nous n’ayons pas aussi été un peu plus bienveillants vis-à-vis des persos. Elle aurait aussi aimé des conflits plus courts peut-être sans carte et pouvant être résolus en un jet de dé.
Thomas a beaucoup aimé l’histoire. Il remarque aussi que certains conflits ont permis d’échapper à l’intensité de la scène (je crois que j’ai mal géré cette question en créant ou proposant trop vite des conflits).
Moi, j’ai été irrité par certains PNJ qui je trouvais excessifs (l’ex-femme de mon perso que je trouvais caricaturale). Je suis ultra-fan du jeu qui va nous permettre d’explorer de nombreuses questions dont nous discutions souvent. J’ai déjà plein d’idées de cadres à explorer ou de problèmes à aborder.
Je pense que les deux principales difficultés rencontrées ont été plus causées par mon inexpérience avec ce jeu que par le jeu lui-même. Le ton avec lequel j’ai cadré deux scènes a incité les autres à cadrer durement et j’ai sans doute mal utilisé les conflits.
Bilan : on a planifié plusieurs autres parties, on est très enthousiastes mais je crois qu’on doit encore apprendre à mieux jouer au jeu.
Je me réjouis de la diversité des parties qu'on va pouvoir faire avec ce très bon jeu !